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The Antlers "Hospice"

Publié le 14 novembre 2009 par Jb

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Note : 8,5/10

Meilleurs titres : Kettering/ Bear/ Two

Les chants les plus beaux sont-ils forcément les plus tristes ? Pas nécessairement, cela étant dit les groupes de rock exaltant la mélancolie produisent parfois de très jolies choses. C’est le cas avec The Antlers, un trio new-yorkais dont l’album Hospice (c’est déjà tout un programme ;-) devrait réjouir (ou plomber) les amateurs.

Tout dans cet album, de son titre à son livret en passant par ses lyrics et son orchestration, laisse poindre une tristesse et un climat dépressogène qui, heureusement, n’empêchent jamais l’auditeur d’apprécier la qualité de la musique et ne lui donnent jamais non plus l’envie de se tirer une balle (même si, on l’aura compris, absolument rien ne l’incitera non plus à sauter sur les tables en se disant qu’il est un winner).

C’est, au fond, dans les trois premiers titres de Hospice que l’essence du disque est contenue : "Prologue", instrumental, est glauque au possible et nous plonge dans une atmosphère plutôt grise et élégiaque, emplie de solitude, quelque chose qui m’a évoqué les magnifiques et désespérantes premières notes de Yanqui U.X.O. de Godspeed You ! Black Emperor.

"Kettering" reprend le thème du prologue mais en le structurant davantage, le "popifiant" presque grâce à de jolies notes de piano, la voix de Peter Silberman, fragile et comme traumatisée, emplissant petit à petit l’espace du disque et contribuant, lentement, à le réchauffer.

"Sylvia" est d’emblée plus lyrique, plus nettement ornée d’instruments divers (y compris des cuivres), elle ne manquera pas d’évoquer certaines envolées à la Arcade Fire : une influence à nouveau palpable dans le très bon morceau "Two", avec un même art consommé de la montée et de la ferveur.

Le reste de Hospice se déploiera dans ces trois directions. Ce qui forme une œuvre très cohérente, unie par le sentiment lancinant de maladie, de mort, de reconstruction hasardeuse et lente, autour duquel planent des figures de fantômes, d’hôpitaux… Tout cela (en plus des influences précédemment citées) ne pourra pas, à un moment ou un autre, ne pas faire penser à The Wall, en moins conceptuel et moins sordide.

Je trouve dommage que certaines plages (pas beaucoup heureusement : "Atrophy" en est un bon exemple) soient un poil trop longues et que l’aspect instrumental y soit presque artificiellement plaqué : cela ébrèche la cohésion de l’ensemble et empêche Hospice d’être une réussite intégrale et absolue de bout en bout. Il n’en reste pas moins que l’opus des Antlers est suffisamment intéressant et abouti pour être l’un des très bons albums de 2009, réussissant à maintenir un équilibre (théoriquement extrêmement précaire) entre l’intimisme, la noirceur, l’exigence underground et la veine pop.

Peut-être "Epilogue" synthétise-t-il ces différentes facettes en proposant des accords de guitare relativement classiques et mémorisables, quoique très dépouillés et presque austères, magnifiés par la voix de Peter Silberman, une voix qui introduit ici une nouvelle palette de nuances (lesquelles semblent par instants ressusciter Jeff Buckley, à d’autres moments rivaliser avec les accents soul et même gospel d’Antony & The Johnsons). Une voix qui est également mise en avant dans l’un des meilleurs titres de l’album, "Bear", sorte de balade à la fois triste et enjouée où des rais de lumière pointent au travers des nuages.

Dans la mesure où Hospice semble avoir été difficile à sortir, qui plus est être "le" projet porté de longue date par Silberman, on peut se demander quel sera le futur pour The Antlers (s’il y en a un). Il est évident que ce type d’album, qui marque sur le moment, est rétrospectivement appréhendé très différemment en fonction de la suite de la carrière du groupe. Mais comme nous ne sommes pas là pour lire dans l’avenir (d’ailleurs tout n’est-il pas censé s’arrêter brutalement en 2012 ?!), contentons-nous pour l’heure d’apprécier Hospice, venu d’un peu nulle part, pour ce qu’il est – à savoir un très bel album.

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