Magazine Culture

Qui veut noyer son chien…

Publié le 30 juin 2009 par Rendez-Vous Du Patrimoine
Qui veut noyer son chien…

Cliché I. Rambaud (Dinard dans 10 ans ?)

Il est à nouveau question de battre en brèche le "pouvoir des ABF", autrement dit des Architectes des bâtiments de France, autrement dit du pouvoir que l'Etat lui-même avait jusqu'à présent de contrôler les constructions neuves dans le périmètre d'un Monument historique ou dans celui des fameuses ZPPAUP. Derrière ce sigle un peu bourdonnant se cachent les "Zones de protection du patrimoine architectural, urbanistique et paysager" qui constituent des réserves urbaines où s’exercent des règles particulières adoptées par les communes et leurs habitants.
Curieusement, c’est à la faveur du Grenelle II de l’environnement que la question de l’avis « conforme » des ABF (avis qui s’impose) refait surface avec une proposition visant à le supprimer.
Loin de moi l’idée de vouloir à tout prix défendre les avis conformes qui parfois ont pu passer pour arbitraires alors qu’ils auraient mérité plus de dialogue.

Mais face au « pouvoir des ABF » qui n’était ni plus ni moins que celui de l’Etat dans le département, se dresse sous couvert de développement durable un nouveau « pouvoir », un autre « lobby », une nouvelle tyrannie, celui de la libre entreprise à tout prix.
Laissez-faire, laissez construire, laissez pousser. Voilà la nouvelle devise.

En janvier 2009, un amendement à la « loi d’accélération de la construction » avait déjà cherché à supprimer l’avis conforme sous prétexte de lourdeurs administratives.
Mais le Conseil Constitutionnel s’était mis en travers : le 12 février, il déclarait les articles concernés non-constitutionnels.

Qu’à cela ne tienne, maintenant, il s’agit de favoriser le « développement durable » et « donc » de supprimer l’avis conforme, comme incompatible avec la modernité et la technologie (éoliennes par exemple).
Le G8 du patrimoine (les associations nationales reconnues d’utilité publique) a appelé le gouvernement à raison garder (lettre du 3 juin).

Opposer patrimoine et développement durable est en effet une hérésie suicidaire. La même qui consisterait à monter les jeunes contres les vieux au sein d’une même famille. Les générations se succèdent avec leurs désirs et leurs formes différentes de créativité.
Aller de l’avant est une bonne chose. Ce n’est pas une raison pour provoquer des incohérences que l’on regrettera (destruction d’alignements par exemple) sous prétexte d’ « accélérer » la production en répondant hâtivement au lobby des quelques puissants du moment.
P.S. Le proverbe complet est « Qui veut noyer son chien, l’accuse de la rage ». Rappelez-vous, cette formule est employée par Martine, la servante des « Femmes savantes » (Molière) qui se fait chasser par sa maîtresse parce qu’elle ne parle pas un beau français et confond « grammaire » avec « grand-mère », crime impardonnable (acte II, scènes 5 et 6).
C’est moins grave que de rejeter les « avis conformes », bien utiles pour la protection du patrimoine, en obéissant aveuglément au nouveau « conformisme » ou de dire comme l’impérieuse Philaminte « Je ne veux point d'obstacle aux désirs que je montre ! »
Les ABF seraient-ils enragés ? Les ABF seraient-ils un obstacle ? Il faut le croire…

Merci pour votre lecture ! Thank you for reading !

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Rendez-Vous Du Patrimoine 77 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossiers Paperblog

Magazine