Thérèse est une jeune stagiaire décoratrice de dix-neuf ans engagée pour la période des fêtes de Noël comme vendeuse de jouets dans le grand magasin Frankenberg, à New York. Elle y rencontre Carol, une belle jeune femme blonde et élancée, en manteau de vison, qui la fascine au premier coup d’œil. Celle-ci est en plein divorce et sa petite fille Rindy est confiée pour trois mois à son père, ce dont elle souffre beaucoup !Elle s’attache à son tour à la jeune fille mais son esprit est sans cesse obsédé par son désir de reprendre sa fille à une belle famille qui la rejette et qui, conformiste et aisée, comble de mille façons tous les désirs de la fillette. Amoureuses l’une de l’autre, les deux jeunes femmes entreprennent un long voyage en Pennsylvanie, mais Carol doit revenir très vite à New York, quitte à renoncer à tout jamais à sa fille, suite aux menaces de son mari. L’amour maternel l’emporte. La relation amoureuse s’interrompt.
A ce stade du récit et pour avoir lu plusieurs Highsmith tragiques dont les fameux Ripley, je m’attendais à une suite violente et dramatique mais je me trompais !
La romancière a déclaré plusieurs fois ne pas aimer être classée comme auteur de romans policiers ! Son premier roman : «L’Inconnu du Nord-Express» en est un pourtant. Son second, celui-ci, est tout à fait différent. Il fut refusé en 1951 par son éditeur américain en raison de son sujet, l’amour entre femmes, jugé trop osé. Elle le publia sous le pseudonyme de Claire Morgan.
J’ai bien aimé ce livre surprenant et troublant à la fois. La priorité n’est pas donné aux événements ni au suspense mais à la progression des sentiments chez les personnages, assez peu nombreux d’ailleurs. La violence n’apparaît nulle part de façon évidente si ce n’est la présence d’une vague arme à feu dans la voiture. L’horreur est dans les sentiments et les situations qui vous piègent.
« C’est toujours la même pièce qui est rejouée par des acteurs différents.
-Qu’est-ce qui fait qu’une pièces est appelée classique,
-Un classique est ce qui contient une situation humaine de base. »
C’est un livre singulier et attachant d’une très grande romancière dont j’ai tellement aimé aussi , outre son premier livre déjà cité :
« Eaux profondes »
« Le journal d’Edith »
« Monsieur Ripley »
« Ripley entre deux eaux »
« Ripley et les ombres »
« Ripley s’amuse »
« Sur les pas de Ripley »
Carol, Patricia Highsmith(Poche, 315 pages, 1952, 1985 pour la traduction française, 2009) Traduit de l’américain par Emmanuelle de Lesseps.Titre original :The Price of Salt Les Eaux dérobées / Carol (The Price of Salt, signé Claire Morgan, 1952, rééd. Carol, 1990) Calmann-Lévy (1985 & 1990)