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Il était une fois des géants...

Publié le 05 octobre 2009 par Steffi
Il était une fois des géants...
Elle a ouvert la bouche. un peu comme ça, doucement, une fois, deux fois, elle a cligné des yeux. Elle était en retard un peu, elle a entendu les cris des enfants impatients, il pleuvait elle s'est douchée quand même, un geste de bras dans les cheveux, elle s'est faite belle, les chaussures, la robe, "Monsieur Fabien, préparez les toiles de jute", levez pied gauche, elle avait une robe verte, un peu printanière pour l'automne berlinois, elle a jeté un oeil au balcon où des hommes en costume jouaient les privilégiés, pivotement, elle nous regarde, elle est belle, mouvements de bras, et puis voilà jaune le ciré, le chapeau, treuillée sur un bateau, tour de mairie pour la galerie, on recommence à pied on danse un peu au coin derrière, on redescend du bateau, on marche un peu, on va vite, 2km heure, on la suit avec peine, en courant, pas de géants, jupe verte qui recouvre le capot rouge, le geyser jaillit toujours sur Unter der Linden, qui la suit? pas moi, trop froid, retrouvailles devant le mur de Berlin qu'elle sillonne du côté Est toujours, Checkpoint Charlie est derrière nous, le ciel lourd, gris, elle vogue vers Potdsamer Platz, mousse sur le pont, les moussaillons astiquent, dansent, forêts d'appareils photos, objectifs à la place des yeux, enfants sur les épaules, comment voir sinon, je cours encore à côté du bateau qui l'embarque, je la laisse au mémorial de l'holocauste, rejoindre le grand, l'oncle, le scaphandrier, l'homme, l'ouest, entre les balancelles de la roue, apercevoir un casque, il s'arrête, au milieu des petits hommes rouges esclaves de la machine, "descendez les écureuils", dévisser les boulons, enlever le casque, asseoir la carcasse pour une sieste sur disque sillon géant, bruits des vagues jusqu'au soir, faut bien siester quand même, elle aussi dort sur Unter der Linden, foule des grands jours, trop, trop, où est-elle, seuls les enfants l'aperçoivent là-bas toujours au même endroit, on l'attend encore une heure, "elle bouge la tête" lance l'enfant, levée d'appareils photos au-dessus des têtes, pour voir là-haut, enfin elle passe trop vite, le pas se hâte d'avoir trop attendu, on s'engouffre dans son sillon, un camion de flics s'interpose entre nous et elle, elle, elle là-bas vers la porte de brandebourg, acrobaties, roublardises, doublage de barrière de militaires, de l'autre côté on respire à nouveau, Pariser Platz, elle se lève, elle attend, regarde là-bas à l'ouest l'autre qui arrive, il l'attend, elle s'élance, passe dessous à l'ouest, du côté de la scène Coca Cola et des speakers, à l'Est frustration, on ne passera pas, interdiction à la foule de franchir le mur, voilà le symbole, coincé là, à entendre, sans voir, la musique de Michael Jackson, la marche arrière du géant, moon walk murmure la foule aveugle, la musiuqe, elle flotte là-bas de l'autre côté, danse?, puis rien, rien, rien, passera? dormira là?, j'entends qu'on est prêt à dormir là s'il le faut, et puis, et puis, les grues sont bien là pour quelque chose, au diable l'hystérie sécuritaire et les peurs faussement terroristes, elle s'accroche, il la lève, au-dessus de tout, de nous, du mur des chevaux, de l'ambassade américaine, des menaces d'attentat et des cordons de militaires, elle flotte là-haut, drapeau rouge, trois hommes microscopiques flottent avec elle, la porte de brandebourg en serait presque belle, la voilà ici maintenant, l'autre passe dessous, s'asseoit, la reçoit à genoux, silence dans la foule, seuls les écrans LCD parlent, dormir, bruit des vagues, même foule le lendemain de l'autre côté, même retard, une heure sans rien, scène coca-cola pour meubler, journée du don d'organes pour combler, "c'est une production française c'est normal", retard encore, la bouche bouge mais rien d'autre, dans son ciré jaune elle dort toujours, lui au loin cerné de foule et de panneaux publicitaires, gong, pluie de lettres, mots confisqués, elle clignote, ouvre, s'en va, nous plante là immobiles, pris dans le tourbillon d'une foule indécise, fini?, Ah non, pas finir comme ça... raccourci par le Reichstag, bruits de canon, pluie de lettres et confettis, rires, sourires, rien n'est grave, ni la foule, ni le vent, ni le froid, soleil sur la chancellerie, elle joyeuse, avance vite, lui grave, mélancolique la suit, efforts surhumains pour soulever chaque pied, chaque pas, trente hommes pour faire avancer la machine merveilleuse, soulevée dans les airs, reposée, la crieuse contrôle, le chef à lunettes discute avec les uniformes, le scaphandrier frôle les immeubles, le ciel et les nuages, elle volette, cligne, cils à rallonge, pieds jolis, elle robe verte, lui encasqué, course vers la Spree, elle arrive en premier, se plante devant la foule, belle, lui monte plus haut, se pose doucement, l'attend, elle, dernière danse dans le ciel, dernière envolée, assise, sans fils, sans rien, sans hommes, deux corps sans mouvements, deux yeux qui voient l'adieu des Berlinois, deux carcasses glissant vers l'est, deux géants fatigués, cinquante mini-hommes restant à quai, cinquante hommes en rouge alignés, saluant, salués. Libérés, abandonnés.

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