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« Ambition personnelle, attaques ad hominem et "débilité intellectuelle " ! »

Publié le 12 juin 2009 par Raoul Sabas

Le 12 juin 2009


Objet :

« Ambition personnelle, attaques ad hominem  et "débilité intellectuelle " ! »

Monsieur François Bayrou

Mouvement démocrate

133 bis, rue de l'Université

75007 PARIS

Fax : 01 53 59 20 59

 Monsieur,

La publication de votre brûlot, exclusivement à charge contre Nicolas Sarkozy, ainsi que la pitoyable algarade avec Daniel Cohn-Bendit, survenue au cours de l'émission de France 2 « A vous de juger » du 4 courant, me donnent deux excellentes raisons de relancer un débat d'idées que vous refusez obstinément depuis le 7 décembre 2004, et de vous accuser, une fois de plus, de colporter les mensonges et les « croyances au miracle » du monde - la première étant ma lettre sans ambiguïté du.9 avril 2007, puisqu'elle avait pour objet « J'ACCUSE : Assez de mensonges et de manipulation ! »

Déjà, dans ma lettre du 7 décembre 2004, je vous avais fait parvenir la copie du courrier adressé au député UDF Francis Vercamer, où je dénonçai, arguments intellectuels et philosophiques à l'appui, les mensonges et les « croyances au miracle » du penser superstitieux humain, notamment en matière d'idéologie et de moralisme, auxquels votre obstination dans le silence apporte un concours actif, et d'autant plus actif que la quinzaine de lettres, qui a suivi, est également toujours sans réponse à ce jour.

Une telle constance dans le refus de débattre sur le fond témoigne incontestablement, outre une lâcheté et une malhonnêteté intellectuelles avérées, de la caution implicite que vous apportez à la superstition idéologique et moraliste. Et le fait de la partager avec la quasi-totalité des soi-disant « élites de l'époque, tous milieux confondus [Médias, politiciens, intelligentsia (prétendus intellectuels ou pseudo-philosophes) et associations moralisatrices à sens unique], figurant dans le texte annexé, Mensonges et lâcheté des élites, ne saurait vous exonérer de votre responsabilité personnelle dans la manipulation et la tromperie de l'opinion - sauf à vous-même, évidemment, de démontrer le contraire sur le fond !

Parmi la quinzaine de lettres adressée, je vous rappelle notamment celle du 30 janvier 2006 faisant référence à votre intention d'alors de « renoncer aux promesses électorales », à quoi je ne pouvais que souscrire vivement, tout en faisant valoir néanmoins mes réserves sur la concrétisation effective de cet engagement public. Assurément, je n'ai pas été déçu sur ce point, car vous n'avez eu de cesse, depuis lors, de prouver le contraire par inflation de promesses à visée électoraliste, fondées précisément sur les mensonges et les « croyances au miracle » du monde, dont vous avez peur de débattre - par « intérêt égoïste bien compris », évidemment !

En témoigne ma lettre du 30 novembre 2006, qui avait pour objet « Flagrant délit de mensonges », dans laquelle je dénonçai précisément, moins d'un an plus tard, les fallacieuses promesses de votre université d'été des 20 et 21 septembre 2006, où vous déclariez, avec fermeté et force de conviction, devant des militants hypnotisés par votre miraculeuse promesse :

« Je veux une société où ce ne soit pas un vain mot de penser que "égalité, ça existe", que "fraternité, ça existe", et que "liberté, ça a tout son poids aussi" ». [SIC !]

Dommage, d'ailleurs, que vous n'y ayez pas également parlé de la « violence » et de sa possible éradication dans la société française, et a fortiori dans le monde ! J'ai toujours en mémoire, en effet, la journée d'octobre 1996 que vous aviez initiée dans tous les lycées, collèges et écoles de France, en votre qualité de ministre de l'Education, pour débattre de la violence, après la mort du jeune Nicolas Bourgat - en dehors du cadre scolaire, faut-il le rappeler ! Or chacun voit bien, aujourd'hui, ce qu'il est advenu de la violence dans les établissements d'enseignement après tous ces beaux discours de l'époque, où aucun enseignant n'était pourtant encore agressé à l'arme blanche !

