Une verticale du Domaine de l'A (1)

Par Daniel Sériot

Ce Domaine de l’A s’est révélé, pour moi, comme l’une des plus belles rencontres castillonnaises que j’aie pu vivre. Le simple fait qu’il ait pu suivre (et même de très près) l’Opus one est remarquable en soi. La libation fruitée nette de cassis, de framboise, plus exactement de framboise en fleurs ou de toute expression rosacée, d’épices, corsetée d’un boisé dense et miellé s’est voulue réjouissante. Le vin est charnu, très causant, d’une grande amplitude (peut-être de la chaleur…), et, selon moi, propose en avant première la torréfaction décelable plus aisément dans les 2005.

Se confirme la densité d'un boisé remarquable : écorce de chêne, feuilles séchées, tabac, sous-bois... Le goût de la cerise se rapproche nettement du cassis. Floraison fraîche d'un mûrier, également.

Les tannins sont ronds, satinés. Une bouche voluptueuse, à la puissance exponentielle, qui rappelle le goût du noyau dans la finale.

Domaine de L'A, 2006

Boisé évanescent et subtil d'ouvrage de luxe ou de boîte à cigares, cerise fraîche et rose fanée pour parfaire la finesse et la joliesse bouquetées d'un nez vif, floral jusque dans les expressions épicées de la baie rose.

La boucheest immédiatement remplie d'une rondeur expressive, d'une tannicité élégante, certes marquée mais d'une belle souplesse, aux goûts vifs de cerise, de rose toujours, et de notes poivrées. Elle est sous-tendue d'une acidité qui confère puissance et tonicité jusque dans une finale saline aux contours doux-amers, et dont les longueurs empruntent les saveurs de rose épicée.

Domaine de L'A, 2005

Le nez est un peu timide, un peu recroquevillé. Mais d'une pudibonderie déconcertante capable de déganter un fruité luxueux de cerise noire (la burlat?), et peut-être de cassis, au noyau torréfié. Le 2005 joue les jeunesses prudes à la virginité aigrie. En l'état, une faune bouillante, sous une mer calme qui se laisse plisser par le souffle d'un boisé aérien, pleine d'exubérance pour peu qu'on la sollicite.

Il décrit alors une bouche étoffée, d'une grande magnitude et d'une belle gourmandise, au maillage tannique serré, minéral et ainsi d'un grand raffinement. L'acidité est parfaitement intégrée parce que progressivement porteuse pour asseoir une puissance ascendante, révélée dans la finale.

Bref, 2005 joue les Belles Endormies...

Domaine de L'A, 2004

Griserie de notes florales (pivoine?), fruitées (fraise des bois) et de sous-bois (écorce, mousse, feuilles mortes...). La bouche est accueillante, d'une belle maturité de fruit, au goût de graphite, de mine de crayon et d'encre. Un vin terrien, de beaucoup de caractère, aux parfums agrestes. La finale est portée par des notes salines, qui par leur amertume, confirment une minéralité chaude apte à rendre le vin longiligne.La structure tannique est d'une grande expressivité, mais ciselée, tendue, aux impressions de léger fondu...

Magnifique!

Domaine de L'A, 2003

Blason olfactif distingué de fourrure et de cuir, révélant en son centre une cerise noire nimbée de parfums de chocolat, légèrement ferreux, et dont l'orle se teint de notes d'épices douces.

Gracieuseté de la bouche, dont la matière s'imprime avec élégance et sveltesse, en adéquation parfaite avec une tannicité souple. L'acidité brise la coquille d'un corps puissant et élancé qui porte loin dans la finale les plaisirs des fruits noirs au contour minéral par l'expression de l'encre.

Servi avec le Château d'Aiguilhe, 2003. Le Domaine de L'A, 2003 présente plus de chair, se dévoile plus sur le fruit. Peut-être plus féminin...

Isabelle