Suite de la traduction du sanskrit du Vivecacudamani : célèbre texte de l'advaita vedanta, attribué à Shankara.
Merci à mon professeur Alain Porte pour ses conseils.
Voir le début de la traduction ici : vivecacudamani 8
LE CORPS
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Ce corps est produit par les actions passées, à partir des éléments grossiers au nombre de cinq et il est la demeure de la jouissance au regard du Soi.
La veille est pour lui un état à partir duquel se produit l’expérience des objets grossiers.
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Par les sens extérieurs, l’individu est de lui-même par la forme du corps au service des objets grossiers qui ont des formes diverses comme une guirlande, du santal, des femmes etc.
C’est pourquoi il y a prépondérance de ce corps dans l’état de veille.
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Puisque tout le monde extérieur est pour l’homme un refuge, sache que ce corps grossier est comme une maison pour le maitre de maison.
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Les caractéristiques du corps seront la naissance, la vieillesse et la mort. Elles sont de différentes sortes comme l’épaisseur etc., l’enfance etc., les règles selon les castes et les stades de vie, beaucoup de différentes maladies, des particularités comme salutation, être méprisé, être honoré.
L’ORGANE INTERNE ET LE CORPS SUBTIL
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Les organes de perception sont l’oreille, la peau, l’œil, le nez, et la langue qui découlent d’une prise de conscience des objets des sens.
La bouche, la main, le pied, même l’anus et les organes génitaux sont les organes d’actions. Ils sont enclins vers les actions.
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« Le mental, l’intellect, le je, la pensée » sont dit être « l’organe interne » en raison de ses propres activités.
Et le mental (manas) par des pensées avec images ou sans images, l’intellect en raison de son rôle à déterminer le sens des choses.
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Le je, c’est-à-dire le moi en raison de l’égoïsme,
la pensée par la caractéristique d’être au contact de son objet
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Le souffle devient prâna (expir) , apana (inspir), vyâna, udâna, samâna, de soi-même du fait de la diversité des fonctions et de la diversité des formes comme l’eau et l’or.
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Les cinq (organes d’action) commençant par la bouche, les cinq (organes de perception) commençant par l’écoute, les cinq (souffles) commençant par l’expir, les cinq ( éléments) commençant par l’éther, l’organe interne , l’intellect etc, l’ignorance, le désir et l’action, on dit que ces huit citadelles sont le corps subtil
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Ce corps appelé « subtil », sache que, il est aussi appelé « lingam » mais il n’a pas pour origine les cinq éléments. Il est pourvu d’imprégnations et il expérimente les fruits de l’action ; il y a surimposition sans commencement du Soi due à sa propre ignorance.
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L’état de rêve est pour lui un état de séparation où il apparait par le reste ; mais dans le rêve , l’intellect (buddhi), de soi-même, en raison des imprégnations diverses qui appartiennent à l’état de veille, après avoir pris l’état d’acteur, apparait là où brille de soi-même le Soi suprême.
Comm : passage très difficile à traduire.
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Le témoin de tout, dont la pensée est la seule surimposition, n’est pas souillé par la moindre action faite par elle ; étant donné qu’il reste indépendant dès lors il n’est pas souillé par les actions accomplies.
102
Cause de toutes les activités, ce corps sera, en ce qui concerne l’homme dont le soi est la conscience, comme l’outil pour le charpentier. C’est pourquoi le Soi est celui qui est indépendant.
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Les qualités telles que la cécité, la maladie, l’acuité pour l’œil dépendent du pouvoir des capacités ou des déficiences, de même les qualités de l’oreille surdité, muet,etc. mais (elles n’appartiennent) pas au soi qui est le connaisseur.
104
Les sages disent que les fonctions comme les vibrations que sont l’inspiration, l’expiration, le bâillement, l’éternuement et la mort etc. sont les effets du souffle ; la soif et la faim sont des qualités du souffle.
105
L’organe interne se tient dans les organes de perceptions comme l’œil etc. et dans le corps avec la pensée « je » qui a l’apparence de l’éclat du Soi.