C'est pourquoi, si ce n'était votre ambition personnelle sur seul fondement d'antisarkozisme primaire, identique à celui de la gauche extrême et modérée, ce problème de violence scolaire d'aujourd'hui serait réellement une occasion de faire l' « union sacrée » - vendue seulement jusqu'ici dans une optique politicienne strictement égoïste ! - contre ce fléau croissant. Or, en réalité, face à toutes les ambitions personnelles, que pèse-t-il vraiment dans les calculs politiciens intéressés des uns et des autres, dont chacun prétend détenir sa solution dispersée et néanmoins idéale, susceptible toutefois de le faire monter dans les sondages d'opinion ?

Là, seulement, réside le véritable enjeu politicien d'aujourd'hui, tout comme hier et demain d'ailleurs, sinon aucun des « politiques », toutes tendances idéologiques confondues, n'aurait eu peur - depuis plus de dix ans ! - de confronter ses points de vue relatifs et partisans en général, et les fallacieuses promesses contradictoires en particulier, à LA Vérité éternelle absolue. Elle seule, en effet, est en mesure de les invalider définitivement, tous sans exception - sauf à vous-même ou à quiconque, évidemment, de démontrer le contraire !

D'ici votre démonstration contraire, au vu de la situation toujours actuelle, voire croissante, des inégalités en tous genres, de la violence et des innombrables maux de l'humanité, il vous reste, encore et toujours, à transformer vos rêves en réalité. Cette sempiternelle promesse, perpétuel mensonge et éternelle « croyance au miracle » du monde, ne revient ni plus ni moins qu'à se croire capable de transposer l'Idéal dans le quotidien, mais elle n'en trompe pas moins les humains, depuis la nuit des temps, dans leur attente vaine de l'arrivée de l'Idéal sur Terre - pour plagier Jacques Chirac, durant sa campagne présidentielle 2002, c'est tout simplement se croire apte à rendre possible l'impossible !

Dans nos pays d'instruction de masse d'aujourd'hui, un signe aussi manifeste de « débilité intellectuelle » rend la Superstition encore pire qu'aux temps les plus obscurantistes, du seul fait de continuer à attendre l'avènement d'un paradis sur Terre, qui ne viendra pourtant jamais. Philosophiquement parlant, ceci résulte de la confusion entre l'Idéal « en soi », ou Absolu, et les infinies conceptions idéalisées seulement relatives ; ainsi ces dernières, qu'elles soient forgées individuellement ou collectivement, n'en sont pas moins fictivement érigées en absolu, en Vérité absolue, ou élevées superstitieusement au rang d'Idéal.

C'est pourquoi même nos plus lointains descendants continueront à attendre en vain ce paradis terrestre jusqu'à leur dernier souffle au point de mourir « naïfs, cocus et frustrés », car, comme les millénaires passés l'attestent, cet autre monde, ce monde idéal précisément, est toujours renvoyé à DEMAIN et seulement à DEMAIN, à la saint Glinglin, quand plus aucun croyant au miracle d'aujourd'hui ne sera là pour le constater - sauf à vous-même ou à quiconque, évidemment, d'établir le contraire en y parvenant réellement ici et maintenant !

Hélas, votre vive et pitoyable altercation avec Daniel Cohn-Bendit, sur fondement d'attaques personnelles, ne laisse guère espérer en une « présidence Bayrou » pour parvenir à ce monde des « rêveurs », ce vieux rêve éculé de l'humanité - et pas davantage, d'ailleurs, sous la « présidence Obama », malgré de mirifiques engagements et de beaux discours entendant notamment réconcilier islam et modernité, alors même que la superstition musulmane s'avère incapable de faire l'unité en son sein entre des chiites et des sunnites qui s'entretuent !   

