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Double affiche prestigieuse au Miles Davis Hall hier soir – mercredi 15 juillet – avec Scott Matthew et Antony and the Johnsons. L’une des soirées les plus attendues de cette édition 2009 n’a pas déçu, hormis un confort relatif pour le nombreux public.
Et, franchement, il ne fallait pas arriver trop en retard sous peine d’assister au concert dans des conditions indignes d’un festival du rang de Montreux: entre le bar, les caméra, les barrières, la mauvaise “isolation” des murs donnant sur les terrasses et j’en passe. On ne pouvait que regretter la disparition du festival de la salle du Casino qui aurait été de bon usage. Et au prix d’un billet montreusien, on aurait pu s’attendre à un meilleur aménagement. Bref, dans le “sauna milesien” bondé pour l’occasion, la figure de proue d’une pop bien pensante se produisait: Antony Hegarty, ou Antony and the Johnsons pour faire honneur à ses musiciens.
Toutefois, avant l’oiseau britannique se dévoilait une star naissante: Scott Matthew. Auteur d’un album passé inaperçu en 2007, Scotty l’Australien a livré cette année un album aussi éblouissant que son titre long : THERE IS AN OCEAN THAT DIVIDES AND WITH MY LONGING I CAN CHARGE IT WITH A VOLTAGE THAT’S SO VIOLENT TO CROSS IT COULD MEAN DEATH. Cabossé de la vie – il joue du ukulélé par nécessité, ne pouvant plus se servir suffisamment d’une main accidentée pour une guitare notamment – Matthew est plus qu’un faire valoir. Plus guilleret qu’Hegarty entre ballades à chialer dans son verre et morceaux d’une folle sagesse, il livre tout de même un concert annonciateur d’une carrière singulière. Cet artiste reviendra sûrement dans quelques années triompher comme l’a fait Antony Hegarty hier…
Les compositions de Scott Matthew ont cette évidence d’un talent génial, son chant est sur le fil, les arrangements restent quant à eux discrets. Un futur grand.
30 minutes plus tard, c’est un personnage vraiment étrange qui se présente sur scène. Un androgyne avec un visage d’enfant, gros et maniéré. Un peu comme une poupée avec des longs cheveux laineux. Ce concert ne prenait pas forcément plus aux tripes qu’un autre, moins grandiloquent, où Antony aurait joué du piano. Toutefois celui qui n’aurait pas remarqué la chance qui nous a été offerte ici d’écouter un artiste tel qu’Antony Hegarty accompagné par l’Orchestre de Montreux serait bien sot.
Qui dit concert qui ne prend pas forcément plus aux tripes qu’un autre ne prononce pas forcément «ennuyeux», loin s’en faut. Tant le chanteur a donné de lui-même et s’est ouvert au public de par ses envolées lyriques qu’on lui connait mais aussi de par sa gestuelle, tant les Johnsons (des musiciens classiques parmi lesquelles Rob Moose, qui a endossé le rôle de chef d’orchestre) et l’orchestre lui-même se sont surpassés en jouant avec les pauses, le silence, le volume, la précision, bref, la maîtrise de chacun était époustouflante. Comme l’a souligné le chanteur, il semble que tout ce beau monde ait déjà joué ensemble dans une vie antérieure. Ceux d’entre-nous qui sont plus terre-à-terre reconnaissent ici un travail titanesque et acharné pour nous livrer pas loin de deux heures de mélodies légères ou graves, belles à pleurer, souvent compliquées et au final très uniques.
Nous n’avons malheureusement pas eu droit à “Hope There’s Someone”, mais tous les autres grands titres étaient au rendez-vous : “The Crying Light”, “Cripple & The Starfish” et, surtout, la reprise de “Crazy In Love” de Beyoncé. L’envie de shaker son booty se fait plus timide mais la curiosité n’en est que plus aiguisée. Juste avant le titre “I Fell In Love With A Dead Boy”, l’Anglais expatrié nous fait avaler un speech écolo d’au moins 5 minutes ennuyeux à mourir. Néanmoins il a le mérite d’être drôle çà et là.
Ce qui frappe surtout à l’issue du concert, encore une fois, c’est lorsqu’on se rend compte que l’on a vécu un moment unique issu d’une collaboration qui ne se refera probablement pas de sitôt.