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Anthologie permanente : Pentti Holappa

Par Florence Trocmé

(…)
Je pianote sur l’ordinateur et j’imagine que je suis un chien perdu loin de sa niche,
Je plonge dans les vagues, je suis une baleine qu’un harpon a blessée,
bébé phoque et le coup de massue s’abat,
renard verrouillé dans une cage, raton laveur, vison.
On me nourrit, on m’écorchera.
La peau sera mise à sécher, tendue en croix.
Je précise, pour être clair, que je suis un animal cloué en croix. 
   A chaque instant, je sais que j’existe.
En moi je sens remuer de petites espérances et une grande peur.
   Dans nombre de langues, on appelle ça âme.
Elle est éternelle, si on y croit.
On peut l’offrir, et on peut la voler.
   C’est un objet d’imagination. Comme toi, et moi. La douleur aussi,
l’amour et la paix de l’âme.
Penser à l’existence, c’est déjà l’existence,
aussi ferme et inébranlable, aussi transparente, chaque jour différente.
Le bonheur est éphémère, mais il renaît sans cesse.
   On enterre les déceptions, et l’illusion repousse.
Elle fleurira demain.
Dans mon cœur, je fais pousser pour toi
des tulipes, des jacinthes, des flammes de bougie
pour toi, qui es un million.
Le cœur est un symbole, la fleur ne l’est pas, elle est faite de chair vivante.
Tu la touches et tu es réel. Tant d’existences qui sont les tiennes.
Les draps purs pour un soir de fête je les ai ouverts pour toi.
Il pleut des étoiles dans notre lit, cependant que nous sommeillons.
Pentti Holappa, extrait de « Poème de Noël 95 », N’aie pas peur, traduction du finnois par Gabriel Rebourcet, Atelier La Feugraie, 2001, p.73,

le premier sens

Tu es incroyablement proche encore un instant,
tu es une illusion, une voix, un parfum presque.
Il manque seulement le toucher, le plus primitif de tous les sens,
mais celui précisément dont usa Dieu pour façonner l’argile,
par qui le ver sait qu’il existe, celui qui porte la douleur
quand on torture ou quand on aime, par qui tu me manques
fuyant loin de mon être, la ligne tendre de ton aine,
et ta main rugueuse.
(Écrit après une conversation téléphonique)
Pentti Holappa, extrait de « Poème de Noël 95 », N’aie pas peur, traduction du finnois par Gabriel Rebourcet, Atelier La Feugraie, 2001, p.43

Contribution d’Ariane Dreyfus


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