Vous avez dit « MENSONGES » ? OUI, exactement comme l'attestait déjà ce court extrait de l'émission Ripostes, en juin 2006, qui opposait votre tête de liste de la région Nord-est pour les élections européennes, Jean François Kahn en l'occurrence, à Philippe Manière, journaliste à BFM. En effet, à la déclaration suivante de ce dernier :

« Il faut arrêter de dire qu'on va changer le monde, non pas qu'on ne puisse pas le changer à terme, vous allez le faire, sûrement, dans mille ans, dans deux mille ans. Il vaut mieux dire aux gens, qu'il faut qu'ils prennent leur destin en main. Je pense que vous enfermez les gens dans la désespérance, en les faisant rêver à des lendemains qui chantent. », votre candidat soi-disant « expérimenté » répondit :

 « Si on dit qu'il faut cesser d'essayer de changer le monde et la société, alors, moi, je vais vous dire que vous ouvrez un boulevard formidable à ceux qui, eux, vont le dire pour le pire, qui sont les intégristes religieux, et qui le disent, les fascistes, et qui le disent, les nationalistes, et qui le disent ; si les démocrates sont les seuls aujourd'hui, s'ils disent qu'ils ne sont pas capables de transformer une société injuste, c'est épouvantable.» [Fin de citation]

Ces propos suffisent à attester les « croyances au miracle » de Jean-François Kahn, sinon il ne se lancerait pas dans l'arène politique, à son âge, en escomptant changer le monde ! Ce vœu pieux, bien que partagé par la quasi-totalité des humains d'aujourd'hui, est à mettre également au compte de la « débilité intellectuelle » généralisée de l'époque pour la simple raison, avérée et incontestable, que notre monde change constamment en raison de son mouvement universel et perpétuel. Celui-ci, en effet, n'affecte pas seulement les phénomènes naturels, modifications climatiques notamment, mais aussi toutes les choses de notre monde, humains compris, en tant que cause de leurs incessantes transformations.

D'ailleurs, pourquoi faudrait-il réformer, et réformer sans cesse, sinon pour s'adapter en permanence, précisément, au mouvement inéluctable du monde, quitte à avoir toujours un train de retard sur lui ? C'est sûrement pourquoi aussi, philosophiquement parlant, ce qui est absolu, ou idéal, est à la fois immuable. Ainsi, rendre idéal notre monde est à jamais « impossible », puisqu'il est constamment en mouvement, et donc en continuelle transformation - sauf à vous-même ou à quiconque, évidemment, de démontrer une quelconque contradiction dans la pensée philosophique de Spinoza et de Brunner sur l'Absolu, la réalité ou Vérité absolue !

De surcroît, vous arriverez d'autant moins aux fins idylliques promises, transposer l'Idéal  dans le quotidien, si vous comptez seulement sur votre soi-disant « libre arbitre », comme en témoigne votre expression « Je veux » de septembre 2006. Cette prétendue libre volonté, en vertu de laquelle il suffirait de vouloir pour pouvoir n'était assurément rien d'autre, alors, que le « Yes, we can » de Barack Obama, adepte comme vous de la « méthode Coué » : « Nous pouvons, parce que nous le voulons » ! Toutefois, au vu de sa réussite suprême que vous convoitez, égoïsme humain oblige, vous auriez bien tort de vous gêner, puisqu'il y aura toujours suffisamment de gogos pour « croire au miracle », comme j'en fus aussi en 1981 et 1988, et porter les menteurs, quels qu'ils soient, au sommet du pouvoir - d'autant plus que les promesses rendent les fous joyeux, paraît-il !

Or, hormis sa sempiternelle manifestation de « débilité intellectuelle », ou « croyance au miracle », cette soi-disant libre volonté est sans consistance, philosophiquement parlant, face à la « nécessité » spinoziste, celle évoquée, en son temps, par Mikhaïl Gorbatchev  déclarant : « Rien ne peut être fait hors du cadre d'une nécessité supérieure ». C'était précisément celle dont parlait Spinoza, ainsi que je vous en ai souvent et amplement entretenu sans obtenir d'objections de votre part pour autant - et pour cause ! En effet, si les responsables politiques en campagne se mettaient à dire aux électeurs qu'ils feront ce qu'ils peuvent et non pas ce qu'ils veulent, leur crédit serait sérieusement entamé, ainsi qu'Edouard Balladur a pu le constater à ses dépens en 1995 - c'est sûrement pourquoi vous n'entendez plus renoncer réellement à vos « promesses électorales », bien au contraire, comme j'y reviendrai !

