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Un militant socialiste de base...

Publié le 11 juin 2009 par Marc Vasseur
Un militant socialiste de base... Je l'avoue, j'ai piqué ce texte chez Guy Birenbaum... je sais c'est mal mais comme la loi Hadopi a été remisée par le Conseil Constitutionnel... je ne n'aurai pas mon Internet coupé.

Plus sérieusement, ce témoignage n'est hélas pas carricatural... il est le Parti Socialiste, à tous les niveaux, dans l'immense majorité des fédérations... Sinon dans 6 mois... on nous dira que tout va bien mais en fait rien n'aura changé...

Pour un militant socialiste, les résultats de ce scrutin sont tout, sauf une surprise.


Le parti est un navire qui tangue depuis 2002 et ne tardera pas à chavirer.


Si vraiment un journaliste veut comprendre la manière dont le parti fonctionne ou plutôt ne fonctionne pas, alors il lui suffit de se rendre en réunion de section. Pas une fois, seulement, comme ça, pour voir, mais de manière répétée, plusieurs années de suite. Et il aura là, devant lui, le spectacle le plus magnifique de la force d'inertie dans toute sa splendeur.


"Il faut que tout change pour que rien ne change."
a écrit Lampedusa dans Le Guépard, c’est la devise de tous les premiers secrétaires depuis 10 ans, c'est-à-dire de François Hollande


1. La section cu-culture… C’est cucul, c'est gnagnan, c'est la section culture.


J'ai été inscrit pendant plusieurs années (2000-2006) à la section culture qui se réunit rue de Solférino

Eh oui, vous l'ignorez peut être, et la direction du parti sûrement, le parti possède en son sein une section culture. C'est sûr, vous ne l'avez pas beaucoup entendue pendant le débat sur le statut des intermittents, ni, dernièrement, au sujet du vote sur la loi Hadopi.


C'était sympa, on y croisait Danielle Evenou, ou même Dominique Besnehard qui y passait parfois en ami… Et dans les réunions, on y parlait de tout et de rien, plutôt fiers de se rendre au siège du parti et d'y discuter une petite heure.

Le secrétaire de section est de bonne volonté et essaie de motiver les troupes pour les faire travailler. Bon la section n'est pas très active mais elle est surtout totalement oubliée de la direction nationale car ce n'est pas une section de terrain. Alors en haut, dans les hautes instances du parti, on s'en fout de la section culture, en dépit du nombre de ses adhérents.


De souvenir, la section avait élaboré des propositions pour la culture qui devait servir pour le programme de la campagne de Jospin en 2002, mais Jospin avait fait son programme en vase clos avec quelques-uns, dont Moscovici, je crois, et on n'avait pas retrouvé beaucoup de nos propositions dans le texte final.

Premier exemple d'une section qui pédale dans le vide.


Et puis j'ai déménagé, et ne travaillant plus dans le secteur culturel, j'ai décidé d'adhérer à la section de ma ville, Meaux. La section de Meaux est une photographie exemplaire d'un parti en train de dépérir
.

2. Meaux…Un an d'attente pour adhérer au parti, qui dit mieux ?


Je suis donc passé un samedi matin de mars 2008 dans le petit local exigu et riquiqui près de la place du marché à Meaux. J'ai laissé mon numéro de téléphone pour que le secrétaire de section me rappelle. Et puis rien, pendant une semaine, rien…


Alors je suis repassé et j'ai vu le secrétaire de section qui s'est excusé de ne pas m'avoir rappelé.


J'ai demandé à adhérer et pendant un an, j'ai attendu qu'on s'occupe de moi.

Comme j'étais avant adhérent à la section culture, le secrétaire de section m'avait demandé à ce que je fasse le nécessaire pour que je m'occupe moi-même de mon transfert. J'ai appris que j'avais été radié de la section culture, j'en ai donc informé le secrétaire de section qui a demandé à la trésorière de me transmettre un formulaire d'inscription et vous savez quoi ? Toute cette procédure a mis un an sans que cela inquiète le secrétaire de section. Un an, incroyable non ? Tout va bien au parti socialiste.


