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Pour moi, tout a commencé par une journée splendide, que je me suis dit avec ma chérie d'amour qu'on pourrait y aller, parce que ce n'est pas trop loin. Le lieu dont je me suis dit qu'on pourrait y aller, c'est la montagne sacrée des Tchèque, la Mecque de Bohême, l'Oktoberfest d'où qu'il faut se rendre au moins une fois dans sa vie si l'on veut espérer avoir l'ombre d'une chance de pouvoir sonner chez St Pierre la retraite venue. Ce "Mons Palatinum" de Prague (bien qu'il soit un peu plus loin) est le mont "Říp", dont je vous avais déjà un peu parlé à propos du Théâtre National. Aujourd'hui donc, je vais vous l'approfondir (si je puis m'exprimer ainsi), le sujet du mont "Říp".
Alors d'un point de vue linguistique, les Tchèques parlent de "hora Říp" comme ils parlent de "hora Sněžka", bien que de cette dernière, ils parlent moins de "hora" que de "Sněžka" tout court. Ah ouais? Comme déjà signalé dans une précédente publie, "hora" se rapporte plus à "montagne", alors que colline, bute, mont, se dirait plutôt "vrch", "kopec", ou "pahorek". Et donc si l'on considère "Říp" avec ses 460 m d'altitude par rapport à "Sněžka" avec ses 1602 m, soit un rapport de 2/7, force est de constater que l'un des sommets est "colline", tandis que l'autre est "montagne". Et tiens, "Sněžka" est d'ailleurs le plus haut sommet de notre République, mais avec beaucoup de chance parce que la frontière avec la PLogne ne passe qu'à 20 m de ce plus haut sommet (du côté tchèque, gnagnagna :-) Tiens, anecdote. Lorsque le bon dieu mit en partage les trésors de la nature, il mit ensemble des lots qu'il attribua à la criée.
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Passons à "Říp". D'un point de vue étymologique, "Říp" c'est un peu le foin, z'allez voir. D'abord on en parle parfois comme du mont St Georges, parce qu'en son sommet se trouve une rotonde St Georges, qui se dit "Jiří" en Tchèque. Ainsi pour les Germains, "Říp" est donc équivalent de "Sankt Georgsberg" ou "Raudnitzer Berg" de par la proximité avec le bled de "Roudnice (nad Labem)", pour les anglophones c'est "mount Saint George" (et encore pour ceux qui sont culturés, parce que sinon c'est tout simplement "a hill somewhere in the world", cf. carpe + truite + saumon + cabillaud + sardine + thon = fish 'n chips [when not "fish and ships"]), pour les francophones c'est "le mont Rippe" (parce que le "Ř" leur est imprononçable) et pour les Latins, c'est "Rip" itou, comme écrit dans les "Chronica Boemorum" de Cosmas (Lib.I, Cap.II: "circa montem Rip").
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D'un point de vue géologique, le monticule est un ancien volcan de l'aire tertiaire, qui fut modelé par le temps, les vents, et les crottes de bêtes qui eurent quelques 35 millions d'années pour vivre là et faire dessus. Le monticule est donc un basalte sodalito-néphélinique (silicate chloré de sodium, d'aluminium et de silicium) contenant de l'olivine, de l'amphibole, un brin de leucite et d'augite, encore moins de noséane, pas mal de magnétite, divers composés organiques (fibres de cellulose) et quelques germes
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La hauteur des pieds à la tête du mont est de 455,5 m au dessus du niveau de la mer (laquelle?), de 306 m au dessus du niveau de l'Elbe qui coule à 4,5 km au Nord (encore que ça dépend de la hauteur d'eau), et la hauteur du mont est de 200,3 m au dessus du champ avoisinant de la mère Luchon qu'il y a des vaches qui broutent dessus. Sinon depuis le début de son existence, "Říp" était chauve comme le genou d'un cèpe, et de loin tout autour d'en bas l'on pouvait apercevoir la rotonde St Georges en son sommet. Mais vers la fin des années 70 du XIX ème siècle, le comte de Lobko (proprio d'alors) fit boiser le