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La merditude des choses

Par Kub3

Les Flamands sont des gens énervants.  Une langue à la musicalité qu’on dirait broyée au concasseur, un humour comme grevé de la boue du Brabant et surtout, vu de ce côté de l’Escaut, un cinéma tellement absent qu’on le croirait depuis longtemps noyé dans le waterzoï d’un obscur bistro d’Antwerpen…

Oui, les Flamands sont des gens énervants. A tel point qu’ils peuvent produire un des plus beaux films qu’il m’ait été donné de voir depuis un paquet de mois.  Je veux parler de La merditude des choses, troisième film de Felix von Groeningen, adapté d’un roman de Dimitri Verhulst.

“La merditude des choses” : une déglingue douce-amère

C’est l’histoire d’un petit garçon, Gunther Strobbe, qui vit chez sa grand-mère et ses oncles, quatre Rapetou locaux, fans du rocker américain Roy Orbison, alcooliques et bourrus. On vit le quotidien de Gunther au jour le jour, telle l’arrivée de l’huissier venu chercher la télévision ou la course de vélo, à poil évidemment, remportée par un des frères. Élevé à la dure, Gunther doit gérer les lendemains de cuite de son père, et tout va bien jusqu’au jour où il lui demande de partir en internat…

La force du film est d’opérer de subtils va-et-vient entre le Gunther enfant et le Gunther devenu adulte, écrivain en proie à ses démons d’enfance. “Il y a deux personnes que je hais, deux femmes. La première m’a donné le jour, l’autre est en train de me faire un gosse “, écrit-il.

Les quatre frères sont touchants dans leur déglingue, le père dans son rôle de daron targnoleur, perdant pied dans les litres de bière ingurgitée au bar du coin, la grand mère “d’un cœur bien plus gros que sa pension“, et bien sûr  Gunther aux yeux si sérieux, perdu dans la colique des jours, selon la belle expression de L-F Céline.

Felix Von Groeningen arrive à rendre crédible cet univers. On pense parfois à Dikkenek, plus parfois au beau film de Bouli Lanners, Eldorado, qui raconte l’errance d’un revendeur de bagnoles américaines à travers la Belgique.

On songe aussi à Indian Runner (le réalisateur revendique avoir repris le plan du douloureux - quoique culte - lancer de petits pois), pour la colère des personnages. “Je n’ai jamais vu un type aussi en colère que toi”, lance le flic honnête à son frère (Viggo Mortensen) à la fin d’Indian Runner. La formule vaut aussi pour Gunther, écrivain siphonné par sa jeunesse et anti-héros de ce film épatant.

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Actuellement en salles

Crédits photos : D.R


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