ACDL fait sa rentrée et souhaite mettre en avant chaque semaine un ou plusieurs ouvrages qui paraîtront ou qui sont parus dans le cadre de la rentrée littéraire.
Aujourd’hui ACDL vous présente deux avis sur l’oeuvre La double vie d’Anna Song de Minh Tran Huy, publié aux éditions Actes Sud.
Avis 1:
Publié par Actes Sud, le nouveau roman de Minh Tran Huy nous mène sur les traces d’Anna Song. Pianiste talentueuse inconnue du grand public, elle meurt des suites d’un cancer et laisse derrière elle une œuvre monumentale de plus de 102 CD. Son mari et producteur Paul Desroches se retrouve seul face à l’absence de sa femme.
Entre souvenirs et réflexions, le narrateur, nous fait peu à peu découvrir le monde de la musique et celui de la pianiste, de son enfance à sa mort. Il nous livre le portrait tragique d’une artiste qui doit faire face à des épreuves : lorsqu’elle joue, son annuaire et son auriculaire se paralysent, Anna doit faire face à sa plus grande peur de ne plus pouvoir jouer.A ses cotés, son mari va tout faire pour l’aider, la soutenir.
Ponctué d’articles louant la pianiste et lui rendant hommage, le récit laisse place à une question primordiale, celle de l’authenticité de son Œuvre. Ses Cd seraient des enregistrements trafiqués de grands concerts. Anna est-elle complice de cette escroquerie ? Quelle est l’implication de Paul dans ce scandale ?
Inspiré par l’affaire Joyce Hatto, à travers une écriture fluide et poétique, ce roman plonge le lecteur dans un monde d’amour démesuré et le met face à la détresse de l’oubli.
Lucie Pouget
Avis 2:
« Anna Song est la plus grande pianiste vivante dont personne n’a jamais entendu parler. » Ce nom vous dit pourtant bien quelque chose ? Il sonne comme quelque chose que l’on a été fatigué d’entendre pendant une période et puis qui s’est lentement tu. Oui, c’était cette pianiste très douée, une enfant prodige qui a grandi derrière son piano, bercée par les notes, les gammes et le noir et blanc des touches.
Au sein de cette belle mélodie du début qui nous avait pourtant promis un magnifique concert, quelques couacs apparaissent. Minh Tran Huy écrit une musique se faisant de plus en plus amère. Malgré les noms de tous les grands compositeurs et interprètes rythmant la lecture, malgré le regard bienveillant du narrateur, le piano se désaccorde lentement. La double vie d’Anna est une affaire de rêve brisé, d’accident du destin, d’injustice musicale ? Peu importe. Ce qui compte c’est qu’il en restera, c’est la musique. L’auteur a d’ailleurs réussi à rendre cette musique dans chaque page, les lignes se transforment en portée. On ne sait pas jouer du piano, on ne connait pas ces grands noms qui se succèdent mais on aime comme ils sonnent. Derrière cette musique il y a aussi un album de famille, le paysage du Viet Nam qui se dessine, s’entremêle avec les notes et forme la double vie d’Anna.
L’auteur a construit cette histoire en y mêlant articles de journaux et souvenirs du narrateur. Cela rend le livre plus actuel et réel qu’il ne l’est vraiment : le lecteur se prend au jeu et hésite entre fiction et témoignage historique. Une réserve cependant concernant la fin un peu décevante, alors que l’intrigue et le doute instaurés tout au long du récit étaient bien menés, on ne peut s’empêcher de trouver le dénouement… facile.
John Smith