
Si on m’obligeait à un seul mot pour le décrire, ce serait « surprise » ; par le style, autant que par l’histoire, un, s’accordant tellement bien à l’autre.
Pour tout le respect réservé à la surprise du prochain lecteur, résumer l’histoire est un défi de discrétion. C’est une lecture qui va de découverte en découverte. Dès le départ, l’histoire ne nous projette pas en terrain connu, elle oblige à laisser ses points de repères, abandonner sa valise avant d’entrer chez des hôtes étranges, ça ne rassure pas vraiment. Et le séjour s’annonce inquiétant ; où caser dans sa tête que des enfants doivent s’occuper seuls de l’arrangement funéraire de leur père ? Quelle relation bizarre a cette famille ? Mais diable, quel genre de père avaient ces frères ? Mais où sont-ils ? Qui sont-ils ? Ou va-t-il chercher ce fameux cercueil ? Tout est mystérieux, nous allons de surprise en surprise, sans s’égarer. Cet univers s’étiquette mystérieux mais pas fantastique. Les émotions fortes se vivent sans émotion par les personnages, alors brrrr... dans le dos du lecteur ! Je suis une hyper sensible et pourtant, grâce à la magie du magicien auteur, je continuais mon voyage dans cet univers, abordant l’horreur la tête froide, le cœur tiède. Il faut le faire et l’écriture de Gaétan Soucy a cet effet sur moi.
J’adore les films ou les romans qui abordent l’influence du regard de l’autre posé sur soi ou sur une communauté. Le fossé creux entre le regard de l’extérieur et l’intériorité d’une personne, ses pensées intimes. C’est un des thèmes troublants de ce livre, l’apport du regard des autres dans la composition de son individualité.
Il y a une urgence dans l’écriture, une fébrilité, une répétition de certains mots qui m’agaçaient parfois, mais quand j’ai saisi qui tenait le grimoire et le stylo et dans quelles conditions, j’ai compris, accepté, tremblé.
L’histoire définie par thèmes pourrait se décliner par l’apprentissage, l’exemple, la lecture, la sauvagerie, l’hostilité, la pulsion sexuelle, le châtiment, les liens familiaux, l’étrangeté, le rêve. Est-ce un rêve, un cauchemar ? L’ambiance est onirique, mais on y croit dur comme fer. Et on ne se réveille jamais en sursaut, puisque c’est vrai !
Frisson et réflexion garanties.
Chez Passionnante littérature, Gaétan Soucy s'exprime sous et sur la couverture du roman.
La petite fille qui aimait trop les allumettes – Gaétan Soucy, Boréal compact, 180 p.