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“Entre nous, ce n’est qu’un blog” (texte décousu et peut-être provisoire en mode automatique)

Par Junkofrantic

Je venais de lire une dédicace, au milieu d’une page blanche : “à tous les fox-terriers qui se prennent pour des terre-neuve”, puis je suis allée dans le “compte abonnés” du logiciel pour signaler l’emprunt du livre, même si j’aurais pu l’embarquer sans que personne ne le sache puisqu’il s’agissait de “ma bibliothèque”. Je ne savais rien de l’auteur, et le titre ne m’inspirait pas spécialement, l’histoire encore moins, va savoir pourquoi je me suis sentie visée par cette première page, sans pour autant appartenir à l’espèce canine. Bref, je l’ai glissé dans mon sac, difficilement car il y avait déjà deux livres à l’intérieur (on n’est jamais trop prudent de ce côté-là, il faut prévoir l’attente du bus surtout quand on est non-fumeuse). Dans la foulée, j’ai ajouté un quatrième livre, cette fois-ci à cause du titre : “Parfums des étés perdus”, c’était, comment dire, en accord avec mon état d’esprit.

Ensuite, je me suis aperçue que je grattais machinalement mon poignet… J’ai observé une grappe de petits boutons rouges – piqûres d’insectes, herbe vénéneuse ? – qui doit dater de mon week-end à Annecy. J’ai pensé à l’existence d’une peau qui inscrirait tout ce qu’elle touche. Sur la mienne, il y aurait notamment l’herbe fraîche, la buée de la bouteille de rosé, la chaleur du soleil comme un halo, et ce serait certainement plus agréable à contempler, plus juste aussi. Imagine une gorge qui saurait également témoigner des paroles douces et des rires entendus, comme un magnétophone, ce serait bien. Ou encore une langue sur laquelle s’attarderait la glace avalée dans une rue piétonne, sous forme de paillettes sucrées… J’ai besoin de sensations actuellement, je suppose, brèves mais durables, car je ne mémorise rien ces temps-ci, sinon j’écrirais davantage. Mon père me l’a longtemps reproché : “tu n’es pas au monde”. C’était une curieuse expression mais je la comprends, elle signifie que je ne capte pas le présent, d’autres me l’ont dit après lui.

Mon père, je l’ai aimé ce week-end là, en tête à tête, entre un concert raté et une expérience gastronomique. Je me suis souvenue de ce moment où la mère de Poil de Carotte dit à ce dernier : “pourtant tu es celui qui me ressemble le plus”. C’est à mon père que je ressemble, finalement, y compris quand je singe ma mère. A je ne sais plus quelle heure de l’après-midi, au centre-ville, il m’a dit avec une naïveté émouvante : “je ne comprends pas pourquoi tu n’es pas sure de toi”. Je lui ai répondu “tu n’as jamais été satisfait de moi, alors tu y es peut-être pour quelque chose”. Il a eu l’air à la fois étonné et consterné : “je ne me suis pas montré satisfait pour que tu puisses faire toujours mieux !” J’ai avoué en toute honnêteté avinée : “bah alors tu as raté ton coup, ce n’est pas grave, je crois que c’est difficile d’être un parent”. Nous slalomions entre les merdes de chien, les traces de vomi du samedi soir, et les crachats… Je me disais bêtement que le fond de l’être se révélait à ses déjections dégueulasses. Il a ajouté “sache que je suis content de ce que tu es devenue : tu es jolie, intelligente et équilibrée”. J’ai réprimé mon rire, sa phrase me donne encore des hoquets nerveux quand j’y repense d’ailleurs… J’ai simplement conclu “merci”, en ajoutant intérieurement “si tu savais…”, mais dans le fond j’étais satisfaite : l’image était sauve. De plus, je sais que de tels propos l’auraient fait vomir de honte quelques années plus tôt.

J’ai eu envie de pleurer bien après son départ, alors que je déambulais dans mon appartement désert en me plaignant à Mon Amoureux : “je n’ai pas d’amis à Lyon, j’en ai ailleurs mais pas ici ; quand je veux boire un verre à l’improviste avec quelqu’un, il n’y a personne, d’ailleurs même toi tu n’es pas là, et si je crevais cette nuit personne ne le saurait”. “Peut-être, mais tu ne vas pas mourir ce soir hein ?” “Non, non, j’espère que non”. Je me suis glissée dans le lit, en repoussant la couette très loin de moi du bout des pieds. L’orage tonnait derrière la fenêtre. C’était un temps lourd, étouffant, humide, de ceux qui absorbent les inspirations et l’énergie en pesant sur le corps… Pourtant, je rêvais d’une peau moite contre la mienne, d’un autre souffle, d’une conversation inutile mais humaine, et j’avais réellement l’impression d’être seule au monde. J’ai songé que c’était peut-être ce que ressentaient les vieux, la peau fripée et les rhumatismes en plus, quand ils s’endormaient en se demandant s’ils se réveilleraient le lendemain, du fond de leur draps rêches. Ensuite, Morphée a accepté de m’emporter, puis le réveil a sonné, pour un jour de plus, complètement vain par certains côtés, nécessaire sous d’autres aspects… Entre le verre à moitié plein et le verre à moitié vide, il y a l’image du verre cassé aussi, celui que tu bois au risque de te trancher la langue.

Non, je ne vais pas merveilleusement bien en ce moment mais, non je ne mourrai sans doute pas ce soir, et oui je vis des moments inespérés en (t’)attendant, certainement : tout ira mieux quand tu seras là, contre moi.

(En l’occurrence, le clip je m’en fous, c’est la chanson qui m’intéresse mais j’ai la flemme de la mettre sur le serveur. C’est la chanson de mes angoisses nocturnes depuis de longues, longues années).


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