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James Ensor : un peintre démasqué (3) ?

Publié le 17 janvier 2010 par Myriam

... suite et fin

Désormais, les squelettes et les masques accompagnent l'œuvre de James Ensor (1), ce peintre qui ose se moquer de tout y compris de la mort.

Faut-il le rappeler ses parents étaient marchands de souvenirs à Ostende (jouets, bibelots, coquillages, objets exotiques, masques de carnaval) et cela a nourrit son imagination (2). "Mon enfance a été peuplée de rêves merveilleux et la fréquentation de la boutique de la grand-mère toute irisée de reflets de coquilles et des somptuosités des dentelles, d'étranges bêtes empaillées et des armes terribles de sauvage m'épouvantent ...".

Ensor - L'Etonnement du masque Wouse, 1889
Dans ce tableau "L'Etonnement du masque Wouse" peint en 1889, une vieille femme s'apprête à partir défiler pour le carnaval (le carnaval d'Ostende), mais existe-t-elle vraiment ? N'est-ce donc pas plutôt un squelette que l'on aurait affublé à la hâte de quelques vêtements et d'une ombrelle rouge ? Ses pieds semblent surgir de nulle part, ses mains trop petites et son nez grotesque (d'où coule de la morve) renforcent cette impression, d'autant plus que le sol est jonché de masques abandonnés et de têtes de mort, alors que des spectateurs masqués surgissent sur les deux côtés de la toile (à noter le superbe masque de théâtre nô en haut à droite, masques dont il possédait une collection). "C'est précisément ce réalisme incertain et ambigu des objets, des joyeux "carnavaliers" ou des chimères et démons, qui s'avère crucial dans les mascarades grotesques d'Ensor, leur conférant un aspect irréel caractéristique à partir de 1887" (2).

Ensor - L'intrigue, 1890
Son goût pour la provocation et la farce, ce réalisme incertain, nous le retrouvons dans bon nombre de ces tableaux, comme dans cette toile "L'Intrigue" (1890). Exposée à hauteur de notre regard, nous sommes conviés à rejoindre ce cortège qui se rend au carnaval, à moins que cela ne soit celui du mariage de sa sœur Mariette avec un marchand d'art chinois, l'enfant au premier plan étant sa nièce. Harmonie de couleurs vives et crues, cette toile dénote d'un travail extraordinaire de finesse. Par les masques, à la fois il cache et il met en lumière la caricature de l'humanité. 

Ensor - Squelette se disputant un hareng saur, 1891
Allant jusqu'à pratiquer l'auto-dérision avec jubilation comme c'est le cas avec ces deux "Squelettes se disputant un hareng-saur" (1891, huile sur bois, 16 x 21,5 cm), où il se représente lui-même (l'Art Ensor = "hareng saur") déchiqueté par deux critiques, sa critique de la bourgeoisie, de la société, de l'ordre établi peut être féroce ! 

S'inscrivant dans la lignée du grotesque et de la fantaisie présente dans la peinture flamande comme chez Jérôme Bosch ou Peter Brueghel et incarnant comme nul autre l'expressionnisme flamand, "il a jeté à bas toutes les conventions, poussant dans leurs retranchements le dessin et la gravure, renouvelant la veine de la satire et du grotesque, dans un pie de nez aux avant-gardes de son époque. Burlesque, déroutant, insoumis, son art, aujourd'hui encore, se reconnaît entre mille" (4).

(1) Un aperçu très complet des œuvres d'Ensor

(2) Découverte de l'univers d'Ensor, sa maison-musée à Ostende

(3) Dossier de l'art, n° 168, "James Ensor - Exposition au Musée d'Orsay", dans l'ordre p.32 et p.13

(4) Billets sur le blog d'Alice Bénusiglio "James Ensor, prince des peintres" et sur le blog de la Dilettante "James Ensor - Le maître du fantastique"



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