Clearstream et le désormais célèbre pourvoi en appel du parquet de Paris conre la relaxe de Dominique de Villepin feront encore couler beaucoup d’encre dans la presse et de salive au café du commerce mais trop souvent sans discernement tant le climat est passionnel autour du martyr autoproclamé de la saga. Aux grands maux les grands mots : « cela montre que le Président persévère dans son acharnement, dans sa haine”. Ce à quoi rétorquent sans rire les aficionados du chef de l’Etat : “ce n’est pas parce que la page est tournée pour le Président que la justice ne peut pas poursuivre son travail”.
Les vitupérations de Dominique de Villepin contre le « complot » élyséen dont il se hurle victime font un tabac dans les médias qui ne se privent pas de les relayer goulûment. L’effet est garanti chez la vox populi qui s’en abreuve sans beaucoup de questionnement. C’est malheureusement la loi du genre à l’heure où l’info est avant tout faite pour choquer et interpeller le citoyen lambda que nous sommes tous peu ou prou. Mais qu’il y a-t-il de vrai dans tout ça qui fleure pas bon la pensée unique ? De l’info, souvent télégraphique, mais surtout de l’intox, de l’involontaire et de la très bien orchestrée.
Le procureur Marin, bien connu pour son attachement indéfectible à Nicolas Sarkozy, a fait aussi très fort avec les médias puisqu’il a réservé son scoop au micro de Jean-Pierre Elkabbach sur Europe 1, dare dare le lendemain matin du verdict, exactement comme il l’avait fait juste avant le procès en dévoilant son futur réquisitoire. Déclarant, en star d’un jour, qu’il avait pris seul cette décision en toute indépendance, sans instruction… écrite. Est-ce bien sérieux ? Selon la haut magistrat (entre-temps désigné procureur général de la cour d’appel de Paris), toute la vérité n’a pas émergé lors du procès et elle pourrait difficilement émerger en appel – auquel se sont pourvus les deux principaux condamnés - sans Villepin dans le box des accusés. Plutôt spécieux comme argument.
Si, comme beaucoup le pensent, le pourvoi en appel contre la relaxe de Dominique de Villepin est une belle entourloupe judiciaire, elle est cousue de gros fil blanc. Une intervention du « sommet » de l’Etat n’est évidemment pas à exclure par le seul fait qu’en France le parquet (la magistrature debout) est sous l’autorité hiérarchique du Garde des Sceaux et donc, en république sarkozienne, du Président en personne. Ajoutons-y du pain béni : Nicolas Sarkozy fut partie civile et MAM « témoin » de l’affaire devant Villepin alors qu’il était Premier ministre.
Tout ce cinéma médiatique est consternant et tous les intervenants ont leur part de responsabilité, mais c’est malheureusement dans l’air du temps. La France n’en sortira pas grandie.