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Un nid qui dérange

Publié le 23 février 2010 par Rendez-Vous Du Patrimoine

Un nid qui dérange
La Cité nationale de l'histoire de l'immigration (Porte Dorée) va se trouver confrontée, comme d'autres sites avant elle, à une polémique récurrente : pourquoi faire cohabiter de manière durable l'ancien (le monument historique) et le nouveau (extension architecturale ou oeuvre d'art) ? Est-ce bien nécessaire ? Etc.


Le "nid de la discorde" naît ici de l'oeuvre proposée par Tadashi Kawamata qui viendra se lover sur l'accès du palais construit par Albert Laprade (1931).

Les arguments des détracteurs, (Le Figaro, La Tribune de l'art), sont à peu près les mêmes que ceux évoqués  à l'époque pour la pyramide du Louvre (1983-1988) ou pour les colonnes de Buren (1986) : le site est vandalisé, "dénaturé" et l'oeuvre nouvelle accusée de cacher le monument d'origine ou de s'en servir à des fins de qualification.

Tout ceci n'est donc pas très original. Chacun peut prendre parti d'un côté comme de l'autre. Au final, cette attitude de rejet, qui se veut conservatrice au sens premier du mot (maintenir sans rien changer), pose la question de l'existence des artistes à notre époque, de notre cohabitation avec le passé et de notre confiance en l'avenir. Car pourquoi les artistes d'aujourd'hui devraient-ils s'exprimer uniquement dans des zones assignées et lesquelles ? Faut-il interdire toute intervention contemporaine sur un monument historique ? Et sinon sous quelles conditions ? La protection des monuments historiques donne déjà à ceux-ci des armes pour se défendre (outre leur prise en charge par les professionnels et les prises de paroles des associations) et il est bon que tous s'expriment, y compris ceux qui s'inquiètent.


Néanmoins, il faut rappeler qu'il n'est pas question ici de destruction, simplement d'une oeuvre d'art monumentale en bois composée de lattes entrelacées et juxtaposée au monument. A voir la maquette, cette juxtaposition ne paraît pas si monstrueuse que les détracteurs l'annoncent. Celle-ci  peut même attirer un nouveau public sur le site et le faire voir autrement. Qui va aujourd'hui voir les magnifiques sculptures de la facade de l'ancien Musée des colonies ? Honnêtement : les spécialistes. Proposer ce "nid" étrange à proximité est de nature à renouveler les publics, à les mélanger aussi, sans pour autant porter atteinte aux originaux que l'on continuera à voir des coursives et à travers l'oeuvre elle-même. Le procès d'intention est flagrant : nuire a priori au projet en revendiquant une position d'expert du patrimoine crispé sur un postulat : "ne rien changer". On peut aussi imaginer une autre attitude faite d'ouverture, de confiance et de curiosité artistique, avec le postulat que l'oeuvre et le monument peuvent aussi dialoguer à travers le temps, pour le bénéfice des publics et des touristes et pas seulement pour celui des "spécialistes".
Et dans 20 ans, on n'en parlera plus. Je gage même qu'on ne pourra plus se passer de ce "mariage mixte" ! Merci pour votre lecture ! Thank you for reading !


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