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Spirou et Fantasio t.02 : Il y a un sorcier à Champignac

Par Icecool

- DOSSIER PEDAGOGIQUE -

Il y a

un   SORCIER

à Champignac

Franquin et Henri Gillain,

Ed. Dupuis, 1951.

Spirou et Fantasio t.02 : Il y a un sorcier à Champignac


 
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Dossier téléchargeable (format PDF) : http://dl.free.fr/v6T439hE5

 L’intrigue en résumé :

Spirou et Fantasio prennent la décision d’aller camper près du village de Champignac-en-Cambrousse. Dès leur arrivée, ils sont confrontés à des évènements étranges et inquiétants : les animaux se métamorphosent, le lait devient soudainement imbuvable et un vagabond est bientôt accusé de sorcellerie par les habitants de la commune et son maire. A proximité, nos héros rencontrent un châtelain original : le comte de Champignac, qui mène au cœur de son domaine des expériences scientifiques extraordinaires…

 

 Questionnaire pour les élèves :


La couverture d’une B.D. comporte deux messages : l’un écrit, l’autre dessiné.

 


NIVEAU 1

-  Quel est le titre de cet album ? Comment pouvez-vous l’interpréter ?

-  Quel semble être le sujet principal de cet album ? Que suggère l’accroche de la série, située en bas de la couverture ?

-  Le scénariste et l’illustrateur sont-ils deux personnes différentes ? Le nom de l’éditeur apparait-il ?

-  Que représente l’illustration principale ? Décrire notamment les personnages, l’époque, l’ambiance générale.

-  Quelles sont les couleurs dominantes de cette couverture ?

-  Quelles informations supplémentaires donne éventuellement l’image, en complément du nom de l’album ?

NIVEAU 2

-  Une couverture cherche à suggérer une histoire. D’après le titre et le visuel, imaginez en quelques lignes quel pourrait être le récit de cet album.

-  Trouvez le rapport le plus évident entre le titre et l’illustration.

-  Cherchez la définition des termes suivants : cambrousse, sorcier, alchimiste, bohémien, tsigane.

-  Cette couverture vous donne-t-elle envie de lire la B.D. ? Pourquoi ? En quoi peut-on dire que la couverture est la « vitrine » d’une B.D. ?

NIVEAU 3

-  Essayez de décrire l’atmosphère de cette couverture. «L’ambiance» générale vous parait-elle lourde ou légère ? Explicitez vos choix.

-  Tentez de trouver des œuvres (romans, films, etc.) mettant en opposition le Savoir et l’Ignorance, la Culture et la Nature.

·   Lecture et analyse de la couverture :

 
Le personnage de Spirou fut imaginé par Robert Velter (dit Rob-Vel) pour le lancement d’un nouveau périodique jeunesse, imaginé dès 1937 et lancé le 21 avril 1938 : le Journal de Spirou. Le héros (dont le nom wallon signifie écureuil ou enfant espiègle) vivra alternativement ses premières aventures, durant des années de guerre mouvementées, sous la plume de plusieurs auteurs, dont le dessinateur Joseph Gillain (dit Jijé) en 1940 et 1943, puis André Franquin dès 1946. Ce dernier, prenant en charge officiellement la série à partir de 1947, révolutionnera le graphisme et l’univers de ces personnages devenus emblématiques du style rond, humoristique et dynamique de l’Ecole de Marcinelle (réunion d’auteurs publiés par les Editions Dupuis, comme Roba, Peyo, Morris et Will).

 

Il y a un sorcier à Champignac constitue la première grande aventure de Spirou et Fantasio, et l’accroche visible en couverture se charge de mentionner ce fait nouveau, sans négliger une part de suspense, sinon de mystère. La typographie choisie pour ce bandeau oblique en noir et blanc résonne comme celle d’une affiche de film noir, genre alors extrêmement populaire dans les années 1950 (cf. des films comme Le Troisième homme (C. Reed - 1950) et Quand la ville dort (J. Huston - 1950)). Le mystère constitue de fait l’architecture thématique et graphique mise en place par le jeune auteur qu’est alors Franquin, ce dernier n’hésitant pas à faire appel à des scénaristes plus confirmés, quitte à retravailler ensuite l’histoire à sa guise.

Le scénario de l’album est ici écrit par un certain Jean Darc (en réalité Henri Gillain, instituteur et frère du dessinateur Jijé) qui s’inspirera de son village natal situé au Luxembourg pour imaginer son Champignac, tandis que Franquin prendra comme modèle le château de Skeuvre à Natoye (province de Namur, en Belgique) pour dessiner le manoir du comte.

