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UN REPTILE PAR HABITANT
Toujours aussi enchantée par le style de cet auteur!
Ce n'est que mon deuxième roman de Théo Ananissoh après Lisahohé (en même temps il n'en a pas plus au compteur à ce jour), et je le confirme comme une de mes découvertes les plus intéressantes de cette année au rayon littérature africaine.
"Une écriture concise et calme" qui sert "un admirable suspense", je suis complètement en phase avec cette description très juste de l'éditeur.
Présentation de l'éditeur
"Narcisse n'aurait vraiment pas dû accourir chez Édith, après l'appel au secours de celle-ci. Il n'aurait pas vu alors sur le carreau du salon le corps de Katouka, et compris qu'il avait partagé la maîtresse d'un homme qui était comme le vice-président du pays. Et, bien sûr, il ne se serait pas trouvé ainsi pris dans l'engrenage d'une disparition forcément suspecte et même menaçante...
Un lieu où il est bien difficile de distinguer le crime de son contraire. La violence comme moyen politique ou moral. Une écriture concise et calme. Un admirable suspense serti d'érotisme."
Théo Ananissoh est un auteur à univers. Un peu comme avec Haruki Murakami, on est immédiatement happé, enveloppé dans son monde, sur un terrain à la fois intrigant et familier que j'ai retrouvé avec plaisir, à la frontière entre l'absurde et une réalité tangible qui se développe suivant une logique déconcertante.
C'est un vrai roman d'ambiance où l'intrigue en elle-même devient secondaire, bien qu'elle serve à décrire mine de rien un système en crise commun à bien des pays d'Afrique.
Il y a un meurtre, un homme impliqué malgré lui dans cette affaire, et nous avec. Ses questions et ses peurs deviennent les nôtres, étrangement, alors que de la même façon qu'il pourrait ignorer cette situation qui finalement ne le concerne pas et qu'il n'y parvient pas, on pourrait se distancier de cette intrigue et on a bien du mal.
Pour ma part, j'ai bu chaque phrase comme du petit lait, comme si j'étais concernée de près, voulant comprendre moi aussi ce qui s'était passé et ce qui se tramait tout le long de l'histoire.
Un extrait tiré de la 4è de couv' pour un avant-goût de ce récit:
"– Que faire alors?
– Raisonner dans les termes qu'impose la situation : faire semblant, et l'enterrer.
– Pardon?
– Quelqu'un fait semblant de mourir; vous faites semblant de l'enterrer."
Narcisse tourna la tête vers le corps de Katouka. Le sous-préfet écrasa un sourire.
– Aucune crainte, il est bien mort. Je voulais dire que nous devons jouer le même jeu que son meurtrier : faire disparaître le corps et la voiture avant demain matin."
La fin, un peu abrupte, m'a quelque peu destabilisée, mais je reste sur une très bonne impression de l'ensemble du récit qui se lit d'une traite et avec plaisir.
L'auteur
Théo Ananissoh est congolais. Il est né en 1962. Il vit en Allemagne. Un reptile par habitant est son deuxième roman.