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Génétique métamondienne

Par Meta

narcisse Le nom même de “Métamonde” est ambigu, mêlant une connotation ironique tout en désignant de prime abord quelque chose de plus sérieux. Mais comme souvent dans cet ouvrage, son sens ne se saisit ni par une première appréhension, ni par une seconde, mais par une troisième, en réalisant que le second degré n'est que l'occasion d'en soutenir un autre, plus subtil et plus vrai. De prime abord, le Métamonde est “ce qu'il y a au-delà du monde”, formule pompeuse s'il en est qui semblerait indiquer que les textes soutenus vont traiter d'un ailleurs de la physique, évoquer des questions métaphysiques, voire discuter la question du surnaturel ou de la parapsychologie. Il n'en est rien. Le monde dont s'abstrait ici l'auteur n'est pas celui de la réalité sensible, bien au contraire : il s'agit de refuser le monde constitué par les codes aliénants, renoncer autant que possible à la tradition et faire signe non pas vers un imaginaire, mais vers la réalité physique et matérielle que le monde socialement constitué oublie toujours. Le Métamonde serait donc en ce sens un univers de représentations ayant pour fin de désigner la réalité matérielle qui soutend toute la fausseté de nos représentations conceptuelles et la vérité de nos approximations. Il serait ainsi un dispositif ayant pour fin d'inviter celui qui y pénètre à renoncer à l'évidence de ses opinions. N'est-ce pas là une définition somme toute classique d'une entreprise philosophique ? Ne cache-t-on pas ici par un discours quelque peu hermétique la banalité d'une volonté de penser philosophiquement le monde et de s'approcher de sa vérité ? En s'enfonçant plus profondément dans la genèse du terme, on verra que le problème est plus complexe. De manière plus triviale, le Métamonde est le “monde de Méta”, nom attribué à son auteur par la contingence numérique. C'est que sur la toile, 'il faut bien utiliser des pseudonymes pour garantir sa tranquillité. Se baptiser a toujours quelque chose d'incantatoire et de ridicule à la fois ; soit l'auteur du pseudonyme paraît imbu de lui-même, soit sa pudeur achève de le mener à se complaire dans des choix misérables rapportant la dimension masochiste de son identité. Mais concernant le pseudonyme “Méta”, on serait en droit de moquer l'auteur en lui faisant remarquer qu'il a décidé d'embrasser le premier cas en se donnant comme désignation la peu modeste désignation de “au-delà”. Pourtant, malgré le doute que cela peut engendrer, il n'y en a point sur le fait que ce pseudonyme fut choisi dans la plus banale contingence, lorsqu'un administrateur pressé demanda à l'auteur de choisir un surnom : c'est en prenant un nom de héros de fiction et en tronquant celui-ci dans la hâte que le nom “Méta” est apparu, et ce n'est que plus tard qu'il fut évident qu'il évoquait aussi le terme grec. Aussi, le “Métamonde” peut être vu, avec ironie et second degré, comme “le monde de Méta”, son “petit monde”, comme le serait celui de l'humoriste Fernandel, un jardin entretenu avec soin et simplicité à l'instar de l'attention que les jardiniers japonais offre à leurs créations. Pris ainsi, le terme Métamonde a donc deux acceptions : d'une part le dispositif philosophique destiné à construire un réseau de réflexions en vue de travailler à combattre l'aliénation, d'autre part l'univers anecdotique de son auteur. Dans un troisième degré, il faut poser que le nom s'inscrit sous le constat réaliste qu'il ne peut y avoir de pensée réaliste sans ambition, et qu'il ne peut y avoir de pensée solide sans ironie. Si Voltaire nous invite à cultiver notre jardin, il ne nous interdit pas d'essayer d'y faire pousser les plus beaux fruits. Le Métamonde se reconnaît donc comme un petit monde, mais a vocation à engendrer des productions justes et proches du caractère réel et matériel de la terre sans la déformation engendrée par le fantasme et les désirs de son cultivateur. Evidemment, on aura tôt fait de contester l'ambition d'une telle pensée dépourvue de fantasme. Celle-ci en a bien un qu'elle assume : dès l'instant où le cultivateur a renoncé à la reconnaissance et cherche le savoir pour lui-même, dès l'instant où il a reconnu que ses fantasmes étaient à mille lieues de ce qu'il découvre, il peut fantasmer une unique ambition : celle de produire une pensée résolument schizophrénique, sachant que l'acceptation de ce qu'il veut n'est pas ce qu'il découvre et que seul l'art et la philosophie lui permettront d'accepter le caractère douloureux de la matérialité des choses. Avoir goût à l'originalité de la création littéraire tout en reconnaissant que la notion de libre-arbitre est un mythe, prendre plaisir à lire et écrire de la mythologie et du romantisme alors même qu'on a reconnu qu'il n'y a que de la matière dépourvue de spiritualité et que celle-ci n'est que l'expression d'un manque dans la faculté d'interprétation du sujet humain. C'est parce que l'auteur assume cette dichotomie qu'il prétend agir par honnêteté et non guidé par un principe freudien de plaisir qui le pousserait aux pires sophismes, à l'invention de concepts ne renvoyant à rien de réel ou à la tentation de plaquer ses fantasmes sur la réalité à la manière des religieux. Le Métamonde est un jardin purement matériel dans lequel son cultivateur prend plaisir à voir la terre engendrer ses produits tout en passant le reste du temps à rêver par l'art et la littérature parce que ceux-ci lui rendent l'existence supportable et, surtout, féconde.

Peinture : Narcisse, dans "Echo et Narcisse", de Waterhouse.


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