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Christian Etchebest : « la vraie cuisine contre le marketing »

Par Obobs

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Chef Cuisinier et propriétaire de plusieurs restaurants, « Le Troquet » dans le 15ème arrondissement de Paris, et plus récemment « La Cantine du troquet » dans le 14ème , Christian ETCHEBEST est un passionné. Amoureux des bons produits du terroir, la sincérité, l'authenticité et le « manger bon » marquent sa cuisine. Il intègre aujourd’hui le comité de pilotage de l’Obobs pour nous faire partager sa générosité, ses connaissances culinaires et son goût pour une cuisine de saveurs et d’équilibres.

Rencontre avec la cuisine, le goût, les saveurs, avec un chef sachant ramener « la bonne bouffe » sur des bases parfaitement saines.

Obobs : Comment définissez-vous votre cuisine ?

Christian Etchebest : je propose une cuisine de tradition revisitée, assez simple, en faisant toujours attention au goût du produit. Je ne masque pas le goût derrière des épices, il faut avant tout que le produit que je sers ressorte. Quand je sers une poitrine, elle est juste snackée, je l’accompagne avec un jus simple pour que le plat reste authentique. Et toute ma cuisine est sur ce principe.

O : Vous employez souvent l’expression « manger bon »… pour un cuisinier comme vous, cette expression signifie quoi ?

C.E. : je vais chercher les bons artisans, simplement. La France bénéficie d’un terroir extraordinaire. La mode actuelle est d’aller chercher à l’étranger de nouveaux goûts alors qu’on a tendance à oublier ceux que nous avons en France. Moi, je veux mettre en avant cette richesse patrimoniale exceptionnelle. Mes endives sont des endives de plein champ, les jambons de Bayonne que je sers sont séchés en plein air, au gré des vents. Et je vérifie chaque produit, chaque vin, en allant sur place. Je goûte tout, je connais tous les artisans avec lesquels je travaille. Certains étaient sur le point de crever, je fais redécouvrir leurs produits. C’est ça « manger bon », c’est manger authentique. Mon métier de cuisiner, c’est aussi aller chercher ces artisans et les défendre.

O : Pourquoi, bien qu’on commence à le comprendre, voulez-vous vous engager aux côtés de l’Obobs ?

C.E. : mon engagement, à part mon amitié pour Pierre Azam avec lequel on partage une vraie passion pour le rugby, c’est la volonté de lutter contre l’obésité pour ne pas finir en France comme les américains ont fini. Je veux ici défendre « la bonne bouffe » et quand on voit toute la malbouffe à laquelle on est confronté, on a vraiment envie de lutter. Un resto n’est pas forcément plus cher que de la malbouffe. Un mauvais menu McDo coûte la même chose qu’un bon plat dans un resto abordable, et au moins, c’est équilibré. Il faut faire passer ce genre de message dans les médias. Malheureusement, McDo est entré dans les mœurs. C’est devenu normal et facile d’y aller mais des artisans comme nous proposent des plats meilleurs et pas forcément plus chers, encore une fois. Il faut donc faire redécouvrir une cuisine française, équilibrée, de terroir et uniquement faite avec des produits frais. Les congélateurs devraient être interdits en cuisine. On ne devrait travailler que des produits frais, exclusivement.

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En plus, on peut facilement aller dans un bistrot. Il y en a partout dans Paris, ils sont faciles d’accès, la cuisine traditionnelle est donc ouverte à tout le monde. Il faut faire redécouvrir la vraie cuisine. Il ne faut pas aller chez McDo tous les jours parce que c’est rentré dans notre fonctionnement alimentaire. Il faut retourner, à l’inverse, dans une vraie cuisine, avec de vrais produits. Et j’insiste là-dessus. Lutter contre l’obésité passe par la vraie cuisine, avec de vrais produits frais, de saison. C’est important. C’est la lutte du marketing contre la vraie cuisine qui fera baisser l’obésité.

O : Quand un cuisinier s’associe à une industrie agro-alimentaire, ça vous pose problème ?

C.E. : Si le cuisinier n’est qu’un prête-nom, c’est gênant. S’il prend juste le chèque sans faire gaffe à ce qu’il signe aussi. Par contre, s’il va en cuisine, s’il élabore une recette avec de vrais produits, qu’il suit des recettes traditionnelles qu’il adapte à la fabrication industrielle sans perdre le goût, sans ajouter une tonne de graisse, de sel, tout va bien. Il ne faut pas que l’industrie détruise le goût de la recette. Ca peut donc être bien s’il y a un respect des produits quand on passe à la fabrication à grande échelle.

O : Vous proposez à La Cantine du troquet des petits déjeuners particulièrement complets, pourquoi ?

C.E. : Pour les mêmes raisons que celles que je donnais tout à l’heure. Je fais une cuisine de patrimoine, et mon métier, c’est aussi la défense de la richesse culinaire. L’intérêt des petits déj, comme pour toute ma cuisine, c’est tirer justement la cuisine vers le haut. Je propose des petits déjeuners avec du sucré et du salé. C’est un vrai petit déjeuner français complet en tirant vers le haut la qualité de tous les produits. Ce n’est pas une formule à 7 € avec des produits de mauvaise qualité, avec un jambon polonais bas de gamme, mais de vrais jambons dont j’ai pu vérifier la qualité.

Ca devrait être le devoir de n’importe quel cuisiner de tirer toute la cuisine vers le haut. Ca éviterait la malbouffe et tous les problèmes qu’on connait depuis quelques années.

O : Quels conseils vous donneriez, en tant que cuisinier, pour revenir à l’équilibre alimentaire ?

C.E. : C’est évident. Il faut commencer par suivre les saisons. Chez les fromagers, les maraîchers, sur tous les marchés, on ne doit acheter que des produits de saison. C’est ce que je fais, ce sont ceux que je cuisine. Les artisans connaissent leurs produits et doivent refaire l’éducation à ce qu’ils vendent.  Il faut prendre nos enfants par la main. Il faut leur expliquer ou se faire expliquer les produits sur les marchés. Ça s’est malheureusement perdu. Donner la priorité aux marchés, aux vrais produits est essentiel, il faut éduquer les enfants à la tradition, au manger bon, à la vraie cuisine de saison si on veut les garder en bonne santé. Il ne faut surtout pas passer à côté.

C’est la même chose quand on forme des jeunes en cuisine. On doit tout leur réapprendre sur les produits, les saisons. On n’a pas le droit d’oublier ça dans une cuisine. On est responsable de ce que l’on fait, de ce qu’on cuisine. On défend un patrimoine.


Photos : (c) Pierre Meunié, tous droits réservés

 Pour aller dans le sens de ce que Christian Etchebest évoque, il est possible également d’emmener vos enfants à la Villette, à Paris, où se tient une exposition absolument essentielle : Comment faire pour lier le plaisir et une alimentation équilibrée ?  « Bon Appétit : l’alimentation dans tous les sens » donne aux enfants et à leurs parents les moyens de mieux comprendre les règles d’une bonne alimentation et ses enjeux.

http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/expositions/bon-appetit/


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