PARIS - (AFP) La France fait des efforts pour reverdir sa fiscalité mais elle peut mieux faire, estiment les experts.
Au 1er janvier 2010, une taxe carbone sera mise en place afin d'inciter les consommateurs à réduire peu à peu leur consommation de pétrole, de gaz et de charbon.
Cette taxe, qui concernera uniquement les énergies fossiles, sera fixée "au départ" sur la base de 17 euros la tonne de CO2.
Les experts réunis sous la houlette de l'ancien Premier ministre socialiste, Michel Rocard, avaient recommandé de démarrer à 32 euros pour atteindre 100 euros en 2030.
En Suède, pays modèle, la taxe carbone, lancée il y a 18 ans à 27 euros la tonne, a progressé régulièrement pour atteindre aujourd'hui 108 euros.
La taxe carbone à la française est également appelée à progresser, mais le tempo n'a pas été précisé.
Compte tenu du contexte politique et économique "c'est bien", mais la France "peut mieux faire", commente Jean-Marc Jancovici, expert énergie/climat.
Il se déclare partisan d'un alourdissement de la fiscalité sur les carburants afin "de faire comprendre aux gens le plus rapidement possible qu'on va devoir fonctionner avec une énergie de plus en plus chère", allusion à la fin du pétrole.
De son côté, le bonus-malus automobile, mesure emblématique de la volonté du gouvernement de verdir la fiscalité, devrait se réduire progressivement, selon des informations de presse.
A Bercy, on souligne que les arbitrages "restent à effectuer" sur le sujet.
Ce dispositif, qui vise à réorienter la consommation et la production vers des véhicules moins polluants, a été instauré au 1er janvier 2008, dans la foulée du Grenelle de l'environnement.
Le gouvernement avait promis à l'époque que le bonus-malus serait rapidement étendu à d'autres familles de produits, mais rien n'a encore été annoncé.
La fiscalité écologique en France est aujourd'hui "loin d'être exemplaire en Europe", souligne l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
"Elle ne représentait que 2,3% du PIB en 2006 (21ème rang sur 27) alors que certains pays européens sont déjà parvenus, grâce notamment à une taxation plus lourde des énergies fossiles, à des niveaux sensiblement plus élevé: 6% du PIB au Danemark, 4,1% aux Pays-Bas, et 2,7% en moyenne dans l'Union européenne", précise l'OFCE dans sa lettre de juillet.
Pourtant, la France avait fait figure de pays pionnier en instituant dès 1964 les redevances sur l'eau, puis en 1985 une taxe sur la pollution atmosphérique, rappelle l'OFCE.
La fiscalité environnementale a été "pour l'instant décevante et a amené des effets pervers", estime Arnaud Gossement, porte-parole de France nature environnement (FNE).
"On a tendance à créer des droits à polluer", explique-t-il, pointant le cas de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) qui visait à encourager le recyclage et la revalorisation des déchets ménagers mais dont "le taux est tellement bas qu'on a eu l'effet inverse".
Les avancées ont été plutôt d'ordre culturel, ajoute-t-il: "on accepte désormais de parler de fiscalité verte sans la considérer comme l'ennemi de la croissance".
A Bercy, on assure être "favorable à cette idée de fiscalité verte" malgré son coût pour l'Etat.
"Le fait pour les pouvoirs publics de se servir de la fiscalité pour provoquer des changements de comportement est suffisamment nouveau pour qu'on ne le mélange pas avec l'usage habituel de l'impôt qui est d'alimenter les caisses publiques", a souligné mercredi Michel Rocard lors d'une audition à l'Assemblée nationale.
(©AFP / 24 septembre 2009 07h45)