Lors d'une récente réunion, le secrétaire de section a émis le souhait de faire le tour de lycées pour recruter de nouveaux adhérents. Par email, je lui ai indiqué que si les prochains nouveaux adhérents devaient attendre un an pour adhérer, ils perdraient sans doute patience. Ce à quoi, il m'a été répondu, “Mais si tu veux adhérer plus vite, tu peux le faire sur internet.”


Voilà, j'ai attendu un an pour qu'on me dise : "Ben t'as qu'à t'inscrire sur Internet" …. Youpi, quelle efficacité!


3. Le fonctionnement de la section à Meaux : mon grille pain fonctionne mieux.


Comme on dit au Lido, "c'est magnifique".


Déjà ce qui me frappe, c'est qu'il n'y a plus que des "vieux", on se croirait dans une section du parti communiste dans les années 90. J'ai 35 ans et je suis le plus jeune, je crois.

En plus, Meaux se paie le luxe d’avoir deux sections, héritage de querelles passées. Dans cette section, il faut le savoir, les militants quittent le navire mais ça n'inquiète personne.


Avant que j’arrive, il y avait un jeune assez dynamique qui avait essayé de faire bouger les choses, sans succès. Le secrétaire de section moque encore les adhésions spontanées qu'il avait amené et Jean-François Copé, maire de Meaux, n'a eu aucun mal à recruter ce jeune homme plein de bonne volonté dans son équipe, pour jouer, lui aussi, la sérénade de l’ouverture.


Dernièrement, après le congrès de Reims, nous avons assisté au départ de cinq membres : le trésorier, deux militants historiques et de la tête de liste aux dernières élections municipales. Ces défections ne sont pas anodines : ce sont des cadres qui partent et ce qui se passe à Meaux se passe ailleurs.


Où sont-ils partis ? Chez Mélenchon. Et quelle personnalité est venue rendre visite en 3 ans à la section PS de Meaux ? Mélenchon.


Ah ben, c'est bizarre quand même…


La section ressemble à une salle des fêtes triste qui se vide doucement.
Et il n'y a qu'à se pencher pour ramasser les adhérents déçus. Bayrou l'a compris en 2007 et Cohn-Bendit n'a pas eu de mal à en récupérer d'autres.

Alors je vous vois venir, vous vous dîtes : "ouaiiis mais c'est la section de Meaux, Copé règne en maître dans sa ville, c'est normal…"

J'ai parlé à un ami militant à la section d'Orléans. Il m’a confié que cela fonctionne de moins en moins bien aussi, les militants ne viennent plus autant qu’avant et c'est même la guerre entre deux clans.

A Orléans, on trouve une ancienne vedette, le sénateur tout puissant qu’on ne nomme plus, et une guerre larvée entre les soi disant héritiers de ce baron local et une partie de la section qui veut se débarrasser de ce fantôme encombrant dont l'immobilisme et la crispation leur a déjà fait perdre la mairie. Bref, c'est pareil là bas aussi et d'autres causes provoquent les mêmes effets : démobilisation, démotivation, abandon…


4. Qu'est ce qu'on fait en section alors ? Ben pas grand-chose…


Le secrétaire de section s'intéresse principalement aux échéances électorales intermédiaires du type cantonales, là où on a le plus de chances : pas les municipales, elles sont perdues d'avance tant que Copé est là, voilà ce qu'on nous dit...


Donc, depuis que j'y suis, on y parle surtout du parti et de ses problèmes, de la guerre des chefs. Le secrétaire de section lance du "Il faudrait que… "si "quelqu'un pouvait… ", voilà, il lance des idées.

