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Trois chambres à Manhattan, Georges Simenon

Par Aucoindulivre

Dans le cadre de l’opération Babelio Masse Critique, ACDL avait choisi de faire un article sur Trois chambres à Manhattan de Georges Simenon.

Trois chambres à Manhattan, Georges Simenon

Plutôt connu pour ses romans policiers, Georges Simenon est un fantastique romancier possédant une œuvre colossale, qui  continue à être lu avec ferveur depuis sa mort en 1989. Trois chambres à Manhattan plonge le lecteur dans le New York des années 1950 et dans une atmosphère sombre, triste et de profonde solitude. François Combe, acteur oublié du public et de son ex-femme actrice elle aussi, rencontre Kay, femme d’une trentaine d’années qui n’a plus d’appartement et nulle part où aller. Chacun tente d’oublier sa solitude morne et tous deux se raccrochent l’un à l’autre dans un quotidien doux-amer. Doutes, rancœur, haine, passion, fusion sont les sentiments qui se succèdent au fil des pages, et l’on est en droit de se demander si cette histoire d’amour va bien finir …

La narration se situe du côté de François Combe, et l’on découvre des personnages perdus, sans fioritures. La position de Kay n’est pas des plus glorieuses : petits boulots, pas vraiment d’indépendance, à trente ans on n’attend plus rien d’elle, et on le fait remarquer à François : « Ta souris de trente-trois ans qui n’a pas de métier, pas de job, pas de compte en banque, elle est foutue tu comprends ? Je n’ai même pas besoin de te conduire au Waldorf pour t’en faire la démonstration. Nous sommes dans le bar des hommes. Mais passe à côté, franchis la porte, traverse le couloir et tu trouveras cinquante filles, toutes plus belles les unes que les autres, entre dix-huit et vingt ans, quelques unes vierges par surcroît, qui sont dans le même cas que ta rombière. »

Quant à François, il vit dans l’espoir de retrouver le devant de la scène depuis que sa femme, elle sous les projecteurs, l’a quitté pour un jeune acteur : «  Je jouais au théâtre de la Madeleine, à la Michodière, au Gymnase. J’ai fait des tournées dans toute l’Europe et en Amérique du Sud. J’ai été aussi la vedette d’un certain nombre de films. Il y a huit mois encore, on m’offrait un contrat important… […] Ce n’est pas ce que tu crois, se hâta-t-il de poursuivre. Je peux retourner là-bas quand je voudrai et y reprendre ma place… »

New York est une ville vivante, contraste avec leur solitude, qui les mène à différents endroits : une chambre d’hôtel au Lotus (la première chambre), bars, rues, cinémas, le studio de François (deuxième chambre) et celui de Kay (troisième chambre). Chacun a son emprunte dans tous ces lieux, et le temps d’une musique dans le jukebox ils  tentent d’oublier leur vie d’avant. Pourtant malgré tout cela, on sent que le narrateur ne veut pas se lâcher complètement et qu’il s’empêche de vivre pleinement une histoire sincère.

L’œuvre est tiré de sa rencontre avec une canadienne de 25 ans à New York quand il avait 42 ans. Tous deux devinrent amants dès leur première rencontre comme dans Trois chambres à Manhattan. George Simenon dresse des portraits psychologiques complexes de ses personnages avec seulement 188 pages et livre un roman parfaitement rôdé d’une écriture fluide et criante de vérité et d’humanité.

Car ces personnages ont avant tout un besoin  viscéral de vivre, et se raccrochent désespérément à ce qui leur reste.


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