monticule (mont qui tulle). L'on y planta des pins, des chênes, des frênes, des bouleaux, des zhêtres, des zirables, des 'tits yeuls, et même d'autres arbres encore dont je ne sais pas dire le nom. Et depuis, ben l'on ne voit plus rien d'en bas sur la colline en haut, et pas grand chose de la colline d'en haut en regardant en bas. Encore que... en regardant en bas, l'on peut apercevoir quelques jolies plantes comme la gagée de Bohême à grands pieds ("Gagea bohemica") ou l'iris nain à poils roux ("Iris pumila"), mais faut se pencher de près pour les reconnaître. Une fois dessus, sur le monticule, vous disposez de 3 belvédères (promontoires) desquels vous pouvez apercevoir ce splendide pays de Bohême sur des kilomètres, selon le temps et selon vos yeux. Le premier s'appelle le promontoire (belvédère) de Prague. Non pas que l'on puisse voir la capitale (sinon son smog), mais parce qu'il donne au Sud. Le second s'appelle le promontoire de "Mělník", parce qu'on peut voir la ville au Sud-est. Et le troisième s'appelle le promontoire de "Roudnice", parce que comme pour "Mělník", on peut voir dans le fond du paysage l'usine électrique de "Křivenice" qui brûle du charbon brun extrêmement polluant malgré les filtres obligatoires mais non contrôlés et qui provoque des cancers fulgurants des poumons, de la trachée et des bronches aux habitants des environs comme de Prague lorsque le vent (fumier) souffle du mauvais côté (mais non maman, je déconne, c'est pas vrai, c'est pas dangereux du tout, c'est contrôlé maintenant). Ces 3 points-de-vue sont clairement indiqués par des panneaux touristiques, donc no souci pour s'y rendre.
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Maintenant quelques mots (pas mal d'ailleurs) sur l'ancêtre "Čech". Il s'agit d'un héros éponyme qui aurait mené son peuple d'une contrée lointaine afin de l'établir en République Tchèque ("quorum regio Barbaria dicta est, ab Wenceslaklaus regni..." :-) et donner ainsi naissance à toute la nation actuelle dont il est le géniteur. Pour les Français incrédules que ça ferait rigoler, je signale qu'il existe un Francion à l'origine de la nation française, et un Belgion, le duc de Trèves (IV ème siècle avant Jean-Claude) à l'origine de la nation belge. Concernant "Čech", la légende, ou plutôt les légendes (z'allez voir) racontent que l'arrièranciennaïeul serait monté sur notre talus ("Říp"), et de là, scrutant l'horizon, aurait décidé d'établir son peuple céans. Evidemment, la recherche de la "Terra Promissionis" n'est pas une invention tchèque contrairement aux lentilles de contact, aussi compte tenu de la forte odeur de plagiat historique, il est fortement recommandé de considérer ces légendes avec recul et discernement.
La toute première mention de cette légende (enfin la plus ancienne qu'il nous soit resté, et qui ne fut pas volée par les Suédois) remonte à "Cosmas Pragensis" dans ses "Chronica Boemorum" datées d'entre 1119 et 1125 (Lib. I, Cap.II). Tout commence par une description des terres de Bohême alors vierges de présence humaine, autour de la montagne "Říp", entre les fleuves "Ohře" (Eger en Germain) et "Vltava" (Moldau en Germain): "circa montem Rip inter duos fluvios, scilicet Ogram et Wlitauam", pour se terminer par la nomination du pays du nom de l'ancêtre "Čech" ("Boemus" en Latin): "Et unde, inquiunt, melius vel aptius nomen inveniemus, quam, quia tu, o pater, disceris Boemus, dicatur et terra Boemia?" Maintenant ce qui est remarquable dans cette version (par rapport aux suivantes, z'allez-voir), c'est sa concision, et son manque de détail. "Cosmas" ne parle aucunement de la provenance du peuple, pourquoi il est parti d'où qu'il était, et mieux, il ne mentionne même pas que l'ancêtre serait monté sur la colline pour y voir l'étendue de son nouveau domaine (usine électrique incluse).