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Le moi est à connaitre comme étant l’acteur, et celui qui pense être l’expérimentateur, par la jonction avec les éléments comme l’élément sattva (être), il atteint les trois états.
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En ce qui concerne les objets des sens, quand il y a conformité, il y a bonheur, il y a malheur quand il y a opposition.
Le bonheur et le malheur sont les caractéristiques des objets pas celles du Soi qui a pour être la béatitude constante.
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L’objet des sens est plus précieux par la réalité du Soi, il ne l’est pas par lui-même. Etant donné que le Soi de soi-même en effet, est le plus précieux de tous.
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C’est pourquoi le Soi est de la nature de la béatitude éternelle ; pour lui il n’y a jamais de souffrance. Quand il n’y a pas d’objet dans le sommeil profond, la béatitude du Soi est éprouvée.
La révélation, la perception directe, la tradition orale et l’inférence l’attestent.
MAYA ET SES POUVOIRS DE DISPERSION ET D’OCCULTATION
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Elle a pour nom le non-manifesté, énergie du Seigneur suprême, ignorance sans commencement, faite des trois éléments, ultime, mesurable par ses effets par une grande finesse d’esprit, c’est Maya par laquelle le monde entier est engendré ;
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Elle n’est pas être ni non-être , ni de la nature des deux
Elle est différente, elle est non-différente, elle n’est pas de la nature des deux
Elle est faite de parts, elle est dépourvue de parts, elle n’a pas la nature des deux
C’est un grand prodige, elle a une forme indicible.
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Elle peut être détruite par l’éveil complet au Brahman pur et non duel comme l’illusion du serpent (est détruite) par la discrimination de la corde.
Ses qualités sont connues comme étant « rajas, tamas, sattvam » (activité, obscurité, être) par leurs propres effets qui apparaissent.
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L’énergie de dispersion du rajas est faite d’activité d’où l’activité s’écoule au tout début. D’elle proviennent constamment les attractions et répulsions et les souffrances etc. qui sont des modifications du mental.
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Le désir, la colère, l’avidité, la tromperie etc. l’envie, le moi, la jalousie, la malveillance, ces caractéristiques sont terribles ; elles sont pourvues de rajas. Etant donné que c’est l’activité de l’homme, le rajas est la cause du lien ( de servitude)
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Cette énergie de l’élément tamas qui a pour nom « occultation », est l’énergie par laquelle la réalité apparait autre. C’est bien cette énergie qui est la cause de la transmigration de l’homme et la cause de l’extension du pouvoir de projection (du monde).
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Même le sage, même le lettré, même celui qui est adroit, l’observateur des choses infiniment subtiles, touché par le tamas, ne connait pas, même clairement expliqué de beaucoup de manières.
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En vérité, il trouve que la surimposition de l’illusion est vraie ; il s’appuie sur les propriétés de l’illusion ; hélas ! elle est puissante, l’énergie du tamas interminable, immense occultation.
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L’absence de conception, la conception fausse, la supposition fausse, l’erreur lui appartiennent. Celui qui est assujetti à son contact, l’énergie de dispersion ne le libère pas constamment, elle détruit constamment.
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Ignorance, mollesse, inertie, sommeil, erreur, folie, telles sont les caractéristiques du tamas. Celui qui leur est associées ne connait rien ; en effet, il est comme endormi comme une souche.
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L’élément sattva (être) est pur comme de l’eau et néanmoins, après s’être joint avec ces deux là (rajas et tamas) il participe au chemin de l’existence. C’est là que l’image du Soi, étant reflétée, illumine comme le soleil (illumine) le monde inerte tout entier.
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Les caractéristiques du sattva mélangées sont : absence d’orgueil, maitrise intérieure et extérieure, la confiance, la dévotion, le désir de libération, une compréhension divine, le retrait de l’irréel.
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Les caractéristiques du sattva pur sont le calme, la perception de son propre Soi, la paix ultime, la satisfaction, la joie, l’établissement dans le Soi ultime, par lequel on atteint la saveur de ma béatitude constante .
Traduction du sanskrit : José Le Roy