Il est très fort en idées mais il a un métier et autre chose à faire. Et puis, il est pessimiste, il sait que l’avenir est loin d’être rose. Alors pourquoi s’épuiser, surtout à Meaux ? Il est secondé par une femme active mais qui ne sait plus comment faire pour mobiliser les troupes vieillissantes.


L'autre jour Alain Richard, l’ancien ministre de la défense de Lionel Jospin, est venu nous voir pour défendre sa place, 5ème sur la liste en Île-de-France. Il y avait un peu de monde. Les militants étaient contents de voir enfin une "vedette" se déplacer à Meaux, pour une fois…


Mais là, j'ai pu constater le décalage énorme entre nos responsables et la base
: voilà un énarque, irréprochable professionnellement, mais complètement à côté de la plaque : lorsqu'il nous dit que c'est à nous que revient la responsabilité de faire des réunions d'appartements, de faire le tractage sur les marchés. Ah ah, la bonne blague ! J'ai envie de lui dire qu'il faut qu'il atterrisse : "tu vas venir à Meaux nous aider à tracter peut être ?" Qui va faire des réunions d'appartements à Meaux ? Faut qu'il revienne sur terre on est plus dans les années 80 à faire des réunions d'apparts en costume pied de poule autour d'une Tourtel et trois chips !


Et surtout, à quoi sert Internet au fait ? Qu'a fait le parti socialiste avec Internet depuis dix ans ? Pas grand-chose….


Voilà, ce n'est qu'un aperçu mais qui vous donnera une idée de ce qu'est le parti socialiste aujourd'hui.

Un parti miné par l'ambition d'anciens responsables, déconnectés de la réalité, qui, s'ils avaient un peu d'honneur, démissionneraient de leur mandat, au lieu de croire que la loi de l'alternance les portera de toute façon un jour au pouvoir.


Un parti qui n'a plus rien à proposer n'a pas à exister
: beaucoup pensent qu'une dissolution pour une reconstruction serait beaucoup plus enthousiasmante, dynamisante qu'une énième et illusoire réconciliation.

Quant au siège du PS, c’est une devenu une citadelle où même les militants n'ont plus le droit de se promener. Des vigiles vous en chassent dès que vous avez le tort de traîner dix minutes de trop. Il ne s'y passe rien : ce devrait être un lieu de vie, de débats, de spectacle, pourquoi pas ?


Depuis que Monsieur Jospin est parti avec son orgueil et ses valises, c’est un désert bourgeois
, un château aux antichambres, où on fait des plans sur la comète, un couteau dissimulé  derrière des sourires (avant les élections) ou des mines déconfites (après les élections).


Les solutions ? Il n’y en a pas 2, pas 3. Mais 10 000 !


Pour peu qu'on demande vraiment leur avis aux militants.


Demandez moi, j'en ai au moins 100, et tous les militants en ont aussi au moins 10 chacun.

Déjà, que le contre programme de crise d’Aubry ne mette pas en exergue les thèmes de l’Europe et de l’Ecologie m’avait semblé une erreur monumentale. Maintenant, elle ressasse les mêmes paroles que ses prédécesseurs: rénovation, refondation…


J’ai envie de lui dire : "Ben pousse-toi, t’es sur le chantier Martine, tu nous empêches de bosser. Retourne à Lille, tu ne veux pas quitter ta ville sous prétexte de ne pas vouloir perdre le contact avec le terrain. Mais si tu faisais le tour des sections, tu ne le perdrais pas ce contact avec le terrain et tu te rendrais compte du désastre…"


Au lieu de se ruer à nouveau sur l'idée débile, stupide de la désignation d'un candidat pour 2012
, demandons nous d'abord quel projet nous souhaitons, qu’est ce qui nous rassemble ?

Être socialiste veut-il vraiment dire quelque chose aujourd’hui ?


Et si nos chers responsables ne le font pas, alors nous irons ailleurs, ressassant notre nostalgie, comme nos anciens voisins communistes.


Au fait, je n’ai toujours pas repris ma carte...


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