La « nécessité » spinoziste, démontrée bien après Epictète, c'est le nécessaire devenir inéluctable d'un monde, où TOUT ce qui y advient (phénomènes naturels, évènements historiques, actions collectives et actes individuels) résulte de l'enchaînement infini de l'infinité des causes et des effets, consécutif au seul mouvement universel et perpétuel contre lequel même les marchands de rêve, et autres vendeurs d'illusion, sont totalement impuissants, n'en déplaise aux Jack Lang et consorts, dont Barack Obama, qui  prétendent : « Quand un gouvernement veut, il peut », ou « Yes, we can » - sauf à eux ou à quiconque, évidemment, de démontrer le contraire, en arrêtant le mouvement inexorable de la planète !

Malgré cette absolue impossibilité, il faut croire que toutes les élites, faiseuses d'opinion, n'en doutent pas dans leur « aberrante prétention » d'aujourd'hui d'instaurer sur la planète un climat « sur mesure » pour l'éternité - certes, encore DEMAIN, toujours DEMAIN, seulement DEMAIN, à la saint Glinglin comme dab ! Une preuve supplémentaire manifeste de la « débilité intellectuelle » de notre époque, que le devenir du monde ne manquera pas de confirmer au fil des siècles et des millénaires à venir - sauf à vous-même ou à quiconque, évidemment, d'apporter, d'ores et déjà, vos objections, scientifiquement et philosophiquement étayées, en faveur de cette superstitieuse croyance scientiste du jour ! ! !

Toutefois, il en va de même pour votre « croyance au miracle » de parvenir à transposer l'Idéal dans le quotidien par une miraculeuse coalition de la droite et de la gauche, alors que la gauche, voire les seuls socialistes, manifestent quotidiennement leur impossibilité chronique de s'unir entre eux. Ceci ne vous avait pourtant pas empêché, alors, de vanter les succès des coalitions allemande et italienne, dont on voit aujourd'hui ce qu'elles sont devenues. C'est sûrement pourquoi j'attends toujours votre réponse à ma lettre du 9 avril 2007, ayant comme objet « J'ACCUSE : Assez de mensonges et de manipulation ! », pour avoir déclaré au cours de l'émission politique de Laurence Ferrari sur Canal + :

« Cette nouveauté (votre projet de coalition), c'est la vie quotidienne de chacun des pays qui nous entourent, de tous ceux qui sont autour de nous et qui, depuis longtemps, ont réussi à bâtir des alliances, des coalitions, à discuter ensemble pour le plus grand bien du pays dont ils ont la charge. »

C'était oublier que les coalitions évoquées n'avaient rien à voir avec votre proposition de réunir deux visions opposées de la société, la libérale et la socialiste. La coalition italienne, en effet, ne regroupait que des partis de gauche, tandis que la coalition allemande résultait seulement d'une élection à 50/50 entre les deux grandes formations germaniques, donc de l'impossibilité pratique, politique et juridique de confier la gouvernance à l'une plus qu'à l'autre.

Pourtant, dans ma lettre du 27 février 2007, intitulée, « De la théorie à l'aventurisme, ou l'art de faire du neuf avec du vieux ! », j'avais déjà  dénoncé votre projet de coalition droite-gauche, la « droiche » selon l'expression de Philippe de Villiers, à l'aune seulement des combinaisons intéressées d'une IVème République, dont l'existence éphémère est surtout due aux piteux résultats de ses ententes hétéroclites circonstancielles, tandis que la cinquième, en dépit de toutes les critiques partisanes, a déjà fêté son demi-siècle, en pratiquant précisément l'ouverture, souhaitée par vous, entre gens de droite et de gauche, que vous feignez d'ignorer dans vos critiques partisanes. En revanche, l'obstruction parlementaire systématique, plus sectaire que jamais, n'est guère un gage de réussite de votre coalition électoraliste, car même un président de la République ne la maîtrise pas - sinon, ça se saurait depuis longtemps !


A SUIVRE... 


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