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raconter avant première, angoisse avant une étape de création

Publié le 25 juin 2009 par Moi1001
raconter avant première, angoisse avant une étape de créationSe raconter, raconter des histoires. C'est comme ça, s'écoutant, qu'on en arrive à fermer les yeux et, imaginant qu'on serait autre, qu'on serait fort, qu'on serait grand, qu'on aurait pas peur, qu'on avance et construit. Mais un jour on ouvre les yeux ; mais un jour on se réveille ; mais un jour on en arrive à ne plus vouloir s'écouter alors, on regarde autour de soi et c'est le désert. Les villes et leurs places arborées, les âmes, tout, tout à disparu. Alors on se dit que c'est comme ça doit être, mais on ne  se le dit pas tout de suite. Parfois ouvrant les yeux, on se rend compte que le monde qu'on voudrait pour nos enfants, celui qui entre idéal et réalité résiste, celui là, il n'est que rêve. Alors de l'oeil une larme s'échappe. Mais, il ne faudrait pas que ça soit trop triste. Peut-être pour cela, il ne faudrait pas se raconter, raconter des histoires... Il faudrait juste avancer, sans idéal, sans croyance ; il faudrait arrêter de raconter des histoires qui mènent aux rêves, il faudrait arrêter, j'arrête de. Rentrer dans le rang, rejoindre la troupe, se terrer, fermer les yeux et ne rien voir, ne rien imaginer, ne rien penser, ne pas être. Construire une vie sur ça ; sur le néant, l'absence de rêve et d'idéal devenant la vie idéale. Le matin un geste qu'on saurait être reproductible, la journée et le soir émaillés de gestes qu'on saurait reproductibles. J'éteins le réveil, j'allume une cigarette, appuie sur le bouton "on" de la cafetière de la bouilloire,  je me lave, je m'habille, je descends les marches, rejoins l'arrêt d'autobus, composte mon billet, les yeux dans le vague je lis les nouvelles, les mêmes que celles de la veille, les mêmes que celle du lendemain, je ne le sais pas, je ne le remarque pas, je n'ai pas à appuyer sur le bouton pour descendre et rejoindre mon lieu de travail, je n'ai pas à m'émerveiller devant les fleurs qui poussent, les arbres qui bourgeonnent, je n'ai pas non plus, à m'indigner de la pauvreté qui grandit et des ses signes qui se multiplient dans l'espace public, je ne pense pas lorsque je dis bonjour à mes collaborateurs, je ne souffre pas, je ne suis pas.  Le temps passerait, les jours avec, se reproduisant étrangement sans que je m'en apperçoive. Les gestes seraient les mêmes mais je ne le verrai pas. Je serai heureux ! Le soir lorsque je fermerai les yeux, il n'y aurait rien derrière mes paupières closes. Ecoute, écoute, tu ne me crois pas ? Tu ne m'entends pas ? Ecoute, écoute, tu ne vois pas ? Le vent a cessé de souffler ? Les oreilles ne savent plus distinguer sa douce chanson, j'ouvre les yeux et ne vois rien ! J'écoute et n'entends rien, je ne suis pas ! Un nouvel idéal, un nouvel eden, celui de l'absence!
C'est ici que je recommence, relisant les mots écrits la veille, je ne peux que constater le fil sombre d'une pensée. Et quand je veux recommencer autrement, je n'y arrive pas. Appuyer sur le bouton publier sera mon dernier mot du jour.

Fabrice Levy-Hadida - Cie Les Mille et une Vies - Théâtre de Marionnettes Itinérant
Illustration-dessin  de Frédéric Levy-Hadida (recherche 2004 autour de la création de Seul(s))


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