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Biographies d'artistes - Annie et Bernard Réval et Caroline Réali

Publié le 30 octobre 2009 par Stephanesagas

site_01Annie et Bernard Réval, et Caroline Réali leur fille sont trois artistes confirmés qui ont mis en œuvre leurs talents de journalisme, pour réaliser aujourd’hui quinze biographies de stars de la chanson ou du cinéma.

Pourquoi leurs biographies sont-elles criantes de vérité ?

Le travail rigoureux des Réval, qui nous offre la vie passionnante d’une star, s’est accompli sous

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un triple éclairage : une carrière terriblement bien exposée, la vision personnelle des amis et des professionnels, et le sens profond des évènements intimes.

Les livres des Réval ont donc pour force, la tonicité d’hommages fouillés et structurés, digne d’une enquête policière, qui nous offre à découvrir chaque personnalité dans un parcours passé au peigne fin et se lisant comme si c’était un ami.

Mais ils se lisent aussi comme des « romans psychologiques », approchant au plus juste l’intimité de l’artiste.

On en devient un peu artiste soi-même.

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Interview Annie et Bernard Réval en duo

réalisée par Stéphane Sagas

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Très souvent l'origine d'une belle réalisation vient d'un événement particulier qui fait boule de neige. A l'origine de votre magnifique collection qui compte quinze ouvrages c'est un sentiment fort pour Gilbert Bécaud qui vous a donné envie d'écrire sa biographie. Quel personnage était-il à vos yeux ?

B. Réval : « D’abord un personnage, puis un homme tout simplement. J’allais dire comme vous et moi… En réalité, Gilbert Bécaud est une exception, mais il faut l’avoir fréquenté pour l’apprécier à cette dimension. Bécaud était vraiment un homme à part dans tout le milieu du showbiz, même s’il en était l’une des figures les plus glorieuses pendant des décennies.

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Quel personnage était-il à mes yeux ? Franchement, à travers nos entretiens, nos confidences, j’ai pu découvrir un homme qui aimait bien dire ce qu’il pensait, sans fioriture. Si un sujet l’ennuyait, il vous le disait sans détour. Et si un autre lui plaisait, il aimerait bien y revenir et s’y attarder. La famille, la scène, l’Opéra d’Aran, la création française de Madame Roza avec Annie Cordy…, c’étaient les thèmes qu’il favorisait sans s’économiser, tout en enchaînant les cigarettes même quand il ne le fallait plus… »

Votre façon de travailler évolue-t-elle au fur et à mesure des interviews ?

A. Réval : « Oui, mais les interviews, finalement, c’est souvent le jeu de la vérité : au cours de nos livres, certains se donnent à fond, sans arrière pensée. Je pense à des personnalités diverses comme René Monory (alors président du Sénat, qui nous parlait de Gilbert Bécaud), Jacques Chirac (sensible aux chansons de Bécaud). Je revois également Georges

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Marchais, Claude Lelouch, Jack Lang, Hélène et Claude Nougaro, Gérard Davoust, etc. Il y aurait beaucoup à dire sur ces moments partagés. Je pense aussi à des rencontres hors normes avec Mick Lanaro, Paul Mauriat, Jean-Michel Boris... Ils sont nombreux, depuis plus de quinze ans, à s’être livrés plus que nous ne l’espérions. Nous avons toujours tenté de faire passer leur émotion au plus près de leur vérité, tout en estimant par la suite ce que nous pouvons dire (ou pas) dans un livre. »

Comment se passe la répartition des tâches entre vous ?

B. Réval : « Caroline Réali et moi faisons les enquêtes en partant sur des pistes vierges. Ce sont des contacts parfois hésitants au départ et qui s’approfondissent au fur et à mesure de nos entretiens, jusqu’au moment où la confiance est établie. Annie écrit, elle délaisse son PC pour noircir du papier avec son stylo. Elle dit que ce contact à l’ancienne lui donne l’inspiration. »

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Bernard, vous avez reçu de vos parents et grands-parents, la passion artistique, l'avez partagé avec votre épouse et ensemble, vous l'avez transmise à votre fille.

