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“La Route”, chemin malfaisant

Par Kub3

Quelques semaines après le divertissant 2012, les visions d’apocalypse reviennent hanter nos écrans : La Route n’a cependant que ce cadre de fin du monde en commun avec le blockbuster de Roland Emmerich, tant cette adaptation de roman, pour réussie qu’elle soit, s’avère sombre et désespérée…

“La Route”, chemin malfaisant

Point d’explication ici, le spectateur devra s’y faire : c’est la fin du monde, et c’est comme ça. Des secousses et des incendies ont ravagé la surface de la planète, de sorte que les seules âmes encore vivantes n’en ont plus guère (d’âme) et ne pensent qu’à leur propre survie. Dans ce contexte aride, un homme (Viggo Mortensen) tente de protéger son fils, avec qui il fait route vers l’océan.

A l’image de ce long voyage pédestre, le rythme du film est lent pour mieux nous fait ressentir et partager tous les obstacles auxquels les protagonistes doivent faire face. S’il n’est pas sans rappeler Les Fils de l’Homme, La Route est lui avant tout un film de menace. Une menace sourde, omniprésente, aux formes multiples. Une menace que père et fils tentent par tous les moyens de fuir, aussi bien physiquement que métaphoriquement, l’éventualité du suicide étant également de tous les instants et conférant à l’arme du père une cruelle dualité.

Car au-delà du vol, du viol et du meurtre auxquels s’adonnent les bandes de survivants, il existe un tabou bien plus terrible encore : celui du cannibalisme. La faim étant le principal problème, chaque silhouette lointaine porte en elle cette ambiguïté malsaine qui fait de La Route un véritable film de zombies, et lui permet de se doter d’une scène-choc où l’on ne sait plus qui sont les monstres.

Cette thématique des “bons” et des “méchants”, exposée à travers le regard innocent d’un enfant, interroge à coup sûr la nature humaine, de même que le comportement du père, pourtant héros et narrateur, inquiète. Soyez assurés que vous sortirez de la séance avec une bonne dose de paranoïa envers votre prochain et quiconque vous croiserez dans la rue.

Si cette atmosphère (tension sourde et terrible, décors hallucinants de désolation, bande son ciselée de Nick Cave…) fonctionne si bien, c’est aussi grâce aux flashbacks que glisse régulièrement le réalisateur. On y fait en particulier la connaissance d’une autre figure tragique, celle de l’épouse (Charlize Theron). Les quelques moments heureux ressassés -rassurez-vous, on les compte sur les doigts d’une main- forment ainsi un contre-champ qui fait ressortir d’autant plus la noirceur du présent.

Paradoxalement, on ne peut pourtant s’empêcher de penser que c’est également dans ce profond désespoir que réside la faiblesse du film : alors que l’on a déjà toutes les raisons de se flinguer à la sortie, John Hillcoat aurait gagné à alléger substantiellement son œuvre en pathos inutile, en particulier dans sa première moitié absolument suffocante, et à suggérer davantage. Cramponnez-vous à la lueur au bout du chemin, et ne prenez surtout pas La Route à la légère.

“La Route”, chemin malfaisant

En salles le 2 décembre 2009

Crédits photos : © Metropolitan FilmExport

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