Le Petit Nicolas coule une enfance sereine dans un quartier bien calme entre son père obnubilé par sa probable promotion dans son travail et sa maman, d'une tendresse infinie pour son fils et son mari, bref, la famille heureuse dans tous les sens du terme. Nicolas fréquente l'école primaire du quartier où il retrouve ses fidèles copains qui font la joie des cours de récré et de la sortie des classes. Ils sont d'autant plus unis qu'ils ont un ennemi commun: Agnan, le premier de la classe qui lève toujours le doigt pour répondre aux questions de la maîtresse et cafter ses camarades. Tout va donc très bien jusqu'au jour où Nicolas croit entendre ses parents parler de l'arrivée prochaine d'un petit frère. Le ciel tombe sur la tête du pauvre enfant car il est persuadé que le bébé prendra toute la place et que ses parents l'abandonneront dans une forêt tel le petit Poucet. Les copains de Nicolas sont vite informés de cette infortune et vont tenter de faire preuve d'imagination pour essayer de le tirer d'affaire, sauf que la solution trouvée risque de coûter beaucoup de sous ! Là encore les enfants vont devoir se creuser les méninges et se montrer solidaires pour que ce pauvre Nicolas soit débarrassé du fardeau qui se profile.
Nous voici donc dans l'univers du début des années soixante au sein d'un couple de petits bourgeois à la vie tranquille. Le papa travaille dans les bureaux d'une société comme cadre moyen et à cette époque, ce n'est pas rien d'autant plus que la porte d'une promotion lui est entrouverte. Pour cela, il doit tout tenter pour convaincre son directeur d'éliminer le concurrent qui pourrait lui faire obstacle. Comme dans beaucoup de couples de cette période, le mari travaillant, la femme s'occupe du reste et tout doit être prêt lorsque Monsieur rentre au bercail. Pour en arriver là le papa de Nicolas peut se reposer sur son épouse, véritable fée du logis chargée de s'occuper des tâches ménagères et de l'éducation du fiston qui est prié de ne pas faire de bruit lorsque papa rentre fatigué de son travail et s'installe dans le fauteuil. Par contre les grandes décisions sont l'apanage de Monsieur, c'est lui le chef de famille, sauf que Monsieur déçoit madame car la promotion annoncée se fait attendre et de ce fait le standing du couple n'évolue pas assez vite! Nicolas, lui, est un enfant qui prend la vie du bon côté. Il supporte assez bien le rythme de vie de ses parents mais un peu moins bien les amies de sa mère. Par contre il déteste par dessus tout les bébés qui prennent la place de l'aîné dans le coeur des parents. Nicolas veut rester fils unique et n'acceptera donc jamais qu'un intrus vienne troubler sa condition. C'est à l'école que cet enfant passe ses meilleurs moments, entouré de ses fidèles copains. Cette école est une pépinière d'évènements souvent drolatiques. Il est vrai que Nicolas et ses amis ont tous une personnalité différente et bien trempée. Ils sont d'origine de familles riches ou modestes pourtant chacun tire profit de la personnalité des autres. Au milieu de cette ribambelle, l'institutrice fait de son mieux afin de faire partager le savoir à des élèves plus ou moins attentifs tout en étant secondée pour la discipline par "Le Bouillon", surveillant atypique et intransigeant. La solidarité des copains va être la bienvenue pour Nicolas, persuadé que sa maman est enceinte. Que vont faire de lui ses parents? Vont-ils s'en séparer? Vont-ils le perdre dans une forêt? Les mauvaises pensées grouillent dans la tête de Nicolas. Il n'a plus que ses copains en qui il puisse avoir confiance pour mener à bien un projet machiavélique: se débarrasser de ce maudit frangin. Il sera très difficile pour les parents de regagner la confiance et l'amour de Nicolas, surtout qu'à cette époque les enfants ne pouvaient écouter ces conversations que l'on qualifiait "de grandes personnes"'.
C'est justement au début de ces années soixante par l'intermédiaire du journal "Pilote" que je fis connaissance du "Le Petit Nicolas". Je fus immédiatement séduit par ses personnages de gamins chahuteurs et d'adultes souvent grands enfants que nous décrivaient René Goscinny par ses textes savoureux et son compère Jean-Jacques Sempé avec ses dessins savoureux. Réaliser un film faisant ressortir toute la verve de ces aventures était une mission périlleuse et pourtant, Laurent Tirard se sort très honorablement de sa tâche. Ce Petit Nicolas et ses copains manquent peut-être un peu de piquant voire d'insolence mais tout de même, la vie de famille comme la vie à l'école sont très bien senties. Mêmes si certains gags coulissent un peu moins bien que dans les textes de René Goscinny, d'autres ne manquent pas de piments et se conforment au texte de l'écrivain. Les quatre-vingt dix minutes passent donc à vive allure, alimentées par certaines scènes franchement hilarantes et efficaces interprétées par un groupe de comédiens qui semble franchement passer un très agréable moment dans leurs rôles. Valérie Lemercier et Kad Merad forment un couple épatant dans leur complicité en jouant exactement dans l'esprit. Maxime Godart est un "Petit Nicolas" très attachant même si son personnage paraît un peu trop policé. Ses camarades d'école sont plutôt bien campés et là je donnerais une mention spéciale au jeune Victor Carles dans le rôle de Clotaire, un dernier de la classe indétrônable. Qui pouvait être un meilleur surveillant que François-Xavier Demaison qui excelle dans ce personnage intransigeant, ne plaisantant pas avec le respect de l'école publique ? La douce et compréhensive institutrice incarnée par Sandrine Kiberlain est elle aussi en concordance avec le personnage imaginé par l'auteur au même titre que la "terrible" remplaçante interprétée par Anémone. Une nouvelle fois Laurent Tirard nous fait plaisir en ayant pris le risque de nous offrir un film qui ne ternit pas les souvenirs épatants de nos moments passés à lire avec avidité "Les aventures du Petit Nicolas".
Trois étoiles viendront récompenser la prise de risque et l'interprétation de ce film mais tout de même, ne manquez surtout pas de vous plonger dans ces livres composés de nouvelles irrésistibles de drôlerie dans le texte et l'image. Précipitez-vous donc dans toutes les bonnes librairies!