Par Hong Kong Fou-Fou
- Allo Moneypenny ? Oui, c'est James. Je vous appelle depuis la page 261 de mon nouveau
roman.
- James ? Je vous entends mal, il y a de la friture sur la ligne.
- De la friture ? De la semoule, plutôt : je suis en Perse !
- En Perse ? Ils vous ont gâté, vous qui ne supportez pas la chaleur. Vous avez pris votre crème solaire au moins ?
- Moneypenny, arrêtez, mon petit, on dirait ma mère...
- Hmmm, pourtant, j'aimerais bien vous étaler de la crème sur le corps...
- Oulala, on se calme ! Ne m'excitez pas, d'autant plus que j'en suis aux trois-quarts du bouquin, et
question gaudriole, c'est la dèche. A quoi ça sert d'être agent secret si c'est pour avoir une vie sexuelle aussi terne que celle d'un contrôleur des finances ? Passez-moi l'expression
Moneypenny, mais j'ai les précieuses aussi pleines et rondes que le 00 qui me sert de matricule !... Pour le côté Q, c'est ceinture, je ne me sers pas souvent de mon gadget, ahah
!
- James !!! Vous êtes vulgaire !!!
- Oui, pardon... Et je n'ai même pas une chouette voiture pour me consoler... On me trimballe en camion, en
avion, en Mercedes, même, c'te honte !... Mais je crois que l'Aston Martin, cette fois, walou ! Enfin, la bonne nouvelle, c'est qu'ils m'ont renvoyé dans les Sixties. J'ai enfin des fringues
décentes, je trouve enfin des tailleurs qui connaissent leur métier. Quand je pense à ce qu'on m'a fait porter dans les années 80. Même Benjamin Castaldi n'en voudrait pas !
- Vous connaissez Benjamin Castaldi, James ?
- Moneypenny, j'appartiens au MI-6, je me dois de connaître tous les terroristes qui menacent le monde ! Et
ce Benjamin Castaldi, il se pose là ! Honnêtement, je préférerais affronter dix fois Ernst Stavro Bloffeld et son S.P.E.C.T.R.E plutôt que Castaldi et son Secret Story ! Ses hommes et lui ont des
techniques pour vous liquéfier le cerveau particulièrement vicieuses et efficaces.
- Puisqu'on parle de méchants, que vous a-t-on réservé, cette fois ?
- Oh, encore un scientifique dont la méchanceté n'a d'égal le génie. Un docteur en chimie, qui veut transformer notre belle jeunesse anglaise en drogués dégénérés. Remarquez, quand je vois ces
hippies avachis par terre à Picadilly, quand j'entends ces barbares de Beatles, je me dis qu'il a bien des chances de réussir !
- Soyez prudent, James, ce savant fou m'a l'air redoutable.
- Oui, on peut dire que je ne suis pas épargné. Papa Ian avait le don de toujours me mettre dans des situations difficiles, mais ce nouveau successeur se débrouille bien aussi ! J'ai des bleus et
des éraflures partout. Enfin, je suppose que c'est le tribut à payer pour être une machine à fantasmes ! Quand je pense que je fais rêver la plupart des individus mâles de la planète !...
- Pas seulement mâles, James... En tout cas, moi, je prendrai "Le diable l'emporte" pour le lire sur la plage, quand j'irai à Hastings en août.
- Brave et fidèle Moneypenny ! Bon, je vais raccrocher, j'appelle en PCV et M va être furax ! En plus, une horde d'hommes de main se dirigent vers moi avec des intentions qui me paraissent
belliqueuses. Je vais essayer de me réfugier en page 262... A très bientôt, Moneypenny ! A mon retour, je vous emmène dîner : foie gras, huîtres et Pommery ! C'est une promesse ! Vite, je file,
ils arrivent !
- D'accord, James ! Faites bien attention ! James ?... James ?...
Tuuut... Tuuut... Tuuut...
Le diable l'emporte, par Sebastian Faulks.
344 pages. Editions J'ai Lu, 2008.