En quoi cette force artistique vous a-t-elle servi dans votre rapport avec chacun des artistes dont vous faites la biographie ?

B. Réval : « Aucun doute. La famille est notre moteur. Caroline a fait un essai réussi avec un premier livre consacré à Gérard Depardieu, puis elle a enchaîné avec l’équipe du Splendid, Michel Sardou, Charles Aznavour. Le 5 novembre, son « Dany Boon » sera en librairie.

Vous évoquez la « force artistique ». Je ne sais pas si l’on peut la qualifier ainsi, je vous rejoindrai plutôt sur le terrain de la passion, et j’y ajouterai (avec le temps) le savoir faire, le respect de nos interlocuteurs et celui de nos sujets. Nous détestons les hagiographies où tout est lisse, sans la moindre aspérité. A l’inverse, avec le recul, nous nous permettons des vérités qui ne

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sont pas toujours bonnes à dire, mais qui sont parfois tellement flagrantes ! Il faut parfois lire entre les lignes, c’est un jeu. Annie a cette facilité d’écriture depuis l’enfance : c’est un bonheur de découvrir la matière première que nous lui donnons, revue et corrigée avec sa patte, son style. »

Annie, vous êtes directrice de votre propre école de Music Hall, vous avez une licence de lettre, et vous êtes réalisatrice. Que vous apporte votre expérience artistique, dans le travail de vos biographies ?

A.Reval : « Là, vous revenez des années en arrière, au début des années quatre-vingt. Vous avez lu la biographie des biographes ( !). Chaque pierre s’ajoute à l’édifice. J’ai toujours la chance de vivre de mes passions. J’ai simplement entretenu ce plaisir et tente de le faire partager. »

La Saga artistique des Réval sur quatre générations apporte-t-elle une richesse particulière pour mieux comprendre certaines destinées artistiques ?

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B. Réval : « Mon père, Marcel Réval, a côtoyé bon nombre d’artistes que j’ai découverts lorsque j’étais gamin. Je ne vais pas vous parler d’Yvette Giraud, Lily Fayol, Réda Caire ou les Quatre Barbus… ! Vous vous demanderiez : « Bon sang, mais quel âge a-t-il ? ». En réalité, j’ai toujours vécu dans le milieu artistique, de l’autre côté du rideau. Annie est à mes côtés depuis des années, nous nous sommes connus lorsque nous étions enfants dans les coulisses des spectacles de mon père. Avec son frère, elle avait un numéro de duettiste à l’affiche dans les premières parties avant Jacques Brel, Leny Escudero, Jacques Dutronc, Hugues Aufray, Sacha Distel, Nino Ferrer, Les Parisiennes, etc. Puis mon père m’a transmis son agence artistique et j’ai repris le flambeau durant une quinzaine d’années à la tête de l’Office Méditerranéen du Spectacle, avec de nombreuses têtes d’affiches aussi diverses que Léon Zitrone, Patrick Sébastien, Michel Leeb, Danièle Gilbert, Jacques Martin, Daniel Guichard, Claude François, Sylvie Vartan, Dalida, sans oublier Bécaud évidemment... »

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Vous apparaissez très fidèle en amitié avec Gilbert Bécaud, à qui vous avez consacré deux ouvrages. Quels sont les aspects de cette forte personnalité que vous avez révélés dans le premier ouvrage, et que vouliez particulièrement faire connaître au grand public dans le second?

B. Réval : « Le premier livre était une évidence, sans doute avec quelques maladresses, mais il était spontané, un premier jet. Le deuxième a été souhaité par Gilbert. Notre “Bécaud, l’homme à la cravate à pois” n’était plus en librairie et cinq ans après, ça le titillait. Il voulait le remettre dans le circuit (“J’ai un plan, Bernard…” me disait-il). Nous lui avons proposé d’en écrire un nouveau, plus profond, plus développé, avec la participation d’Odette, sa sœur, et de Pierre Delanoë. Voilà deux fortes rencontres pour Annie et moi. Pierre, autour d’une bonne bouteille dans les salons au dernier étage de la Sacem, c’était quelque chose ! Quant à Odette, nous la gardons dans notre cœur bien à part parmi toutes les personnalités que nous avons eu la chance

