Enfants du Tchad: l'Arche de Zoé est «à côté de la plaque»
Hier à l'aéroport de Vatry, les familles françaises attendaient l'arrivée des enfants en provenance du Tchad. (AFP)
Arnaud Vaulerin LIBERATION.FR : vendredi 26 octobre 2007
Des responsables humanitaires français critiquent le travail de l'ONG qui a tenté de faire rapatrier en France 103 enfants tchadiens et soudanais.
Etonnement et incompréhension. Le milieu associatif et humanitaire français en charge de l’adoption doute sérieusement des méthodes et du travail de l’Arche de Zoé, l’ONG qui a tenté de faire
rapatrier 103 enfants en provenance du Tchad et du Darfour.
Après les déclarations de Rama Yade, la secrétaire d’Etat aux droits de l’homme qui a critiqué un acte «illégal et irresponsable» c’est au tour de Médecins du monde (MDM) de pointer
les errements de l’Arche de Zoé.
«Globalement, ce sont des gens qui sont à côté de la plaque, estime Michel Brugière, directeur général de MDM qui demeure la plus importante œuvre d’adoption internationale en France
avec 300 à 400 enfants accueillis chaque année. On ne peut pas sortir des enfants d’un pays sans le consentement des parents. Il faut également les autorisations des autorités locales et
songer sérieusement à une prise en charge pour être soigné le cas échéant.»
Michel Brugière précise que MDM avait «vigoureusement» rappelé à l’ordre l’Arche de Noé il y a «quelques mois». L’ONG avait repris sur son site plusieurs logos d’organisations internationales, et notamment celle de Médecins du monde, sans en informer quiconque.
Marie-Claude Arnauld témoigne d’une autre pratique douteuse. «Au mois de mai, se souvient la vice-présidente de l’association Enfance et Familles d’adoption, qui conseille et aide en France 11.000 familles, l’Arche de Zoé a inondé nos forums de discussion pour faire passer leurs messages. Ils annonçaient qu’ils allaient faire venir 10.000 enfants, qu’ils étaient à la recherche de familles d’accueil. Nous avons dû faire intervenir nos modérateurs pour endiguer le flux.»
«C’est un procédé illégal, rappelle cette responsable d’EFA en charge des programme d’adoption qui s’interroge sur les moyens financiers de cette ONG. Il y a peut-être de bons sentiments dans cette affaire mais on n’adopte pas comme ça. Ces enfants doivent avoir des papiers d’état civil. L’ONG doit tenir compte des lois internationales pour l’adoption et l’accueil des personnes. Par ailleurs, je vous rappelle que les lois soudanaises ne prévoient pas l’adoption et au Tchad, cela se fait vraiment au cas par cas, entre 3 et 4 par an.»
MDM et EFA soulignent enfin que la notion de famille en Afrique est très élargie et la solidarité familiale réelle. Si le père et la mère sont morts ou disparus, un oncle, une tante, etc. peut prendre le relais.
Les uns et les autres rappellent enfin que l’adoption et l’accueil sont des processus longs et très encadrés. Loin de l’amateurisme et de la précipitation de l’affaire tchadienne.