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J’ai essayé pour vous : la mise à nu

Publié le 14 avril 2010 par L12s

J’ai essayé pour vous : la mise à nuPersonne ne veut plus « devenir quelqu’un » : c’est has-been (au même titre que le point-virgule) ; la principale préoccupation est aujourd’hui de « représenter quelque chose ». La génération télé-réalité, bercée depuis sa plus tendre enfance par le Truman show et Eyes wide shut, veut transgresser les mœurs d’un papa sodomisateur de jeunes filles au pair, et ce au vu et au su d’une maman fière de l’épanouissement de son chiard. Quand un salopard s’essaye au mannequinat ça peut prêter à rire… et c’est raconté – comme ça a été subit – par Justin D. Freeman.

Il n’est pas loin de 17 heures quand j’arrive sur les lieux du shooting, mort de trouille. Je sais qu’il y aura de l’alcool sur place pour « mettre les filles à l’aise » mais j’ai pris les devants en buvant ma première bière en voiture. Quand j’arrive je suis effectivement « serein » : c’est détente. Peu de personnes sont déjà arrivés et du rosé « la villageoise » n’attend que moi. Je m’attaque avec quelques verres. Les modèles, photographes et autres débarquent petit à petit. Je suis le seul novice de la place, tous ont déjà posé. Trendy et beau métisse musclé aux yeux clairs sont là : je me demande bien à quelle catégorie j’appartiens avec mes bras tous secs, mes oreilles décollées et mon bide d’amateur de houblon.

Peu importe, j’attends, je sociabilise. La maitresse des lieux réalise qu’on n’a pas de son… « Henry » va rapporter un truc, et en attendant elle lance son iPhone. Il se met à cracher du Doc Gynéco et je pense que j’aurais pu tomber dans un pire endroit.

La place se remplit et les gens sont globalement « beaux », à l’aise. Je me sens terriblement démuni, loin de tout ça. J’éprouve le besoin de m’écarter et ça tombe bien : je n’ai plus de clopes et il me reste un paquet dans ma voiture. L’excuse est toute trouvée.

Je remonte avec moi une bière que j’entame. Un « roux à cheveux longs » m’en demande une et je n’ai d’autre choix que de lui offrir la moitié du bas. Ce jeune homme (moins âgé que moi j’entends) se montrera au final fort sympathique. Ses air de jouvenceau effronté lui assurent une certaine prestance et c’est d’ailleurs sans le moindre scrupule qu’il tombera le haut en temps voulu.

En parlant de temps, il s’écoule… et c’est pas cool du tout. Le métisse (sans doute sculpté par un éphèbe de la Grèce Antique) est le premier à se déshabiller. Sur le toit il pose, habitué, tranquille. Sur demande expresse des organisatrices du shooting il est rejoint par un petit brin de femme aux cheveux courts. Ses airs androgynes (pour ne pas rentrer dans toute autre spéculation d’ordre sexuel) et son look mutin lui confèrent un charme tout particulier… et je commence à comprendre que ce sera bientôt mon tour de poser avec elle. J’ai peur.

Je retourne boire un peu. Quelques grammes d’alcool n’ont jamais tué personne ou alors seulement des grands artistes. Et très honnêtement j’ai moins peur de crever bourré que de me faire surprendre en pleine érection… Alors j’enquille.

Je suis au milieu du salon lorsque l’on m’aboie : « Justin, t’es prêt ? Enlève ton T-shirt et viens dans la salle de bain ». Je m’exécute et tente de rester fier – je sais que mon visage se décompose.

Les filles sont déjà là et ne portent qu’une culotte (une chacune quand même, un peu de décence que diable). Mes yeux ne voient plus rien si ce n’est un piercing et quelques tatouages alors je souris bêtement. J’ai envie de pleurer. Ce seront finalement les deux modèles qui pleureront les premières… la faute à la fumée de ma cigarette.

La suite se passe comme dans un mauvais rêve. Ma tête tourne, on me demande d’avoir l’air serein et de « me la raconter ». Je suis un « Hustler » (sic).

« C’est bon », je peux sortir. Je me rhabille et retourne à la buvette. Je me sens plus honteux que jamais. J’ai honte de quoi au final ? D’avoir passé quinze minutes à demi nu entre deux filles splendides ? Je ne sais pas vraiment mais rien n’y fait, surement pas la vodka.

Ça y est, on n’a plus besoin de moi, je m’excuse et m’éclipse dans le brouhaha d’une quinzaine de hipsters fin-bourrés. J’ai du mal à marcher, j’ai du mal à ouvrir ma voiture… et je dois bien avouer que j’aurais même du mal à rentrer chez moi. Toujours est-il qu’un heure plus tard je suis sain et sauf, au fond de mon lit. On est samedi soir, il est 22 heures et je me cache sous ma couette. J’ai 21 ans et je ne suis même pas gay.


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