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La seconde oeuvre qui mentionne l'histoire de l'ancêtre "Čech" et de sa viendue en "terra Boemia" est la Chronique de "Dalimil", datée de 1310 et écrite en langue tchèque ce qui simplifie énormément sa lecture. Ici l'on apprend déjà nettement plus de choses. Tout d'abord "Čech" viendrait d'un coin de Serbie appelé "Charvátsko" ("Hrvatska", aujourd'hui Croatie), pays que le bougre dut quitter avec ses 6 frères et sa troupe après avoir trucidé quelqu'un. Ils arrivèrent finalement auprès de notre colline, et lorsque l'ancêtre grimpa en son sommet (et croyez-moi, c'est pas de la tarte aux quetsches), qu'il vit sur ces terres le nombre de gibiers, d'oiseaux, de poissons et d'abeilles ("Jmámy zemiu po svej vóli, budú nem z té plni stoli, zvěři, ptákóv, ryb, včeł dosti", il avait une bonne vue l'ancêtre), il décida d'établir sa horde céans. Signalons que cette version homérique fut déjà critiquée au XVI ème siècle par "Albert Krantz", qui considérait ce texte comme "fable et invention poétique plus transparente que l'eau" (cf. "Wandalia", 1519). Mais cette analyse n'eut point de succès, malgré la remarquable démonstration (pour l'époque) des incohérences du texte (cf. l'usine électrique).
Le troisième texte de vers 1374 est l'oeuvre de "Přibík Pulkava z Radenína: Cronicae et acta Caroli Quarti et regni Bohemiae concernentia", scribe de l'archevêque de Prague dont la chronique particulièrement discutable (complètement peu fiable) contient des détails étonnants. Pour les débuts, c'est tout comme "Dalimil" (la Charvatie, le meurtre, etc...).
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Et finalement le quatrième texte, celui de "Václav Hájek z Libočan" de vers 1540, atteint tous les sommets du roman inventé (mise en garde maintes fois réitérée envers ces écrits farfelus). Il connaît par exemple la date exacte d'arrivée des 2 frangins sur la colline: l'an 644, soit 5843 ans après la création du monde ("Léta od narození Syna božího šestistého čtyřidcátého čtvrtého [a od stvoření světa již bylo pět tisíc osm set čtyřidcet a tři]"). Il connaît aussi les noms des châteaux dans lesquelles vivaient "Čech" et "Lech" ("On Lech měl své sedění na hradě řečeném Krapina, kterýžto dodnes stojí. Starší bratr, totiž Čech, měl svuoj byt na hradě řečeném Psáry nad potokem prudkým, kterýž Krupá slove").
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Maintenant la légende connue de tous les Tchèques dès le plus jeune âge, la légende que chacun ici connaît par coeur comme les 12 couplets de La Marseillaise en France (ah bon, pas tous?), (parce que) la légende que toutes les mémés lisaient aux chiards pour les endormir, (parce que) la légende dont la lecture était obligatoire dans les écoles primaires afin d'inculquer un brin de civisme patriotique aux moutards chenapans, la légende fabuleusement illustrée par le grand "Mikoláš Aleš" qui commence par "Za Tatrami, v rovinách při řece Visle...", continue avec "To je ta země zaslíbená, zvěře a ptáků plná, medem oplývající" pour se terminer en "a jméno jeho šlo od pokolení do pokolení", ben cette légende est l'oeuvre de "Alois Jirásek" (publiée en 1894). Alors toute la nation tchèque se pâme d'admiration devant cet écrit épique intitulé "Staré pověsti české, O Čechovi" et dont je vous ai trouvé une copie sur la toile. Tous se pâment d'admiration parce que c'est beau, c'est épique, et ça parle au coeur de la nation. Certes, mais historiquement c'est faux. Et pour cause: c'est entièrement basé sur les couillonneries de l'aut' boug' de "Libočan". "Alois" a dépoussiéré la langue (cf. "Václav Hájek: Toť jest ta země [...], země vám zaslíbená, zvěři a ptákuov plná, medem a mlékem oplývající, jakož pak sami vidíte k obývání velmi příhodná, vody se všech stráň hojné a nad obyčej rybné. Tuť vám se nebude nic nedostávati, nepřátelé nebudau moci vám uškoditi" versus "Alois: To je ta země zaslíbená, zvěře a ptáků plná, medem oplývající. Na všem budete míti hojnost, a bude nám dobrou obranou proti nepřátelům").