 

Spirou et Fantasio t.02 : Il y a un sorcier à Champignac

Le chateau de Skeuvre, inspirateur de celui du comte de Champignac
©Jean-Pol Grandmont

Ce qui frappe immédiatement le lecteur à la lecture du titre et de l’illustration, c’est le croisement des genres littéraires que supposent à la fois une phrase sonnant comme un constat ou un coup de tonnerre stupéfait (Il y a…) et le surgissement d’une interrogation dubitative : finalement, y a-t-il oui ou non présence d’un sorcier dans cette commune rurale (la cambrousse, figure « ironique » de la campagne) paisible et isolée ? Le point d’interrogation sous-jacent est présent mais ne figure pas dans le titre, alors qu’il vient désigner les héros comme principaux acteurs « théâtraux » d’une intrigue où tout le monde peut être le coupable idéal. Rappelons que dans ce lieu clos (Champignac), à l’atmosphère déjà digne des œuvres d’Agatha Christie ou d’Alfred Hitchcock, les lecteurs du Journal de Spirou voient apparaitre une galerie de personnages totalement inconnus mais répondant aux archétypes en vigueur : le romanichel à l’aspect fielleux, le savant âgé et dédaigneux et le notable à la présence juridique ou politique discutable, perpétuellement en retard sur les évènements.

 

Spirou et Fantasio (accompagnés de l’écureuil Spip) occupant de manière inquiète le centre de la composition, on ne manquera pas de diviser la couverture en deux zones distinctes : l’instinct et la mobilité pour la partie gauche (la fougue du héros, le tsigane et sa roulotte, l’arbre comme témoin de la Nature), la sédentarité et la réflexion pour la partie droite (Fantasio est journaliste ; le savant et le maire ; le château et le domaine). Des éléments perturbateurs ou des effets miroirs vont et viennent entre ces deux hémisphères : l’arbre et la végétation du parc, la roulotte et le château, le « sorcier » supposé (le romanichel) et son « œuvre » (un cochon victime d’une mutation), ainsi que l’arrière plan jaunâtre (signe d’un climat orageux ou de la présence silencieuse d’un gaz) trouvent d’étranges échos. Ces différents éléments, emblématiques du Fantastique, de la Science-fiction et du Policier, seront repris par d’autres auteurs, comme en témoigne la couverture de l’album La Marque jaune, réalisée par E.P. Jacobs en 1956.

 

Témoins discrets du récit policier de type whodunit, les indices balisent la couverture : le titre suggère la piste erronée puisque, outre la mention et la présence du paranormal, on s’en référera à la subtile alchimie entre le visible et l’invisible ici mis en scène. Est donc invisible le village de Champignac, qui semble se réduire à son maire interloqué et aux toits d’un château digne de Dracula ou d’un quelconque antre du Mal (présence de corbeaux ou de chauve-souris ?). Est à l’inverse visible la cause la plus directe des perturbations surnaturelles, puisque les étranges couleurs du cochon se retrouvent sur quelques-uns des nombreux champignons situés aux pieds des héros. La seule sorcellerie « champignacienne » réside en une consistance et un savant dosage interne : Champignac, c’est la marque (sinon la résultante chimique) du champignon, et seul un mycologue confirmé a pu en tirer ses propres expérimentations, ceci à l’abri des regards extérieurs. Le comte, habillé d’une blouse de laboratoire, est donc bien le seul coupable logique, d’autant plus qu’il tient à la main ses bésicles : il détient le moyen de voir, et donc de connaitre la vérité. Il est, dans la troublante instantanéité figée du visuel de couverture, le seul à disposer du Savoir.

 

La couverture dit tout des clés de l’expression de son auteur : soit encore, comme la série Spirou et Fantasio le montrera par la suite à de multiples reprises, une belle prise de position humaniste et pacifique de Franquin. C’est en effet, dans une ère où l’Europe et le monde, à peine surgis de la guerre et de la peur de la destruction atomique, ont replongé dans la paranoïa de la Guerre Froide, un signal fort adressé aux lecteurs de tous âges contre l’ignorance et les progrès dévoyés de la Science.


 

Spirou et Fantasio t.02 : Il y a un sorcier à Champignac


 
La couverture originelle, réalisée par Franquin lors de la 1ère édition (1951), fut entièrement redessinée en 1971 (4ème édition : voir couverture proposée pour ce dossier) : l'album s'inscrit dorénavant comme 2ème titre officiel de la série, et chaque personnage ou détail est sensiblement différent, à l'instar du point d'interrogation au trait épaissi et à la couleur retouchée.

·   Pistes supplémentaires :

-   http://www.dupuis.com/catalogue/FR/s/124/spirou_et_fantasio.html : page consacrée à la série Spirou et Fantasio sur le site des Editions Dupuis.

-   http://www.franquin.com/spirou_fantasio/index_spirou.php : le site officiel de Franquin (nombreux dossiers et documents).

-   http://www.spirou.com/spirou/albums/02/index.htm : site officiel de la série et présentation de l’album Il y a un sorcier à Champignac.

-   http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_compl%C3%A8te_des_histoires_de_Spirou_et_Fantasio: chronologie complète des différentes Aventures de Spirou et Fantasio.

-   http://www.roue-libre.be/article.php3?id_article=73 : du Château de Skeuvre à celui de Champignac, en quelques cases et photos.

-   http://pagesperso-orange.fr/tout.spirou/ : pour tout savoir de l’histoire, des auteurs, séries et rubriques du Journal de Spirou.

 
Dossier réalisé par Ph. Tomblaine.


Images toutes ©Editions Dupuis et Franquin, 1951.


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