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Mon meilleur ennemi, un réquisitoire accablant

Par Rob Gordon
On y entre comme dans un cours d'histoire de terminale, ignorant totalement si l'on va être transporté dans un autre monde ou si l'on va sombrer dans l'ennui le plus total. À vrai dire, le début de Mon meilleur ennemi fait peur, tant le propos du film paraît scolaire et empesé. Pas besoin d'un documentaire pour savoir qui est Klaus Barbie et ce qu'il représente. Un livre d'histoire ferait ça très bien.
On réalise assez vite que cette présentation soignée mais terriblement classique, témoignages polis à l'appui, n'était que l'introduction nécessaire à la partie qui intéresse vraiment Kevin Macdonald : la description de la fuite de Barbie, et sa vie tranquille en Bolivie. Là, il laisse éclater sa fascination pour ce monstre total, prêt à côtoyer des juifs pendant des mois pour mieux brouiller les cartes, comme un loup vivant parmi les brebis innocentes. Le film ne rend évidemment pas Barbie sympathique, mais opère une sorte de jugement objectif, évitant le réquisitoire accablant, préférant dépeindre détail après détail l'existence et l'état d'esprit du bourreau. Un traitement plus efficace qui permet de comprendre qu'il y a un être "humain" derrière l'affreux nazi. Descendre les monstres de leur piédestal, voilà un principe qu'il faudrait appliquer plus souvent.
Mon meilleur ennemi est un film discret, refusant toute grandiloquence, qui monte en puissance pour atteindre un climax assez éblouissant. Traité assez rapidement, le procès Barbie apparaît comme un exutoire à la souffrance du monde. Les témoignages des survivants sont de petits morceaux de dignité décrivant parfaitement l'horreur de l'homme et de l'époque. Des documents qui se suffisent à eux-mêmes ; aussi Macdonald a évité du début à la fin les images morbides et les scènes-choc, préférant la force des mots à celle des actes. Un parti pris parmi tant d'autres, qui font de Mon meilleur ennemi un document essentiel et une description captivante de la monstruosité.
8/10

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