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Montaigne, mise en scène de Thierry Roisin

Publié le 27 avril 2010 par Onarretetout

montaignethierryroisinJ’ai découvert Montaigne au Théâtre Paris-Villette.

Un homme marche, le temps ne s’arrête jamais, même si, parfois, il semble ralentir, ou accélérer. Aller devant soi, regarder tout ce qui survient, être attentif à ce qu’on trouve et pas seulement à ce qu’on cherche (comme je l’ai entendu dire par Cees Nooteboom, il y a quelques années), voilà l’activité de Montaigne, si j’en crois le spectacle vivifiant mis en scène par Thierry Roisin.

N’hésitant pas à tout écrire, Montaigne ne craignait pas de se contredire, affirmant même : « à jeun je me sens autre, qu’après le repas. » Et je m’étais arrêté aux souvenirs qu’on garde après la scolarité, peut-être même influencé parce qu’un professeur m’aurait cité l’opinion défavorable de Pascal à son sujet (« Les défauts de Montaigne sont grands »). Parfois, j’avais bien lu quelques avis différents. Mais il aurait fallu plonger dans Les Essais, et la langue du XVIe siècle est assez éloignée de la nôtre.

Par paresse, je suis donc allé au théâtre. L’adaptation du texte le rend plus proche, le jeu du comédien (Yannick Choirat) allie souplesse, endurance et simplicité, la scénographie (un trottoir roulant où le comédien marche, marche, marche) évoque tout à la fois le goût du voyage, l’exercice du corps, et le temps, « chose mobile (…) qui apparaît comme en ombre, avec la matière coulante et fluante toujours, sans jamais demeurer stable ni permanente ». La musique (Samuel Maître et Agnès Raina) ajoute à cette fluidité. Dans les coulisses quatre manipulateurs installent les objets qui déclenchent le propos du marcheur. Il n’y a pas, entre Montaigne et moi, l’épaisseur des siècles, car « nous ne sommes hommes, et ne nous tenons les uns aux autres que par la parole. »

Entendre cet homme s’emporter contre les « victoires abjectes » des conquistadores sur le Roi de Mexico, et ce dès le XVIe siècle, est particulièrement remarquable. Ainsi donc, toute l’Europe ne s’est pas levée pour applaudir les exactions qui ont accompagné les conquêtes du Nouveau Monde ! Et choisir de faire dire ce texte dans les micros d’une grande table diplomatique lui donne, aujourd’hui encore, de l’ampleur.

Montaigne s’intéresse à tout ce qui concerne les hommes et les femmes, les affaires de l’esprit et celles du corps. Il en parle tantôt avec sérieux, tantôt en plaisantant, et, peu à peu, nous mène à cette phrase : « Mon métier et mon art, c’est vivre. Il n’est rien si beau et légitime, que de faire bien l’homme. »


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