De passage à Paris pour la sortie de leur nouvel album, The Warlocks patientent dans la chambre d'hotel avec leur concert du soir, forcément gazeux, à la Maroquinerie. Captain Mucha Dick les as (presque) tous rencontré.
Une serviette blanche autour des reins, Bobby sortit de la salle de bain pour répondre au téléphone.
- Bobby ? T'as bien dormi ?
- ...
- Voudrais-tu nous rejoindre devant la salle de concert pour la séance de photos de groupe ?
- ...
- Les interviews sont terminées, on pourrait tous ensemble aller manger ces kebabs que tu aimes tant, juste après. Ça te ferait plaisir ?
Bobby raccrocha, avala son verre de Smecta avec une dose de méthadone et retourna devant le miroir. Ses yeux se fixèrent sur les lettres vertes imprimées sur le bord de sa serviette. Hôtel Palma. Bobby se rappelait d'au moins cinq ou six autres Palma Hôtels depuis le début de cette tournée. A chaque fois, la même chose, pas de chasse d'eau mais un sanibroyeur, c'est pour ça qu'il s'en rappelait. Un putain de sanibroyeur pour ces kebabs qu'il aime tant.

- Salut. T'es le dernier de la journée... Je suis Bob (Mustachio, batteur)... Salut, Ryan (McBride, guitariste)... JC (Rees, guitariste)... Mimi Star (bassiste).
Salut. Enchanté. L'album Heavy Deavy Skull Lover était affreusement intense et sombre, ne vous a-t-il pas laissés épuisés ?
Oui, je crois. C'était un album expérimental, fait avec seulement quatre pistes. C'était un album bizarre à une période bizarre. L'été où nous l'avons enregistré à L.A., Griffith Park brûlait dans un incendie. Tout partait en cendres. C'est fatiguant en général, mais regarder une ville brûler c'est un peu étrange. Hollywood en feu...
Le dernier album The Mirror Explodes est beaucoup plus doux et froid...

Rod Cervera (Supersport 2000, The Rentals...) est le producteur de vos deux derniers disques. Comment est-ce que vous travaillez avec lui ?
C'est la personne rêvée avec qui travailler. Il est vraiment sympa, totalement compréhensif. C'est un grand musicien, très talentueux. Il est très patient avec nous. Nous sommes des amis depuis longtemps, alors il peut nous parler directement sans être offensant. Il comprend le groupe, nos personnalités et les sons que nous cherchons. Il sait à l'avance ce que nous attendons et ce qu'il a à faire avant qu'on ne lui demande.
Bobby compose tous les morceaux, comment vous investissez vous dans la mise en place des chansons... ?

C'est plutôt sur scène que vous prenez votre pied?
On est probablement meilleur en live. Ça se passe dans l'instant. Les poils de ma nuque ne se hérissent pas en studio. En fait ça dépend du soir, de l'ambiance... Le live est un vrai travail sur l'énergie, on te renvoie ce que tu donnes, et tu renvoies ce qu'on te donne. Tu peux vraiment créer une intense expérience de mouvement. En plus sur scène, si tu te plantes, tu dois te démerder, tu peux pas t'arrêter pour recommencer. Tu te démerdes. Mais de toute façon le live et le studio n'ont rien à voir. Par exemple, Sonic Youth, je les ai vus, sur une longue période, au moins quinze fois. Après plusieurs de leurs concerts, je suis rentré chez moi trop dégoûté et déçu d'avoir perdu quinze dollars et trois heures de ma vie. Mais putain, les disques sont trop bons. Ils sont cinquante fois meilleurs que n'importe quel autre disque que j'ai pu écouter.
Dans la chanson du dernier album, There is a formula to your despair, le refrain dit « Everyone feels this way ». Est-ce que vous pensez que vos disques sont les reflets de notre époque moderne et de nos vies ?

Pouvez-vous décrire les liens musicaux que vous avez avec les Black Angels et le Brian Jonestown Massacre ?
... Ce sont vraiment deux sujets différents...On a rien à voir avec le BJM...honnêtement... (sic). MAIS les Black Angels... Ils étaient fans de nous avant de monter leur groupe et puis on a tourné avec eux, on se connaît super bien. Ils sont super. Comment c'est relié aux Warlocks ? On leur a botté le cul tous les soirs. Ils ont énormément appris de nous (LOL). On est allé chez eux à Austin plusieurs fois. Ils sont comme une famille, ils vivent tous ensemble dans une maison, ils jouent ensemble, ils travaillent ensemble... C'est un trip très incestueux. Je ne pourrais pas vivre avec ces mecs. Ils sont tous un background religieux, leurs pères étaient pasteurs dans des églises aux Texas... Et ça, ça fout les boules. Leur musique est vraiment effrayante, plus que la notre je crois. C'est comme regarder un film d'horreur, mais pas un truc de SF pourri, non un truc d'horreur pure. C'est de l'horreur à la Texane, comme le Texas Chainsaw Massacre. Pendant leurs concerts, tu sais que quelque chose de vraiment dangereux se passe ou pourrait bien arriver d'une seconde à l'autre. Ce sont des gens supers et hallucinants, on a beaucoup de respect pour eux.
Merci beaucoup. Est-ce qu'on peut faire quelques photos maintenant ?
Oui bien sûr. Il faudrait appeler Bobby.
Photos: Cyprien Lapalus