Le domaine des Cavarodes, côté Jardins.

Par Olif

Le domaine des Cavarodes, c'est Etienne Thiébaud, un d'jeun, avec des dreads, et c'est une des grandes révélations-coqueluches-sensations vigneronnes jurassiennes de ces dernières années (ne biffez rien, aucune mention n'est inutile). Fraichement installé en 2007, basé à Liesle, dans le Doubs, 2-5, le département le plus improbable pour y produire du bon vin (mais pas pour le boire NDLR), Etienne s'est déja fait un nom et plusieurs prénoms. Etienne, Thiébaud et Cavarodes. L'inviter à cultiver son Jardin à la Saint-Vincent (approximativement) fut une grande idée de Stéphane-Saint Vernier-Planche et de loin l'événement viticole incontournable de ce mois de mars 2010, même en pleine période de Grands Jours Bourguignons.

Une création de domaine, d'emblée en conversion biologique, en valorisant de vieux cépages oubliés, sur un département de réputation non viticole, depuis la grande crise phylloxérique, voilà décidément une grande bolée de sang neuf dans le landerneau franc-comtois. Etienne possède des vignes éparpillées, réparties sur 4,5 ha (+ 1 ha en plantation), dont un certain nombre dans le Jura voisin, qui lui permettent de bénéficier de l'AOC Arbois pour un certain nombres de ses cuvées. Des vins en culture bio, donc, avec l'usage le plus modéré possible de sulfites à la cave, qui possèdent une belle franchise et une belle buvabilité, doublées d'une grande personnalité.

- Arbois 2008, Poulsard des Gruyères: une macération semi-carbonique de poulsard, qui donne un vin frais, à la robe brique orangée, légèrement turbide. L'élevage court en cuve a préservé la sensation de fruité et de fraicheur, sur de discrètes notes d'autolyse première. Léger renard, donc, pour un vin qui en a la robe, mais de l'acidité et du croquant, légèrement perlant, sur une texture veloutée et soyeuse extrêment digeste. Fluide et léger dans l'esprit, c'est un vrai vin de soif, qu'on sifflerait à grande lampées (modérées, la taille des grandes lampées, cela va de soi, Mr le directeur de la Santé publique).

- Vin de Pays de Franche-Comté 2008, rouge: une cuvée collector de vieux cépages rouges doubiens, vestiges témoins de la viticulture pré-phylloxérique qui avait cours ici, comme un peu partout ailleurs en Franche-Comté. 1/3 Pinot noir, 1/3 Trousseau, le dernier 1/3 en Gamay, Poulsard, Pinot meunier, Argant, Portugais bleu, Enfariné, Mézy. Que de la balle! Vinification en semi-carbonique, élevage de 10 mois en vieilles pièces. Le fruit claque, griotte en tête, d'une gourmandise folle, sur des tanins légèrement rustiques mais drôlement séducteurs. La finale est acidulée, presque effilée, donnant envie d'une nouvelle gorgée. Du canon de première bourre, comme une vérité terrienne ancestrale.

- Vin de Pays de Franche-Comté blanc 2008: du chardonnay associé à une petite proportion de savagnin et de sauvignonnasse, un autre vieux cépage qui n'a rien de péjoratif si ce n'est le nom. Ue cuvée déjà largement appréciée, même au delà des frontières régionales. Premier nez grillé, sur l'autolyse (élevage sur lies), puis citronné, voire pamplemoussé. Finale salivante, grande droiture d'expression, celle d'une minéralité de terroir calcaire. On en raffole toujours autant!

- Vin de Pays de Franche-Comté blanc 2009, prélevé sur fût: premier nez sur la poire william, bouche plus riche que le précédent, finale sur de beaux amers.

- Arbois Chardonnay 2008, prélevé sur fût: nez franc, avec une légère pointe vanillée en provenance du fût (un échantillon prélevé sur un seul fût). En bouche, de la rondeur et de la longueur, sur un bel équilibre, avec une longue finale.

- Arbois Savagnin pressé 2008, prélevé sur fût: une mise prochaine pour cette cuvée ouillée, et on s'en réjouit. Un modèle de définition du cépage, sur le pamplemousse, avec une belle acidité liée à l'amertume. Du vin, dense et tendu, à la jolie finale acidulée.

- Arbois Savagnin pressé 2007: il s'agit de la deuxième mise, la première ayant été épuisée rapidement. Un léger caractère oxydatif malgré l'ouillage, sur des notes de pomme, de curry, de noix verte. En bouche, de l'amplitude et une finale sur de beaux amers bien salivants.

De bien beaux vins, comme on aimerait en boire plus souvent. Et pour un bien plus beau compte-rendu de cette soirée, comme on aimerait en lire plus souvent, il ne faut pas hésiter à se plonger dans les annotations de Tophe, le Crazy Yellow man, qui s'est fendu en plus d'une petite recherche historique sur le vignoble de Liesle. On ne saurait faire mieux!

Comme que comme, une visite des coteaux franc-comtois de Liesle est d'ores et déjà inscrite au programme.

Olif