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Elire un noir à la présidence...

Par Laterna Magica

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Il y a moins d'un demi-siècle, les Etats-Unis se déchiraient sur la question des droits civiques. Aujourd'hui elle s'apprête à élire un homme qui, s'il n'est que métisse, apparaît aux yeux de tous comme Noir, et déclenche de nombreux espoirs dans le monde entier par le seul fait de la couleur de sa peau.

En France, l'abolition de l'esclavage  date du 27 avril 1848, soit tout juste 160 ans. Le métissage de notre population est réel. la cohabitation entre les différentes communautés est mouvementée mais d'une manière générale, au delà du racisme ordinaire qui existe partout, le respect entre les individus quelques soit leurs couleurs de peau s'opère assez naturellement. En tous les cas, nos bus n'ont jamais été partagés avec des places réservées aux blancs. Dans les années 60, la France se déchirait elle à cause de ses colonies, l'Algérie en particulier. Le rapport entre français et immigrés issus des colonies, ou même de nos Territoires d'Outre-Mer, a souvent été compliqués mais jamais entrevu sous l'angle d'un rejet systématique de l'autre.

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Morgan Freeman dans Deep Impact ; Dennis Haysbert dans 24h Chrono

Et pourtant, la représentation des minorités dans les hautes-fonctions de l'Etat, ou même au sein des seuls partis, est encore aujourd'hui quasi inexistante. Aux USA, sous la gouvernance de Bush Jr, deux des plus hautes responsabilités étaient confiées à Colin Powell et Condoleezza Rice. Cela ne choque ni les américains, ni nous français ou européens. Ce modèle nous ne le reproduisons pourtant pas. Les Etats-Unis sont le pays le plus dynamique du point de vue de l'intégration de ces nouveaux citoyens, peu importe leurs pays d'origine.

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Colin Powell et Condoleezza Rice

Le grand symbole de cette capacité extraordinaire d'intégration, c'est cette capacité qu'a le cinéma hollywoodien à devancer l'histoire, a habituer le grand public à des représentations qu'il n'imaginait peut-être pas lui même à priori. Il y a un policier noir dans la rue ? Il y en aura dix à Hollywood, des personnages positifs qui donneront éventuellement l'idée à des noirs d'occuper cette fonction, et aideront les blancs à s'habituer à cette image d'un noir dans un costume de policier.

En France, cette représentation est beaucoup moins évidente. Notre cinéma continue parfois de véhiculer des images de "Noirs Banania", des personnages stéréotypés, peu positifs, souvent des criminels ou de simples amuseurs qui ne servent à rien. L'exemple du Noir serviteur de la nation, intégré de la même manière que le blanc qui occupe à côté de lui la même fonction, le cinéma français ne le donne qu'en très rares occasions.

Devine qui vient diner ce soir
Guess who's coming to dinner
1967
real : Stanley Kramer
Sidney Poitier
Katharine Houghton
COLLECTION CHRISTOPHEL

Devine qui vient dîner ?

Un exemple frappant de cette opposition entre USA et France : Dans le film Devine qui vient dîner ? (Stanley Kramer, 1967), le noir Sydney Poitier est un brillant médecin, distingué et poli. La blanche Katharine Houghton, fille de bonne-famille dont les parents sont anti-raciste, est follement amoureuse de cet homme. Pour les parents, la découverte du futur mari est un choc mais la seul question qui se pose est "S'il n'était pas noir, que pourriez-vous reprocher à cet homme ?".

 

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Romuald et Juliette

L'équivalent français de Devine qui vient dîner ? peut-être Romuald et Juliette (Colline Serreau, 1989). Daniel Auteuil y est Romuald, le PDG d'une entreprise de Yaourt. Il finira par tomber amoureux de Firmine Richard. Dans le film de Kramer, on comprend aisément l'admiration de Katharine Houghton pour Sydney Poitier. L'union ne semble en revanche pas naturelle entre Daniel Auteuil et Firmine Richard. Que pourrions-nous lui reprochez ? Simplement, son personnage est particulièrement négatif : elle est femme de ménage, elle galère, elle a 5 enfants de 5 pères différents, elle est grosse...

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Fadela Amara, Harry Roselmack, Rama Yade

L'intégration des citoyens passe aussi par ces canaux là. On ne peut pas ignorez le pouvoir de l'image, de la télévision et du cinéma, dans une société-spectacle comme la nôtre. Renvoyer sans cesse des beurs et des noirs de notre pays une image de casseurs, de fainéants, de délinquants etc. celà n'aide pas à l'émancipation de ces minorités. Cela ne veut pas dire qu'il faille ignorez les faits lorsqu'ils existent, cela ne veut pas dire qu'il faille faire l'autruche lorsqu'une personne issue de ses minorités agit mal. Juste, il serait important aussi d'opposer à ces images là des contres-exemples, histoire de démontrer qu'il n'y a pas de fatalité.

Harry Roselmack, Fadela Amara, Rachida Dati, Rama Yade... Les choses évoluent peut-être, doucement. Mais ce n'est sans doute pas pour demain que l'Elysée sera occupée par une personne dont la couleur de peau n'est pas blanche...

Benoît Thevenin


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