En preview, voici quelques micro-critiques de films qui vont sortir dans les semaines et mois à venir en France, juste pour donner une idée de ce qu'il faut en attendre :
>> A Serious man (4/5)
Le nouveau film des frères Coen, sensiblement différent des précédents mais archi-coenien tout de même, débarquera en janvier tout auréolé d'une réputation flatteuse...
et méritée : vif, déconcertant voire délirant, virtuose, corrosif et désopilant, avec son réjouissant casting de quasi-inconnus (du grand public), et une
improbable scène d'ouverture en yiddish qui s'inscrit d'ores et déjà dans le panthéon des scènes cultes des frérots. Cela étant dit, il y a un certain snobisme
intellectuel à décréter que c'est leur "meilleur" comme j'ai pu l'entendre dire, à s'inventer une maîtrise totale alors que l'objet "hébraïcomique" est délicieusement fuyant,
s'échappe et virevolte, comme pour mieux suivre les mouvements de pensée des deux esprits les mieux faits du cinéma US.
>> Blindés (0,5/5)
Autant le dire franco, depuis que j'ai vu ce film, je suis un peu inquiet pour le prochain Predators, son réalisateur Nimrod Antal étant en effet aux commandes du projet, heureusement chaperonné par Robert Rodriguez (l'espoir subsiste). Aux dires de certains, l'Américano-Hongrois est capable du meilleur (Kontroll, pas vu), mais là franchement, c'est consternant. Aucun rythme, des acteurs fatigués, une intrigue d'une faiblesse insigne, bref, là où on aurait pu espérer une bonne série B nerveuse, on se trouve face à un nanar qui est au genre fameux du "plan imparable/dernier coup/combine de bras cassés qui vire au cauchemar" ce que le Beowulf de Lambert est à l'heroic fantasy, soit un tas de boue qui eût péniblement mérité une sortie DVD.
>> Tsar (3/5)
Nouveau film de Pavel Lounguine, Tsar est sans doute moins réussi que son précédent (L'Île, un
sommet), avec lequel il forme plus ou moins un dyptique, du point de vue thématique. Plus irrégulier, moins abouti, il recèle néanmoins quelques passages sensationnels qui peuvent évoquer
Aguirre, et reste un objet intéressant, qui résonne singulièrement dans le contexte poutinien. Pour vous
situer le réalisateur, un des trop rares esprits libre de son pays, le nom de Staline le fait salement bégayer en interview (et ça, on apprécie). Autre anecdote, la photo du film est signée Tom
Stern, le chef op' de Clint Eastwood.
>> Les Chèvres du Pentagone (3,5/5)
En dépit d'un titre en VF qui risque fortement de nuire à sa carrière, ce premier long de Grant Heslov narre une histoire si absurde qu'elle en est irrésistible. Souvent hilarant,
le film permet à ses acteurs (visiblement enchantés de se prêter au jeu) de livrer quelques numéros comiques d'anthologie, Big Lebowski style. Vivement recommandé à ceux qui se sont
gondolés devant Burn After Reading, et pas aux grincheux qui n'y ont vu qu'une indigne décontraction de l'esprit. C'est
qu'il y a ici une excentricité toute coenienne, et pas seulement parce que Clooney ou Bridges tiennent les premiers rôles.
>> Fantastic Mr. Fox (4,5/5)
Avant de voir ce film, je n'aimais pas le cinéma de Wes Anderson (j'avais interrompu La Vie aquatique au bout d'un quart
d'heure, c'est dire si j'étais allergique). Mais là, chapeau bas, réussite sur toute la ligne. Visuellement comme dans l'écriture, ce film d'animation est un bijou de finesse, et le casting
vocal en or massif donne comme rarement vie aux personnages de la fable. Du coup, j'ai revu les autres Wes Anderson, et, pire, j'ai aimé. Au final, voilà peut-être un film si réussi qu'il donne
aux sceptiques les clés pour apprécier enfin le talent de son auteur.
>> White Lightnin' (4,5/5) :
Un ovni, cru, violent. Une plongée hallucinée, grandiose et dérisoire, dans l'esprit d'un cinglé magnifique. Un premier film. Une claque. A ne pas mettre sous tous les yeux, pour sûr, mais ceux qui auront la curiosité de s'y frotter ne le regretteront pas.
>> Une éducation (3/5) :
On me l'avait un peu survendu, n'empêche que ce récit d'apprentissage version 60s d'une jeune fille anglaise se laisse regarder avec plaisir, malgré son relatif classicisme.
Servi par l'excellent Peter Sarsgaard, on y remarque surtout celle que la presse anglo-saxonne annonce comme une future grande, Carey Mulligan, mignonne frimousse aux faux airs de Katie
Holmes, profondément charmante en jeune fille en fleur.
>> A Single man (4/5)
Le sujet ne me branchait pas, et Tom Ford ou le monde de la mode ne font pas vraiment partie de mes centres d'intérêts habituels, mais il était question que je m'occupe des
interviews, donc j'y suis allé. Sans regrets, tant A Single man s'est révélé être une véritable expérience de cinéma. Très esthétisant (hé, Ford c'est un styliste), le film est assez
hypnotique, beau, plutôt fort, remarquablement habile et suave, et se propose un peu comme une alternative gay et occidentale aux films de Wong Kar-Waï. Colin Firth y joue enfin un rôle
intéressant, dans lequel il est absolument impeccable. Au final, je comprends mieux pourquoi ce film est lui aussi précédé de rumeurs élogieuses, auxquelles je mêle volontiers ma voix - c'était
pas gagné.
>> Moon (4/5) :
La première réalisation du fils de David Bowie est une réussite incontestable (bon sang ne saurait mentir, même si le fiston n'apprécie que modérément qu'on lui pose des questions sur son génie
de paternel). On n'est ni chez Tarkovsky, ni chez Kubrick, vers lesquels Moon lorgne explicitement, mais tout de même il y a quelque chose dans ce film de puissant, de profondément
troublant, et une majesté visuelle étonnante pour un "petit" film. On ne révèlera rien pour ne pas gâter le plaisir, toujours est-il que la construction du phénomène qui s'y laisse observer
est brillante, de par son approche, son traitement et son ambition. Vivement recommandé, donc.
>> Voilà, j'arrête là pour le moment, je garde les autres sous le coude pour la suite - rien ne presse.