Voilà un film qui a beaucoup divisé lors de sa sortie, huitième films de Lee Myung-se, M (2007) est une œuvre multi-facette. Elle nous fait voyager d’un genre à l’autre entre le mélodrame, le fantastique ou bien encore le film à suspens.
Han Min-woo est un écrivain à succès qui souffre de la page blanche. Il ne parvient pas à commencer son nouveau roman qu’attend avec impatience son éditeur. Il se retrouve alors dans un bar où il fait la connaissance d’une jeune femme, Mimi. Des souvenirs lui reviennent alors en mémoire…
M dénote par une originalité peu commune. Si la réalisation est parfois brouillonne où se mêle un patchwork d’effets de style, elle n’en reste pas moins surprenante pour son côté expérimental. Pourtant, si ce côté différent dans la réalisation interpelle et étonne, elle n’évite malheureusement pas certaines longueurs qui viennent alourdir le récit. Le film lasse par moment bien qu’il nous invite à poursuivre et à l’accompagner sur un sujet touchant et plutôt bien exploité par le cinéaste. M relate le traumatisme de la perte d’un être cher qui hante le personnage principal, un écrivain à succès qui semble passer par différent stade : la folie, le rêve (cauchemar), la perte de mémoire ou bien encore les hallucinations.
L’écrivain vit dans un double univers où se mêlent vie réel et imaginaire. Cette immersion dans l’imaginaire débute à la date du décès de son premier amour, un dimanche 20 août. Dès lors l’homme perd tous repères, avec des perceptions faussées voir décuplées où il se projette dans des instants du passé mais aussi dans un présent (en parallèle). Des moments quelquefois irrésistibles que nous offre le cinéaste tels les scènes au bar Lupin tant sur un plan cinématographique qu’émotionnel. M crée alors une relation fantasmagorique avec cette image du passé qu’est Mimi, relation qui résonne au quotidien dans l’oreille de Han Min-woo et qui le perdra dans une certaine folie, un délire qui passe du rêve au cauchemar, et vice et versa.
M est une œuvre cinématographique audacieuse et complexe. Si le sujet semble banal dans le fond par l’éternel questionnement du deuil, le cinéaste prend le parti de la transparence, en retranscrivant visuellement le traumatisme, et de nous immerger ainsi dans l’univers psychique de cet écrivain. Une immersion complexe mais que l’auteur parvient à imposer par une mise en scène originale voire complètement étrange, à l’image de l’univers dans lequel évolue le personnage, et une sensibilité (décalée c’est certain) du sentiment amoureux et plus globalement de la relation amoureuse. Sensibilité qu’il impose au travers des pensées en voix off de l’irrésistible Mimi et de l’émotion tiraillé de Han Min-woo.
On pourrait reprocher à l’œuvre ces quelques longueurs et l’aspect parfois brouillon de sa réalisation, mais n’en déplaise à nombres de critiques, M vaut le détour, pour son audace et pour sa sensibilité. L’œuvre touche et perturbe, tout autant qu’elle étonne. Lee Myung-se ne fait ni dans la dentelle, ni dans le conventionnel. Ce qui est sur c’est qu’il signe ici une œuvre originale emprunte d’une certaine poésie.
Diana