Magazine Culture

Frédéric Mitterrand, un ministre « godillot » ?

Publié le 27 juillet 2009 par Hajen

Frédéric Mitterrand, un ministre « godillot » ?

Quelle désillusion ! Il faut dire que beaucoup, et moi le premier, voyaient en la nomination de Frédéric Mitterrand un tournant et un nouvel espoir pour le monde de la Culture. Car, oui c’est indéniablement un homme de Culture qui a touché à peu près à tout ce qu’un citoyen normal associe à la Culture : écrivain, présentateur télé, producteur… Bref, il apparaissait indéniable que le bonhomme était d’une autre trempe que la catastrophique Christine Albanel, et pourtant…

En fait c’est le débat autour d’Hadopi 2 qui a semé le trouble et la confusion parmi les internautes, artistes et parlementaires qui voulaient « y croire ». Mais croire à quoi ? Croire que la Culture et la création seront remis sur le devant de la scène politique française, croire que la culture, au même titre que l’éducation, redeviendrait ce pilier fondateur de la République qui réunirait et élèverait les français vers plus de clairvoyance et d’égalité. Les déclarations selon lesquelles il ne voulait nullement de Frédéric Lefebvre comme secrétaire d’état chargé à la communication ou encore qu’il regrettait de ne pas être « assez téléchargé à son goût » parachevaient cet état de transition baigné de douce illusion « d’un moins pire qu’Albanel ». Mal en prit, le ministre a très rapidement montré les limites de sa marche de manœuvre en se ralliant à la pensée gouvernementale inculquée par le Président, véritable chef des armées institutionnelles chargées de remodeler la société française. Dans cette atmosphère où ne pas se plier à ce projet fait de vous un « réactionnaire conservateur » (dixit MAM), Mitterrand a sans doute choisit la voie de la sécurité en même temps que celle de la facilité. Mais dans ce choix il apporte son aide à la domination des majors sur la culture, et, indirectement, sur nous.

Il ne fait nul doute que Frédéric Mitterrand hérite malgré lui de cette vision d’une Culture au rabais dont le budget n’a cessé de diminuer depuis que la droite est au pouvoir pour redevenir un ministère de seconde zone bon à financer le concert de Johnny ou la répréssion des internautes, et pendant ce temps là la vraie création souffre. Des ministres qui confondent malgré eux les industries culturelles et les artistes, le porte monnaie des gros aux maigres recettes des petits. « La musique, c’est du bruit qui pense » comme disait Victor Hugo, aujourd’hui c’est plus du bruit qui abrutit les masses, un bruit dénaturé de sa mélodie et de ses sentiments qui, à défaut de peindre un monde plein de musicalité, retombe dans ce simple bruit, certes régulier, mais dépourvu d’une quelque compte volonté émotionnelle. Plus globalement, une Culture qui divertit les masses au lieu de les faire réfléchir et voyager dans des mondes oniriques aussi originaux les uns que les autres. Les vrais artistes ne sont certainement pas ceux vendant le plus de disques, bien au contraire.

Ce qui m’a particulièrement alarmé dans le comportement du Ministre c’est que ce dernier a défendu la loi dite Hadopi en faisant des déclarations grandiloquentes à vous faire pâlir. Des interventions vides de sens nous montrant un ministre ne maîtrisant pas le projet de loi mais le défendant comme  la prunelle de ses yeux. Le fait de comparer les pirates aux chauffards et de se ranger systématiquement derrière le piètre rapporteur Franck Riester nous montre de quoi le personnage est capable, ou justement de quoi il n’est pas capable. Le pire à mes yeux reste son oral d’entrée à l’Assemblée nationale, un oral où la verve particulière de l’homme donnait toute sa mesure au pathos et reléguait le logos au bas fond du caniveau. Ses allusions à Arletty, Edith Piaf et Serge Gainsbourg permettaient selon lui de rapprocher la Création et Hadopi : «  Ce texte parle des auteurs, alors je les cite« . C’est clair, ça pourrait presque passer aux yeux des français et internautes, mais cette phrase à fait jaillir en moi un élan de révolte : comment peut on citer des artistes n’étant plus de ce monde pour défendre un texte de loi ? Le tout dans une déclaration qui se révèle  grandiloquente et pathétique pour qui sait prendre la distance et le recul nécessaire. Le ministre ne se salit donc pas en citant ses grands noms de la Culture, mais l’effet inverse, c’est qu’il salit indéniablement ces artistes en les liant à une loi liberticide.

Nul doute qu’il n’a pas la hargne qui selon moi fait un bon ministre de la Culture, la volonté de changer le rapport à la Culture qu’ont les citoyens en favorisant la création.

« Le monde est iniquité ; si tu l’acceptes, tu es complice, si tu le changes, tu es bourreau. » Jean Paul Sartre

Article fait à l’arrache tard dans la nuit /-) (peu de liens…)

Crédit Photo : CC BY The Wandering Angel


Retour à La Une de Logo Paperblog