Je vous parle aujourd’hui d’un temps où les héros de polars n’étaient pas médecins légistes ou experts scientifiques. Un temps largement révolu où les bouts de ficelle et le flair permettaient à des flics ou des privés désabusés, cigarette au bec et fiole de whisky à portée de main, de traîner leur carcasse entre deux crimes. Parmi les plus célèbres de ces détectives, l’un s’appelait John Dalmas, mais c’est sous le nom de Marlowe, Philip Marlowe, qu’il deviendra célèbre. Son créateur, Chandler, Raymond Chandler, ne ressemblait que bien peu à ses héros. Tour à tour comptable, employé à l’Amirauté, Chandler commença sa carrière de maître du roman noir sur le tard, vers quarante-cinq ans. Son premier roman est publié en 1939, c’est le célèbre « Grand Sommeil ».
On célèbre cette année le cinquantième anniversaire de sa disparition, et les éditions Omnibus fêtent très dignement l’évènement en publiant en un seul volume ses nouvelles sous le titre « Les ennuis, c’est mon problème ». Cette somme de plus de 1200 pages est suivie d’un essai dans lequel Chandler, suprême hommage à Hammett, écrit : « il a restitué le meurtre à ceux qui le commettent pour de vrais raisons, non pour fournir un cadavre à l’auteur. »
C’est probablement là que réside le secret de fabrication de ce nouveau polar issu des pulp magazines qui, avec Chandler, Hammett et par la suite toute une lignée d'auteurs, va serrer le kiki au roman policier pour « inventer » le roman noir.
A propos de roman noir, à ceux qui ne sont pas des fidèles de cette littérature, je ne peux que recommander le formidable petit bouquin de Jean-Bernard Pouy, qui, en quelques 120 pages, bibliographie non comprise, règle le problème, comme avant lui Claude Mesplède l’avait fait dans son indépassable Dictionnaire des littératures policières…