Editions Buchet-Chastel, 2003
Marie-Hélène Lafon a été révélée cette année à un plus large public par L'annonce. Mais elle a écrit auparavant une dizaine de récits magnifiant la
campagne profonde et ses habitants solitaires.
Dans cet étrange récit, centré autour d'une figure masculine, Rémi, elle fait alterner les photos d'enfance et les photos d'aujourd'hui, les scènes de la ferme auvergnate et celle d'aujourd'hui,
Porte de Bagnolet où, Rémi s'est établi professeur, marié et père d'une petite Louise.
Bien sûr, Rémi collectionne des photos et écrit des choses derrière. Mais là n'est pas l'essentiel. Le titre évoque surtout le style de Marie-Hélène Lafon, celui de décrire le réel en instantanés
photographiques, les souvenirs ou le temps présent. Aucun dialogue, uniquement de la narration.
Car, avec un abondance d'adjectifs, de couleurs, d'odeurs, l'écrivain se saisit à pleine main du "matériau" réel ; on est dans le concret pour mieux taire ses sentiments ; Rémi est un solitaire,
un taiseux mais il saisit tout autour de lui, les couleurs, les odeurs, les fluides : scènes de jeux, d'amour, traite des vaches, scène de maquillage de ses soeurs.
Tout est vu à travers son regard. On retient que le personnage capte uniquement l'univers féminin : les parents sont absents devant l'appareil photo ; tout d'abord, il y a les soeurs, puis
ensuite sa femme et sa fille. Des instants de vie, de la toilette au maquillage en passant par le travail à la ferme ou le fait de jouer à la poupée.
Le sexe et les fluides (urine, sperme, sueur) sont très présents.
Des événements, il y en aura un ou deux mais l'auteur ne recherche ni l'exceptionnel, ni l'aventure. Elle décrit des instants de vie, tout simplement. Puis un jour, le chemin de la vie
bifurque...
Intéressant bien que parfois long (même si le récit ne fait que 150 pages...). On ne retrouve pas ce langage suranné, ce goût du mot rare qui fait tout le charme de
L'annonce.