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La reforestation : le Plan Epargne Retraite des producteurs de cacao

Publié le 05 mai 2010 par Alternativechannel
Par Mariona Vivar Dans la forêt péruvienne, les terres déforestées dans les années 1980 pour accueillir des plantations de coca font aujourd’hui l’objet d’agroforesterie. Entre commerce équitable et projets de replantation et de préservation, une nouvelle économie est en marche… au profit des producteurs. © Eric Garnier Quand Osvaldo et Charito ont entendu les hélicoptères américains du corps anti-drogue vrombir au-dessus de leurs plantations de coca et asperger leurs champs, ils se sont sentis démunis. C’était en 1990, et le maudit champignon gringo a asséché les 11 Ha de coca d’Osvaldo. La poule aux œufs d’or s’est envolée. « J’étais narcotrafiquant, je voyageais beaucoup et je pouvais me payer des femmes. D’un jour à l’autre, j’ai tout perdu. Nous étions très pauvres, après l’éradication de la coca », remémore Osvaldo, 53 ans. Ce péruvien habite en forêt amazonienne, au bord du fleuve Alto Huayabamba. L’aéroport le plus proche se trouve à Tarapoto, à trois heures en bateau, et trois heures en voiture. De la coca au cacao Si dans les années 1980 le fleuve a connu un trafic incessant des sicaires et de cargaisons de feuilles de coca, c’est aujourd’hui le cacao que l’on transporte par bateau. Aujourd’hui, 1 500 petits agriculteurs de cacao se sont regroupés au sein de la coopérative Acopagro, premier exportateur de cacao du pays. Depuis la région de San Martin, il est exporté aux Etats Unis et en Suisse, où est produit le chocolat de la marque de commerce équitable et bio Alter Eco. La coca a été la principale responsable de la déforestation dans la région. Le cacao, en revanche, est cultivé selon les principes de l’agroforesterie qui consiste à combiner culture agricole et entretien de la forêt. Les producteurs cultivent aussi la canne à sucre, la noix de coco ainsi que des cultures vivrières telles que le maïs, les bananes plantain, le manioc puis d’autres fruits et légumes de cette vallée reculée. © Eric Garnier La déforestation : comment arrêter ce fléau ? Mais il reste encore des aires dégradées, triste héritage de la période de la coca et de l’agriculture migratoire. Le gouvernement régional estime que 57 221 Ha de forêt partent en fumée dans la région de San Martin tous les ans. Rappelons seulement que la déforestation est responsable de 20% des émissions de gaz à effet de serre de la planète. Ici, à San Martin, cela se traduit par une réduction drastique de la productivité des cacaoyers. En effet, les producteurs qui ont les meilleurs rendements sont ceux qui sont les plus proches des zones forestières encore intactes, car les conditions pluviométriques sont idéales. Là où on a coupé les arbres, à moins de 10 kilomètres de là, il pleut déjà beaucoup moins et les cacaoyers suffoquent sous la lumière intense du soleil. Le Pur Projet del amigo Tristan Le fondateur et président d’Alter Eco, Tristan Lecomte, est l’un des principaux acheteurs de cacao d’Acopagro. Très concerné par le sort des agriculteurs, il leur rend visite trois fois par an. En 2008, « el amigo Tristan » est arrivé avec un « Pur Projet » qui a séduit les membres de la coopérative. Les agriculteurs sont payés pour planter des arbres, dans le cadre des projets de compensation carbone engagés par les entreprises occidentales comme Nestlé Waters (350 000 arbres), Hugo Boss ou GDF. Même l’actrice Marion Cotillard s’est lancée dans le projet en achetant une 150 arbres à 4 euros l'unité. « On vous donne gratuitement les plantons d’arbres natifs, vous êtes payés 1 sol par arbre (25 centimes d’euro) pour les planter, et dans 20 ans, les revenus de la vente du bois seront tous pour vous. Pur Projet vendra les crédits carbone aux entreprises occidentales et financera ainsi le projet », annonce Tristan Lecomte aux agriculteurs. Voici un projet de reforestation qui permet de lutter contre le changement climatique et de proposer un modèle d’exploitation durable de la forêt. © Eric Garnier Le Plan d'épargne Retraite La coordination du projet est assurée par Maria Pilar et Mayra, deux ingénieures agronomes employées par la même coopérative. Elles ont pour mission de mesurer les parcelles de cacao ainsi que les parcelles à reforester, d’organiser des formations pour les producteurs sur la reforestation, d’organiser la distribution et le suivi des plantons ou encore d’assurer le monitoring en vue de la certification de capture du carbone du projet. En 2 ans, plus de 400 000 arbres ont pu être plantés par les 400 producteurs participant au projet, regroupés au sein de 21 villages. L’objectif est de planter 2 à 4 millions d’arbres en 5 ans, ce qui serait équivalent à 2,3 millions de tonnes de CO2 capturés en 40 ans. La certification du projet est prévue avant la fin de l’année. La déforestation évitée : un nouveau filon Aujourd’hui, les producteurs d’Acopagro veulent aller plus loin. Ils souhaitent aussi préserver les aires de forêt vierge menacées par les industries forestières Ils visent ainsi à obtenir la concession du gouvernement pour préserver plus de 115 000 hectares de forêt, de ruisseaux et rivières et d’une incroyable réserve de Biodiversité. De nouveaux postes de travail seront créés afin de développer des activités qui permettent de bénéficier de la forêt sans la détruire : surveiller la forêt avec des gardes forestiers et des photo satellites, extraire des semences, développer l’éco-tourisme… Bref, un nouveau modèle économique pour les populations locales.

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