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Projections (21) Texte en plusieurs parties publié par Arthur Vertrou

Publié le 12 octobre 2009 par Yiannis



Milena, pourquoi reviens-tu ?

Pourquoi reviens-tu toujours au dernier moment, quand tout semble fini ?

Regarde ce que tu fais…

Regarde, le voilà qui court après toi et t’appelle !

Bien sûr, en se défendant de tenir à toi.

Ecoute…

Il ne sait pas mentir. Quand il t’insulte… Quand il me dit que mille femmes, autres que toi auraient pu lui faire tourner la tête, cela se sent bien qu’il n’en est pas franchement sûr.

Votre histoire en est là ! Il se trompe quand il rabâche qu’elle n’a pas d’importance.

Tu sais Milena, il m’a souvent semblé que dans les livres les femmes parlaient à peine tant les romanciers sont égoïstes.

Qu’en dis-tu ?

Elles flottent ente les lignes, inanimées, simples métaphores du souffle salvateur de l’amour ou passerelles inéluctables à franchir vers la création.

Elles vivent mais on ne les saisit pas. L’autre s’en tient souvent aux seules émotions du héros masculin, mais on ne sait rien d’elles, des femmes.

Ne me reproche rien !

Tu vis encore, tu n’es pas figée ni soumise au temps, tu respires, tu te rebelles et tu avances, là bas, à Paris.

Déjà tu te défends de ressembler à celle que j’ai décrite, ne te vexe pas.

Tu as raison de renier les précédents paragraphes.

Tu veux que je m’explique ?

Tu m’accuses de ne pas avoir dit toute la vérité sur toi.

Que voudrais-tu que je rajoute ?

Tu ne sais pas.

Qu’as-tu ressenti pour lui ?

Tu ne sais pas.

Tu ne sais rien et tu reviens, plus fuyante qu’avant !

Tu sais, je crois qu’il va mieux maintenant.

Ce n’est pas facile…

Tu raisonnes, encore… pour livrer à l’esprit des arguments satisfaisants… Pour lui démontrer raisonnablement que de toute manière ça n’aurait pas pu marcher…

Tu as tes petits rituels.

Tu as changé de coiffure, tu as tué les amis qui étaient proches de lui, et tu crois encore qu’il te suffit d’effacer son numéro de téléphone pour ne pas l’appeler...

Tu ne veux plus le revoir dis-tu, prétextant que tu n’es pas prête, pas assez forte, et pas encore totalement satisfaite de ta situation.

Tu ne veux plus le revoir car tu as peur de lui !

De ce que tu pourrais ressentir ?

Tu crois naïvement que le temps fera sa besogne comme dans la chanson de Ferré.

Mais crois-tu vraiment, qu’un jour tu le croiseras dans la rue et que rien ne pèsera sur tes frêles épaules ?

Qu’en souriant, tu lui glisseras un

_ Salut.

Et puis quoi ?

Vous irez vous asseoir à une terrasse de café…

Lui, ce n’est pas ce qu’il veut !

Il veut te revoir et se sentir faible…

Mesurer l’effet de ta présence… Explorer ses limites…

Il sait que te revoir lui fera du mal, la première fois mais il se dit qu’ensuite…

Je suis d’accord.

Jamais on ne revoit les gens sans que cela nous touche, jamais Milena, malgré que tu sois la plus heureuse du monde, tu n’éprouveras d’indifférence à son égard.

Revoir un être aimé c’est comme monter sur scène. Accepter de jouer un rôle, se maquiller, mentir, faire semblant, applaudir et disparaître quand tombe le rideau des existences, pour ensuite, pleurer, crier, regretter, se démolir une fois de plus.

Sans cela, sans l’acceptation de cet instant, l’oubli est impossible, l’imagination nous harcèle, tissant la vie de l’autre au fuseau d’un fil d’or agrémenté de voyages oniriques et d’amours à la sensualité fantasmatique.

Que te dire de plus ?

Sinon que ce serait si simple Milena que tu t’en ailles !

Milena…

Pourquoi reviens-tu toujours au dernier moment, quand tout semble fini ?

Milena !

Toi, tu n’y es pour rien, au fond !

Tout ça… C’est que des souvenirs !


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