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Enlèvement d’enfants tchadiens

Publié le 05 novembre 2007 par Claudine Verdier

Je me suis toujours sentie particulièrement concernée par l’affaire du Darfour car j’ai vécu 8 ans avec des Tchadiens, et mon ami était originaire d’Abéché. Abéché est la capitale de la province du Ouaddaï, ancien royaume qui fut indépendant du début du 17ème à l’arrivée des Français. Comme on peut s’en douter, le Ouaddaï n’a pas toujours été en paix avec son voisin le Darfour, qui a tenté de l’annexer au 18ème siècle. Mais depuis les conquêtes coloniales, ces deux royaumes ont été intégré l’un au Tchad et l’autre au Soudan et les deux communautés ne se sentaient pas vraiment étrangères, leurs modes de vie sont très comparables.

Cette guerre du Darfour, ces massacres, ces horreurs et cette désespérance nous touchent tous, mais il me semble revoir à travers ces enfants qui souffrent, et ces femmes, mes anciens amis et je me sens doublement bouleversée.

Mais de là à penser faire vivre ces enfants en France, selon nos modes de vie, même avec des adaptations, alors là, je n’aurais jamais pu l’envisager. Mais voilà que des Français, bien intentionnés mais maladroits, ont voulu intervenir d’eux-mêmes, sans savoir vraiment de quoi il retourne. Nous avons tous envie de faire quelque chose, de ne pas rester les bras croisés , transformés par les médias en voyeurs des malheurs humains. Mais si nous sommes informés sur les horreurs de la planète ( et pas toujours d’ailleurs) , nous sommes généralement sous-informés, incultes voire complètement imperméables aux autres civilisations.

Comment peut on envisager de transplanter sans aucune préparation de jeunes enfants issus d’une civilisation sahélienne et musulmane dans une civilisation européenne et chrétienne. Comment ne pas réfléchir un peu au traumatisme que subiront ces enfants, quelques mauvaises voire terribles que soit leur vie chez eux.
Plus pragmatique encore : comment les habituer à notre régime alimentaire ? Vont-ils trouver ici des aliments qu’ils réussiront à manger sans problème s ? Je ne parle pas des camps de réfugiés, mais bien des petits tchadiens. Pour les enfants des camps de réfugier, le problème serait entier d’ailleurs car on sait très bien qu’il est horriblement difficile de réalimenter des enfants en détresse alimentaire. Cela doit la plupart du temps se faire sous surveillance médicale très stricte, voire sous perfusion.

De plus nos rythmes de vie ne sont pas du tout les mêmes. Les notions de temps, d’espace sont différents. Là bas, la solitude n’existe pas, ce qui signifie que vous n’êtes jamais seul longtemps, contrairement à chez nous où prévaut l’individualisme. Je l’ai vécu moi-même pour pouvoir en témoigner. Je l’ai vécu de manière sympathique et agréable, mais cela nécessitait des ajustements quelque-fois difficiles, des renoncements, mais j’étais consciente de ce que je faisais et consentante. Comment peuvent réagir des enfants non préparés face à des adultes non informé de ces réalités ?

Il ne peut être exclu que des enfants ainsi transplantés n’auraient pas sombré dans la dépression, l’anorexie ou la prostration. J’ai vu des adultes ne pas s’adapter à nos vies citadines, à la solitude, à nos hivers, au froid, au manque de lumière…

Nous voyons bien là les limites d’un système qui tend à nous culpabiliser si nous ne faisons rien, alors qu’il ne nous est humainement pas possible de régler à notre niveau les malheurs du monde lorsque nos propres dirigeants n’y sont pas parvenu. Et cette culpabilisation pousse de brave gens à prendre pour eux, leur famille et ceux qu’ils veulent secourir des risques inconsidérés. Je dis cela en leur laissant aux organisateurs de cette aventure le bénéfice du doute, et en considérant que les parents “adoptants” ont été bernés. Nous en saurons plus assez rapidement il me semble.

Il est seulement à souhaiter que les discussions, négociations etc ,engagées d’ailleurs à l’initiative de notre ministre des Affaires Etrangères, avancent et permettent de soulager toute cette misère.


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