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de connaître au fil de nos livres. Odette est une “ belle dame” comme on doit en rencontrer très peu dans une vie. Elle nous a donné des clés et révélé la personnalité de son frère, depuis l’enfance jusqu’à ses derniers jours, avec des confidences très intimes et très tendres. Nous avons été très touchés de la confiance qu’elle a placée en nous, nous expliquant tout pour que nous comprenions mieux certaines attitudes, certains moments plus ou moins douloureux dans la vie de son frère. Aujourd’hui, nous sommes sensibles aux reprises des chansons de Monsieur 100.000 volts par Olivier Sorel (Yves de Closets). C’est un bel hommage. »

Annie et Bernard, comment choisissez-vous l’artiste dont vous voulez réaliser la biographie ? Lequel des deux est le plus souvent bien inspiré ?

A. Réval : « Au départ, c’est l’envie d’écrire. Bécaud, Barbara, Aznavour, Nougaro étaient nos premiers livres, nos premières envies, nos passions. Par la suite,

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nous nous sommes intéressés à d’autres personnalités, avec des découvertes heureuses (particulièrement Florent Pagny). Kad Merad est une “commande”, une demande de Didier, notre éditeur, qui avait de très nombreux points communs avec lui. Il s’en explique d’ailleurs en avant-propos du livre actuellement en librairie. Cette nouvelle aventure humaine autour de Kad s’est avérée surprenante et les rencontres, toujours aussi passionnantes »

Comment se passe le premier travail, une fois l’artiste choisi ?

B. Réval : « Nous tenons notre sujet informé, et on file, tout droit devant, pendant des mois, alternant train et avion, entretiens, téléphone et internet… »

Comment est vécu le travail principal de réalisation de la biographie ?

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B. Réval : « Dans l’ensemble, il est bien vécu, même s’il déborde souvent sur notre vie de tous les jours, le matin très tôt jusqu’à tard dans la nuit. Il n’y a pas d’heures. Le travail principal, c’est à la fois les entretiens et l’écriture. Et chaque étape, chaque phase est un pas franchi dans l’énorme puzzle que nous essayons de reconstituer. »

Quel accueil vous réserve l’artiste ?

A. Réval : « C’est chaque fois différent. Bécaud nous a fait un chèque en blanc, nous signant la préface à Portofino avant même d’avoir lu le manuscrit. Il était très curieux, il voulait savoir ce que sa sœur, nous avait raconté. “Pas pour changer la moindre virgule, seulement pour voir”, nous avait-il précisé. La découverte, Gilbert aimait ça.

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Il était comme ça, naturel : il fonctionnait à l’instinct. Claude Nougaro et Hélène, sa femme, ont été proches pendant l’écriture du livre que nous construisions. Ils nous avaient donné des indications pour joindre des copains d’enfance. Sa famille avait participé, c’était une belle histoire. D’autres sont moins ouverts, mais nous laissent travailler en toute quiétude, sans la moindre ingérence (je pense notamment à Jean-Jacques Goldman qui nous l’a fait savoir avec naturel). Kad Merad, Dany Boon, ce sont aussi des épisodes intéressants dans notre vie de biographies. Nous avons découvert deux artistes, deux histoires différentes, très riches sur le plan humain. Nos deux livres sur Kad (“Je crois que je peux voler”) et Mister Boon (“fabuleux destin”) sortent presque au même moment en librairie, publiés par Volum Editions. »

Comment vous organisez-vous chacun avez vos métiers ?

B. Réval : « On se lève tôt et on se couche tard, ce n’est pas plus difficile que ça. A nous de nous organiser le mieux possible. »

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Combien de temps vous faut-il pour réaliser une biographie ?

B. Réval : « “Aznavour le roi de cœur” nous a demandé pratiquement cinq ans. Les deux Bécaud quatre ans en tout. Mais dans l’ensemble, un peu plus d’un an est nécessaire pour faire un travail sérieux, sans parler des lectures et des relectures sans fin où l’on n’arrête pas de revenir sur certains mots pour les rendre plus précis. C’est le passage obligé avant le “ bon à tirer”, puis il faut s’obliger à se dire que le travail est terminé, alors que nous aurions toujours quelque chose à ajouter ! »

Que ressentent les artistes sur leur vie et leur carrière, lorsque la biographie est terminée ?