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Sinon d'un point de vue rationnel, les archéologues n'ont jamais rien trouvé de tangible afin de corroborer cette légende (jusqu'à maintenant). Oui il semblerait que des Slaves auraient vécu sur la colline, mais pas au VI ème siècle puisqu'ils étaient du côté de "Slaný" et de "Kralupy nad Vltavou". Ce n'est qu'au IX ème siècle qu'ils découvrirent l'expansion, la marche à pied et le char à boeufs, et commencèrent à migrer vers le Nord. Oui il existe un tumulus à quelques mètres de l'église "Ctiněves", mais je ne suis même pas sûr que l'on ait archéologué dessous (vraiment archéologué, pas comme "Václav Krolmus", cf. plus loin). Quoi qu'il en soit, toute cette légende, qu'on la considère de l'un ou de l'autre des auteurs, recèle comme un méchant parfum de déjà
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Alors afin de conclure sur l'ancêtre "Čech", et sur sa viendue sur le mont "Říp", notez que la recherche de sa tombe fut une activité aussi populaire que de se fourrer le doigt dans le nez pour les conducteurs scotchés sur le périph pas rizien. Des centaines (milliers?) de personnes munies de pioches, de bêches et de pelles retournèrent les environs sur plusieurs kilomètres à la ronde sans jamais rien trouver. Enfin si, des artefacts anciens, ils en trouvèrent pleins (cf. le petit musée), mais de la tombe de l'ancêtre "Čech", rien, même pas une dent. Et forcément, puisque selon le grand humaniste, éditeur et traducteur "Daniel Adam z Veleslavína", cette tombe se trouverait à "Budeč". Ceci dit elle n'y est pas non plus, parce que "Václav Krolmus" y a fouillé sans succès, là comme ailleurs. Encore que... Ce bougre de couillon de moine ("Krolmus") fouilla en juillet 1853 un talus dans un champ derrière l'église de "Ctiněves".
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Lorsque "Gelasius Dobner" (un moine piariste, mais remarquable historien cependant) se mit à dépecer en morceaux la chronique pourrie de "Václav Hájek z Libočan", il déplut immédiatement. Ben tiens. Selon la (les) chronique(s), les Tchèques remontaient jusqu'à Noé, en passant par le primo-grec "Javán" ("Od Ilelisy pak syna Javánova, vnuka Jafetova, pravnuka Noe, pošli sú Slováci a ti hned vedle Řekův západní země obdržali, jako Slovanská, Ráckú, Charvatská, Bulgarskú, Bosenská, Valášků, Rusku a Mozkevskú [...]") duquel descendait l'ancêtre "Čech", et donc le peuple tchèque était de la lignée "pure" grecque antique, et toute la vieille noblesse de Bohême (comme de PLogne, cf. "Lech") pouvait se flatter de l'appellation d'origine biblo-hellénique contrôlée et avérée. Pour "Gelasius" cependant, ce n'était que vaste couillonnerie, car comme il disait lui même, "Nam juxta criticae praccepta: Traditio cedit rationi, historiae ac veritati". Selon "Dobner", l'origine des Slaves se trouvait aux frontières de l'Asie, du côté de la mer noire (Circassie, ceci dit c'était faux également, la provenance de Circassie), et il l'écrivit dans son ouvrage critique fort apprécié par certains. Les boules pour les autres, car c'était plutôt aigre poilu et plein d'arêtes à avaler.
