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POLANSKI ::: Tous les chemins mènent à Rom(an)

Publié le 11 octobre 2009 par Gonzai

Plus de 500000 entrées quand on googlise Polanski + Suisse. Depuis 15 jours, la polémique enfle de toute part. Pas un jour sans un « rebondissement ». De son arrestation à Zurich, aux révélations d'un accord financier passé avec la victime (dont personne ne peut affirmer le règlement, ce qui rend caduque l'utilisation de cette source), le feuilleton Polanski fait vendre.

POLANSKI ::: Tous les chemins mènent à Rom(an)
Tout le monde se pense autorisé à discuter du cas judiciaire. Pour le « bien » de l'information, on nous abreuve de détails scabreux (dernier en date, il aurait sodomisé la jeune fille de 13 ans, ce qui en soi ne change pas grand-chose sur les coulisses de l'affaire). Les médias, sous couvert de vulgarisation d'un cas complexe sous juridiction américaine (est-il à rappeler que le droit Californien et le Français ne se ressemblent pas) commettent des raccourcis douteux. Les relations sexuelles avec mineur se transforment en viol. On en vient même à évoquer aujourd'hui la pédophilie.

La télé, sniffant l'aubaine d'audience, prépare des émissions sur les détraqués sexuels. Dans « Mots Croisés » ce lundi, Marine Le Pen, toujours prête à se souiller les mains pour gratter quelques voix, en a profité pour balancer des extraits choisis de La Mauvaise Vie de Frédéric Mitterrand, fait l'amalgame entre homosexualité, prostitution, pédophilie et l'on reparle alors de...Polanski, soutenu lors de son arrestation par ce même ministre (je cherche encore le lien car, à ma connaissance, Polanski est hétéro, et selon toute vraisemblance il n'est pas accusé de côtoyer des prostituées). Idem lors de « 7 à voir », où ça discute de viol, de récidive, de castration chimique et de ...Polanski, encore lui !

La presse musicale embraye, elle sur la sortie décalée de l'album d'Emmanuelle Seigner, à cause, paraît-il, d'un duo assez cul, ce qui lui permet de rebondir sur...Son Polanski de mari. Même l'Assemblée Nationale pense à se doter d'une loi d'imprescriptibilité concernant les violences sexuelles (loi en vigueur en Californie, ce qui explique pourquoi le ramdam Polanski dure depuis plus de trente ans).

POLANSKI ::: Tous les chemins mènent à Rom(an)
On peut alors s'attendre à ce que tout média participe à la curée. A quand un télé-achat, avec en présentation un beau couteau, copie de celui utilisé par Charles Manson, lorsqu'il éventra Sharon Tate, la femme de...Polanski. Ou peut-être une émission de Delarue sur la victime qui devient bourreau, du genre un enfant battu devient une personne violente, un enfant du ghetto de Cracovie un violeur. Ou une émission sur la santé où il serait question des dangers de la sodomie, exemple à l'appui avec...the King of media...Polanski.

En revanche, alors qu'on parle d'un réalisateur, pas un film n'est diffusé. Depuis 1977, à part réaliser des films (huit long-métrages au compteur), le franco-polonais n'a pas vraiment défrayé les chroniques judicaires (ni même mondaines). Les signataires de l'appel à sa libération (ça fait ricaner quand même de voir que certains de ceux qui ont apposé leur signature au bas de cette pétition ont aussi signé en faveur de l'adoption d'Hadopi, comme quoi, pirater un disque ça vaut de la taule, mais quand une fille est abusée par un réalisateur, la clémence serait de mise), ces signataires donc, feraient mieux de militer pour la diffusion de ses films. Quitte à juger de quelque chose, autant que ce soit de l'artiste et non de l'homme.

Polanski a couchaillé avec une mineure (il a reconnu les faits en 1977), ce n'est guère glorieux quand on a quarante ans. Il a profité d'une autorisation légale de quitter le territoire américain pour ne jamais y remettre les pieds, c'est pleutre, sans doute, mais facile de jeter la pierre quand on est vautré devant son poste à grignoter des Pringles. Le problème est que l'on assiste au glissement d'une affaire de justice vers un grand raout moral. Cette hystérie médiatique est obscène et contamine toutes les strates d'informations (presse politique, féminine, musicale, people...), aussi obscène que le montage en épingle d'un pauvre fait divers (le coupable est célèbre, mais les actes ne mériteraient pas plus qu'un entrefilet journalistique).

À force de confondre œuvre et artiste, morale et éthique, la démagogie prend lieu et place de la démocratie. On a les médias que l'on mérite, et si le comportement de Polanski est illégal, c'est à un juge d'en décider et sûrement pas aux téléspectateurs de cette mise en scène grotesque.


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