A. Réval : « Il faut le leur demander… Nous ne pouvons répondre à leur place, mais nous avons de bons échos. »

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Interview Caroline Réali

(co-auteur, avec Annie Réval, de “Dany Boon, fabuleux destin” publié par Volum Editions)

réalisée par Stéphane Sagas

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Caroline Réali, pour votre première biographie, vous avez choisi celle de Gérard Depardieu. En choisissant ce géant du cinéma, que vouliez-vous vous prouvez à vous-même ?

C. Réali : « Je voyais toujours mes parents enthousiasmés par leur travail. Lorsqu’ils m’ont proposé de les aider, je me suis vite prise au jeu. Depardieu est le monument qui nous attirait le plus. C’était le premier livre sur le cinéma, et avec Annie, nous nous sommes lancées sur le pavé, bille en tête, avec le bonheur de rencontre un autre monde que celui de la chanson : les acteurs, les comédiens nous ont séduites. C’est

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encore autre chose que d’être sur le plateau de la Comédie Française tout illuminé en votre honneur ! »

Comment Gérard Depardieu a-t-il accueilli votre demande ?

C. Réali : « En restant muet et en publiant lui-même un livre un mois avant le nôtre. »

Comment avez-vous structuré votre travail ?

C. Réali : « Structuré ? Je ne sais pas. Nous enchaînons les interviews, puis tout ce travail devient écriture. On taille, on coupe, on rallonge, on revient, on rature. Et puis, par magie, tout prend forme, naturellement, au fil des heures, des semaines et des mois. »

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Quelle expérience vous apporte votre mère avec laquelle vous travaillez, et votre père pour les ouvrages qu’il a réalisés ?

C. Réali : « Ils m’ont apporté le goût de bien faire et “d’y aller”, même si parfois tout paraît difficile. Ils m’ont donné leur combativité. »

Quelle est votre patte propre ?

C. Réali : « Je crois que je sais écouter et comprendre ce qu’on souhaite me dire ! »

Comment ce sont passé la réalisation des Bronzés et de la biographie de Michel Sardou ?

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C. Réali : « Comme les autres livres, avec naturel et beaucoup de rires et d’émotion au détour de certains entretiens. »

Etait-ce un nouveau défi pour vous-même que de se lancer dans un nouvel ouvrage sur Charles Aznavour, après vos parents ?

C. Réali : « “Aznavour, passionnément” était un idée de mes parents qui avaient largement planché sur le sujet. Il faut dire que la carrière de Charles Aznavour est tellement riche et son actualité, toujours foisonnante. Pour un biographe, il y a beaucoup à dire et à écrire. »

Quel regard portez-vous sur les artistes entre le moment où vous avez choisi de faire leur biographie et une fois que le livre est terminé ?

C. Réali : « Répondre à une telle question demanderait du temps, mais pour résumer en une phrase… : je ne suis pas déçu. »

Quel regard portez-vous sur votre dernière biographie, celle de Dany Boon ?

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C. Réali : « D’abord la découverte d’un homme. Au grès de mes recherches, de nombreux témoignages inédits sont venus étayer notre travail, et les investigations se sont révélées passionnantes. Avant la publication, quelques proches ont pu lire le manuscrit. Certains, qui connaissent très bien Dany Boon, m’ont avoué avoir passé toute une nuit à dévorer ce “fabuleux destin” jusqu’à la dernière page, au petit matin. Un autre m’a soufflé que ce livre est unique et qu’il fera référence pour d’autres ouvrages à venir ( !). Alors, à quelques jours de sa sortie en librairie (NDLR : le 5 novembre), j’ai la sensation d’avoir participé à une aventure hors normes, celle d’un livre pas tout à fait comme les autres. Et je peux vous assurer que cette aventure a été passionnante.»

Voilà quelques liens pour retrouver les auteurs :

http://www.livres-artistes.fr

http://www.myspace.com/biographiesreval

Caroline Reali est également sur facebook

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