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Pour contrer "Dobner" et prouver l'existence de "Čech", "Duchovský" est allé prétendre connaître l'épitaphe de la tombe de l'ancêtre: "Zde gest mocné a slawné knjže pan a hospodar národu Charského Malon Čech, a spj oželen slzmi bolestnými od národu swého". Cette inscription aurait été contenue dans un manuscrit inconnu découvert en 1556 (le 24 février après-midi) dans une abbaye retirée. "Duchovský" fut cependant incapable de montrer ni nommer le manuscrit, encore moins l'abbaye. Un autre détracteur de "Dobner", "Eliáš Sandrich" (dit Athanasius) arriva en 1767 avec une idée encore plus délirante que "Duchovský". Le nom "Čech" serait apparu au XII ème siècle sous Fred 1er (dit Barberousse), parce qu'en cette époque le roi de Bohême avait pour fonction archi-loufiat (archi-échanson) dans le souper du St empire romain-germanique. Or en Tchèque archi-loufiat se dit "arcičíšník" ("arcičiešnik" auparavant, abrévié en "Šnek"), et selon ce fichtre d'Athanasius, l'on commença à parler de la Bohême comme de la "arcičiešnikovou zemí", abrévié en "čieší zem" d'où sortit "Čechy", la Bohême (cf. "P. Athanasius a S. Josepho: Disquisitio Historico - Chronologico - Critica: quare, et quando Bohemia fuerit appellata Czechia, eiusque incolae Czechi? [...] nempe Slavo - Bohemos coepisse appellari Czechos ab archi - officio pincernatus, quod Imperator Fridericus Barbarossa Saeculo XII., jure Haereditario annexuit Bohemiae"). A partir de 1768, l'historiographe officiel de la province de Bohême "František Pubička" remit officiellement les frères "Čech" et "Lech" en selle parmi les ancêtres slaves officiels (cf. "Chronologische Geschichte Böhmens unter den Slaven"), et il fallut attendre la renaissance tchèque pour relancer à nouveau un sujet jamais définitivement clos. Signalons encore qu'on pourrait décerner la palme du délire total à "Hanuš Kuffner". Dans son ouvrage intitulé "Záboj a Čestmír: Obrazy starého českého válečnictví doby předkřesťanské" (1923), il affirme que les Slaves dominaient l'Europe centrale déjà sous la Rome antique, et que les auteurs de cette époque considérèrent par erreur ces Slaves comme des Germains. Et attention, il apporte des preuves. D'abord la plupart des noms des villes suisses (Europe centrale?) seraient d'étymologie slave: Bern viendrait de "Breno" (nom propre) voire de "Brno" (capitale de la Moravie), Hospental (mon préféré) viendrait de "hospoda" (taverne), et le mot "čeleď" (famille, groupe, tribu) utilisé par la plèbe pour nommer ses chefs aurait donné "celed", "celt" soit celte, peuple qui n'aurait jamais existé.
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En dehors de la buvette (j'en parlerai plus loin), il s'y trouve encore aujourd'hui une rotonde St Georges. L'édifice date de 1126, année où le prince "Soběslav I" mit une raclée à Lothaire III, le 18 février exactement à la bataille de "Chlumec". Parenthèse: depuis cette époque on utilise en Bohême l'expression "Lothar dopadl jak sedlák u Chlumce", qui se traduit en Français par "Lothaire fut dérouillé comme Vandamme à Kulm". Bref, et pour bien marquer sa victoire éclatante, ben "Soběslav I" décida non pas de construire la rotonde, parce que ça coûtait salé poivré et que la commission d'investissement lui refusa le budget, mais il décida de re-construire la rotonde existante (alors en ruine) et d'y adjoindre la tourelle Ouest quand même, afin que les livres d'histoire n'aillent pas le qualifier de radin manifeste. Et comme il restait encore quelques pépettes dans le fond de la bourse une fois les travaux terminés, l'on fit consacrer le complexe par l'évêque de "Olomouc", "Jindřich Zdík". Alors la plus ancienne mention de cette péripétie se trouve dans les annales du chanoine de "Vyšehrad" ("Canonici Wissegradensis Continuatio Cosmae", entre 1126 et 1142) où l'on peut lire "Hic Luderius, rex Saxonum, seductus ab Ottone, duce Moraviae, inflatus magna superbia et avaritia pecuniae atque malitia et iniquitate, cum suo exercitu venit contra Bohemos iuxta oppidun