Certains révèlent tout d'eux-mêmes au premier coup d'œil. Ce qu'ils sont et ce qu'ils veulent être. Des rêves hollywoodiens et des réalismes de supermarché. Des désirs de confort, d'aventure ou de sagesse, le goût de la marchandise ou celui des idées. Ce type-là, veston en tweed, lunettes, cheveux mi-longs, décontracté et analytique: un look d'intellectuel. L'autre, jeune, cheveux rasés avec sa capuche et l'air d'un petit dur. La fausse blonde en tailleur, bas sombre impeccablement tirés sur des jambes qu'elle serre l'une contre l'autre, les genoux surélevés par les talons hauts: secrétaire de direction.
D'autres se cachent. Impossible de dire ce qu'est cet homme neutre, aux habits composites. Baskets confortables, chemise brune, blouson bleu, pas de signe distinctif. Peut-être collectionne-t-il les papillons. Peut-être passe-t-il des nuits sur internet, à visionner des films pornographiques. Peut-être est-ce un érudit du cycle des chevaliers de la table ronde, spécialiste de Lancelot.
On fait des romans d'une silhouette. Puis une vieille dame passe doucement, radieuse, serrée dans son manteau de pluie. Elle porte comme un bibelot, une rose rouge précieuse dans son enveloppe de cellophane.