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Fauves et expressionnistes : Des portraits à vif (1)

Publié le 25 novembre 2009 par Myriam

Cette exposition au Musée Marmottan sur les "Fauves et expressionnistes : de Van Dongen à Otto Dix" met l'accent sur le renouveau artistique outre-Rhin avant la première guerre, qui mena les artistes de l'avant-garde épris de liberté, des premières années du XXème siècle au réalisme critique qui précéda le deuxième conflit mondial" (1).

Kees Van Dongen - Nu de jeune fille, 1906
Ce qui caractérise la cinquantaine de toiles présentées ici et rattachées à différents mouvements (les Fauves, les Expressionnistes, Die Brücke, Der Blaue Reiter, les tenants de la nouvelle objectivité), c'est indéniablement l'acidité de leurs couleurs (essentiellement vert, bleu, violet, orange jaune, rouge), leurs lignes noires appuyées, leurs déformations brutales qui vont jusqu'à préfigurer les futures horreurs de la guerre, déformations exagérées qui vont conduire, me semble-t-il, pour les dernières œuvres jusqu'à la caricature.

Et, d'entrée de jeu, le tableau qui ouvre l'exposition donne le ton. Dans la "Jeune fille au chapeau rouge" (visuel non disponible) peint en 1905 par Edvard Munch "la concentration expressive et tendue de la forme et les couleurs saturées à dominantes rouge et noir confèrent à ce portrait d'enfant un sentiment d'angoisse et une évocation particulièrement pessimiste et inquiète de la destinée humaine" (3). Le peintre ici nous transfère sa propre angoisse, et ce tableau n'est pas sans me rappeler cette toile de Picasso, peinte à peu près à la même époque, où là également l'enfant, peut être un peu plus effrontée, interpelle le spectateur.

Jawlensky - Jeune fille aux pivoines, 1909
Couleurs bleu utilisées de façon inhabituelle, dont notamment la chevelure bleu sombre rehaussée de rouge, cette toile de Kees Van Dongen "Nu de jeune fille" (ci-dessus) peinte en 1906 montre une femme nue, de face, dans une liberté totale ; libérée de la couleur conventionnelle, elle affiche qu'elle est "une icône de la prostitution".

Autre portrait superbe, ce tableau "Jeune fille aux pivoines" (ci-contre) peint en 1909 par Alexeï von Jawlensky. Sur un fond vert acide, se détache une explosion de rouge, rose et grenat, de laquelle émerge, dans une composition triangulaire, ses avants-bras et son superbe visage aux yeux clos avec cette inclinaison digne des portraits des primitifs italiens. "Il émane de ce portrait aux tons stridents, et de manière paradoxale, une intériorité silencieuse qui évoque fortement la nécessité spirituelle prônée par Kandinsky" (3).

Kokoschka - Autoportrait, 1917
Couleurs inhabituelles, déformations des lignes, les artistes outre-Rhin vont de plus en plus refléter le mal être qui suit la première guerre mondiale. Ci-contre, Oskar Kokoschka se peint en 1917 et montre du doigt l'épaule où il a été blessé. La tonalité du tableau est particulièrement sombre, avec ce fond bleu noir, ces lignes tourmentées de vert qui font ressortir la chair verdâtre du visage et la chair rouge meurtrie de la main qui montre la blessure.

Otto Dix - Léonie, 1923
Portraits déformés, portraits jusqu'à la caricature, portraits à vif, ce portrait peint par Otto Dix en 1923, "Léonie", visible à la fin de l'exposition, en est véritablement représentatif.

Acidité des couleurs avec le contraste rouge et jaune, visage émacié qui ressemble plus à une tête de mort que l'on aurait un peu arrangée avec du fard à joue pour la rendre un peu plus pimpante, chapeau qui a plutôt l'allure d'un casque militaire avec son panache rouge, ce portrait est particulièrement saisissant et d'une désillusion profonde et cruelle.

A suivre ...

(1) France Info, Claire Baudéan

(2) "Il est habituel de dire que l'expressionnisme constitue en Europe un grand courant nordique et germanique ... L'expressionnisme renoue d'abord avec le baroque et, à travers lui, avec le gothique. Lié étroitement aux drames de la vie, à une époque qui pressent les grands massacres de 1914-1918, les subit, et tente vainement de les dominer, l'expressionnisme, c'est d'abord un cri, un cri d'hommes jeunes, déchirés par leurs aspirations, par la morale étroite d'une société qui se meurt alors qu'elle se croit éternelle. A la fois libérés et angoissés par la "mort de Dieu" annoncée par Nietzsche, se sentant solidaires des humbles, des pauvres, et de ce prolétariat immense qui se met en route vers on ne sait quel avenir ; écartelés entre ce qu'ils entrevoient du "devenir fabuleux" des Temps modernes et une incurable nostalgie du passé." Pierre Courthion, Editions Rencontre Lausanne, Paris 1966

(3) Catalogue de l'exposition, p. 50, p. 62


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