nomine Chlumecz [...]" puis encore plus loin "Eiusdem etiam temporis curriculo capellam in monte Rzip nuncupatam Sobieslaus dux serenissimus destructam reconstruxit, quam Zdik, sanctae Olomucensis ecclesiae venerabilis episcopus, pristino dotis iuri restauratam cum summa reverentia consecravit". Bien qu'inconnu, le chat-moine de "Vyšehrad" devait être un fidèle partisan du prince "Soběslav" de par la façon dont il flatte infiniment ses exploits comme sa personne. Ces annales furent une des sources des "Annales Gradicenses-Opatovicenses" (entre 1146 et 1260) dans lesquelles on peut lire "Hic Lutterus rex venit cum exercitu contra Boemienses iuxta oppidum nomine Hlumec, ubi Sobezlaus dux cum suo comitatu dei adiutorio partem primatum interfecit, inter quos ruit Otto dux, Moraviensis princeps, interfectus est XIV Kal. Mar. Et sic domuus Sobezlaus et Boemienses cum magno honore et victoria redierunt. Bracizlaus captus est. Capella in monte Rip renovata est". Notez qu'ici il n'est plus fait mention de l'évêque consécrateur. Puis une troisième source mentionne encore notre péripétie, les annales du moine de "Sázava" ("Monachi Sazaviensis Continuatio Cosmae", entre le 12 ème et le 13 ème siècle) où il est écrit "Postquam autem cognovit regem Lotharium cum valida Saxonum manu Boemicis appropinquare terminis, festinavit ei occurrere ad castrum, quod Hlumec dicitur."
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Maintenant revenons à la rotonde St Georges. Elle fut donc reconstruite en 1126, toute belle toute neuve, et dès 1143, le monticule comme la rotonde étaient propriétés de l'abbaye de "Strahov". Au début du XV ème siècle arrivèrent les guerres hussites, et les biens de l'église catholique (la plupart) changèrent de main. Alors là, z'allez voir ça devient un peu compliqué. Parce qu'ils habitaient juste en dessous du mont, ce sont les "Ctinští ze Ctiněvsi" qui récupérèrent le domaine des moines. Ensuite un certain Martin "z Mnetěše" (encore un patelin en dessous du mont) fit fondre 2 cloches pour l'église (notez bien l'importance d'une telle information?). Pis la propriété retourna aux moines de "Strahov" en 1515, lesquels la vendirent en 1577 avec le patelin "Mnetěš" à "Vilém z Rožmberka". Ce dernier en garda propriété jusqu'à son décès, où ses biens passèrent aux mains des "Lobkowitz". Entre-temps la rotonde St Georges ("Jiří" en Tchèque) qui s'appelait auparavant St Adalbert ("Vojtěch" en Tchèque), fut renommée (ou plutôt re-consacrée) au début du XVI ème siècle (l'on n'avait vraiment rien d'autre à fiche), mais d'un point de vue architectural cela ne changea strictement rien. La rotonde devint pour un temps église paroissiale du bled "Rovné" (juste en dessous du monticule), mais parce que comme disait Mr le maire, "si le lieffre avait voulu qu'on n'aille pas à son anticle, il n'aurait pas trouvé plus chiant placée comme priante", l'on finit par aménager le gymnase du village pour les besoins de l'office aux fins d'éviter qu'un cléricard n'aille se croûter sur la grimpante surverglacée en hiver. Pourtant le problème ne fut pas totalement résolu, puisqu'au XVIII ème siècle l'on enterait encore l'macchab autour de la rotonde, et qu'il fallait bien monter la viande froide et faire monter la viande chaude pour les zobs secs. Une première restauration de l'édifice eut lieu en 1826 dans le cadre des 700 ans de la bataille de Kulm ("Chlumec"), et une vraie de vraie (restauration, pas bataille) suivit en 1869 (jusqu'en 1881) pour l'anniversaire des -100 ans que Louis Armstrong posa sa trompette sur la lune. Pis finalement en 1966 jusqu'en 1974, on restaura à nouveau la rotonde afin de lui rendre l'apparence d'avant 1869. Matériellement elle est construites de blocs de marne taillée, et se compose d'un choeur en demi-cercle (le plus petit des édifices), de la pièce principale (le plus gros édifice), et d'une tour accolée (le plus haut des édifices) qu'on dirait 3 des frères Dalton sans le quatrième. Le toit semble être en dur (pierre?) bien que recouvert de sortes de tuiles à l'extérieur.
