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Un rêve en deux langues

Par Tred @limpossibleblog
Un rêve en deux languesIl n’y a encore pas si longtemps, Kim Ki-Duk était LE cinéaste incontournable de la Corée du Sud aux yeux de la cinéphilie parisienne. Pourtant l’enthousiasme n’est plus franchement de mise à l’égard du travail du cinéaste, malgré la sélection en compétition de son précédent (et pas mal) Souffle. Dream, son nouveau long-métrage (façon de parler, il date de 2008…), est une nouvelle envolée mystérieuse qui n’a plus grand-chose du fascinant qui a pu caractériser son cinéma à une époque.
Déjà, Time, sorti en France en 2007, marquait un clair essoufflement dans l’inspiration du cinéaste, explorant maladroitement la thématique du double, avec ces personnages changeant d’identité en même temps que de visage grâce à la chirurgie esthétique. Ici il est toujours question de dualité, à travers les personnages de Jin et Ran. Lui fait d’étranges rêves qui se produisent au même moment dans la réalité. Elle est somnambule et accomplit les rêves de Jin contre son gré. Les deux sont liés, alors que les rêves de Jin se font de plus en plus violents.
Que Dream soit vaporeux et un peu mou pendant 1h15, et carrément désagréable dans son dernier quart d’heure, ne me gêne finalement pas plus que cela, tant je n’en attendais finalement pas grand-chose. Quelque chose me laisse par contre particulièrement perplexe dans le film de Kim Ki-Duk. Quelque chose d’incongru, et digne de se gratter la tête d’incrédulité : Dream est un film bilingue. C’est un film coréen, qui se déroule en Corée, peuplé de personnages coréens. Pourtant, la moitié des dialogues du long-métrage sont en japonais.
Un rêve en deux languesCette aberration est trop facilement mise sur le compte de l’étrangeté du cinéma de Kim Ki-Duk, repoussant les barrières du réalisme. Si l’on était dans un film clairement fou et barré, cette caractéristique linguistique aurait certainement son rôle à jouer dans le film, et son charme. L’acteur principal de Dream est Jô Odagiri (prochainement à l’affiche du beau film de Kore-Eda Hirokazu Air Doll), japonais donc, et le comédien s’exprime uniquement dans sa langue natale. Sans aucune justification scénaristique. Sans aucun souci dans la cohérence de l’interaction avec les autres personnages. Jin parle en japonais, et tout le monde le comprend sans problème, sans sourciller, lui répondant en coréen.
Kim Ki-Duk aurait dû introduire beaucoup plus d’éléments étranges, mystérieux, loufoques, pour que ce parti pris osé ne dérange pas. A un spectateur qui ne sait faire la différence entre les langues japonaises et coréennes, peut-être ce détail n’est-il pas gênant, moi je n’ai entendu que cela tout au long du film, sans vraiment parvenir à focaliser mon attention sur autre chose. Imaginez un film français dont le protagoniste s’exprimerait uniquement en allemand à tous les autres personnages, sans aucune justification narrative, et sans que cela présente une gêne de compréhension auprès des interlocuteurs français. Le tout dans un cadre 100% français qui ne nécessiterait aucunement un personnage s’exprimant en allemand (mais jouant en apparence un français)... Vous suivez là ? Personne ne tiquerait, à votre avis ?

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