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2619 - -28. 07. 09
Le « biographisme »
m’est encore apparu problématique à la lecture des commentateurs de Sappho. On
doit se dire que toutes les situations, dans chaque poème, sont aussi bien
réelles qu’inventées ; elles ne forment pas de préalable. Il n’y a pas de
point de départ extérieur à la composition poétique. Ce qui apparaît c’est un
cadre de vie, l’ordre d’un monde avec ses accidents. Il est fait référence à un
fond commun dans lequel se déploie le travail de l’imaginaire. L’expérience à
ce compte se confond avec l’invention. Le vécu et l’inventé se rapprochent et
s’éloignent l’un de l’autre. La réalité concrète existe, mais elle a été
reconstruite, et rendue palpable dans la composition poétique. Elle paraît être
la condition, alors qu’elle est plutôt le résultat d'un artifice. Sinon, paradoxalement,
elle ne serait pas restée aussi centrale, ni aussi clairement définie, aussi
évidente qu’elle l’est, étant issue d’un acte créateur.
X 2609 - 29. 06. 09
La découverte d’une
signification inconnue et le déchiffrement d’un texte obscur ne sont pas
considérés comme un travail créateur. On n’invente rien qui n’ait déjà été « inventé ».
Pourtant, le facteur personnel compte beaucoup dans le déchiffrement, mais les
résultats sont considérés comme faisant partie d’un bien commun et anonyme. Un
autre pouvait bien l’avoir dit aussi.
X 2612 - 05. 07. 09
Dans la composition d’un poème,
les mots se particularisent une seconde fois, ils apportent leur identité, reconnaissable,
mais renouvelée dans l’instant qui s’y est fixé. Les interprètes universalisent
systématiquement et spontanément. C’est proprement « à contre-sens »
— ou contre le sens particulier. L’universel, absorbant le particulier, paraît
plus courant, plus naturel, plus accessible.
©Jean Bollack, publié par Tristan Hordé