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Pour finir, si vous souhaitez approfondir le sujet, je vous conseille la lecture du professeur "Dušan Třeštík: Mýty kmene Čechů" (2003), c'est ce qu'il y a de plus récent. Sur la base des divers documents déjà mentionnés ici, mais sur la base également de récits et de légendes diverses qu'il analyse et compare en détail, il en conclut que l'histoire de l'ancêtre "Čech" est authentique. Il avait 6 frères (et non pas 1), il quitta sa terre entre le VI et le VII ème siècle suite à un assassina, et cette terre serait la Pannonie (aujourd'hui entre la Hongrie et la Serbie). L'auteur accorde nettement plus de crédit à la version "Dalimil" qu'à la version "Cosmas" (a-t-il seulement lu "Krantz" et "Dobner"?), au motif que d'autres écrits d'origines orales abondent dans le même sens. Selon "Třeštík" la version "Cosmas" aurait-été volontairement condensée et embellie par le doyen du chapitre de St Guy afin de ne pas "pourrir" l'origine des Tchèques. D'aucuns prétendent carrément que "Cosmas" aurait inventé son histoire de toutes pièces. Hum, je vous laisse juger! Sinon le petit musée de "Roudnice nad Labem" conserve quelques artéfacts archéologiques trouvés sur le monticule: bijoux, poteries, etc... datant des diverses époques où "Říp" était habité. Rien d'exceptionnel, mais si vous souhaitez approfondir le sujet...
En conclusion, il est indéniable que le mont "Říp" ait de tout temps titillé l'esprit humain sans doute par sa forme trop géométrique. Ca c'est pour le mysticisme. Maintenant si vous plantez un compas (pour faire des ronds, pas pour chercher le Nord) sur le mont, et que vous tracez un cercle de rayon 75 km, en ce cercle se trouveront la quasi totalité des peuplements slaves du VII et VIII ème siècle. Ca c'est pour la réalité. En mélangeant bien les 2, vous obtenez un savant mélange de possibles possibilités sans certitudes pouvant prêter à confuses conjectures interprétées selon les époques par divers exaltés. Les "pour" vous diront que ça a dû exister, que tous ces chroniqueurs n'ont tout de même pas pu tout inventer. Les "contre" vous diront "ben prouvez-le" et trouveront les arguments pour démonter pièce par pièce la belle histoire. Et dieu sait que des histoires semblables à dormir debout ont toujours existé, son fils en est un exemple. Au départ un évènement insignifiant (mais parfois même rien), et au final un délire collectif et une foi fanatique en des dogmes contradictoires jusqu'à l'absurde. Sans dec, on est peu de choses face à l'immensité de l'Univers. Pour terminer sur mon sujet d'aujourd'hui, je cède la parole à "Jan Masaryk" (fils du premier président de la première République Tchécoslovaque), défenestré en 1948 par la chienlit con-muniste qui prononça les paroles suivantes: "My Češi jsme nešťastný národ. Praotec Čech, dej mu pánbůh věčnou slávu, byl vůl. Tolik pěkných míst na světě - on se musel zastavit zrovna tam, kde se zastavil, a postavit nás mezi Němce a Rusy. Vůl. Nemám jiné slovo." (Nous les Tchèques, sommes un peuple malchanceux. L'ancêtre "Čech", que dieu lui rende grâce, était un con. Tant de beaux endroits au monde; il fallut qu'il s'arrête justement là où il s'est arrêté, et de nous planter entre les Allemands et les Russes. Un con. Je n'ai pas d'autre mot). Et c'est justement là, qu'il s'est arrêté: 50°23'9.783"N, 14°17'21.178"E.