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“La domination masculine” appuie là où ça fait mâle

Par Kub3

Dans La domination masculine, Patric Jean – réalisateur de La raison du plus fort en 2005 – s’attaque au sexisme dans ses ultimes retranchements. Édifiant, le film réhabilite le féminisme et montre toute l’actualité d’un combat souvent qualifié d’arrière garde. S’il n’offre pas de découverte majeure, il réussit avec intelligence à dresser un tableau de la plus vieille domination du monde, où se mêlent le comique et le tragique, à l’image du “mur” qu’il construit tout au long du film.

“La domination masculine” appuie là où ça fait mâle

“Allez un petit peu plus en arrière… Un, deux, trois… Comme ça, on tire, pour pouvoir avoir une petite mesure standard.” Première séquence dans le cabinet d’un chirurgien spécialiste de l’allongement du pénis : un patient d’une trentaine d’années, blouse ouverte, vient soigner sa virilité. Patric Jean donne le ton et l’ambition du film, donner à voir toutes sortes de dommages collatéraux de la phallocratie.

Entre la France, la Belgique et le Québec, le réalisateur traque la bêtise quotidienne dans les discours et les comportements. Le début du film emporte le spectateur par le rire. La séquence du speed dating dans laquelle des célibataires évoquent leur idéal masculin est savoureuse. “J’aime bien les hommes jaloux, possessifs aussi. Et… arrogants aussi j’aime bien”, entend-on de la bouche d’une trentenaire citadine. La visite d’un magasin de jouets et la rencontre d’un retoucheur photoshop illustrent avec le même humour comment la domination masculine imprègne la société de consommation. Absurde… et déjà inquiétant.

Puis, très habilement, Patric Jean étoffe son propos et choisit des exemples moins légers. La domination masculine prend des traits plus sombres : précarité au travail, rareté de femmes dans les postes dirigeants des entreprises ou de l’état, inégalités salariales.

Mais c’est encore par ses rencontres, quand la domination s’incarne, que le réalisateur est le plus convaincant. Une strip-teaseuse  victime d’abus sexuels dans sa jeunesse, une diatribe misogyne de Léo Ferré, un groupe de parole de femmes battues, Denis, un homme violent repenti… La violence jusqu’ici verbale et symbolique se donne alors à voir dans une séquence ou des femmes battues consultent à l’hôpital. Les visages tuméfiés, les voix sanglotantes racontent l’emballement meurtrier. Celui-là même qui a poussé Marc Lépine à tuer 13 étudiantes à l’école Polytechnique de Montréal en 1989 parce qu’elles étaient féministes.

Dans la dernière partie du documentaire, Patric Jean rencontre au Québec des “masculinistes”, des hommes résolus à rétablir la place naturelle – entendez la domination – masculine et admirateurs de Marc Lépine. Quelques illuminés inoffensifs? Sûrement pas. Le réalisateur a du renoncer à présenter son film à Montréal en raison de menaces proférées à son encontre sur des sites masculinistes.

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La domination masculine - sortie le 25 novembre

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